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Que d'un autre côté, s'obligeoient à fournir aux Hollandois deux vaiffeaux Anglois, pour fe défendre de toute infulte, pendant qu'on équiperoit le vaiffeau qui les devoit tranfporter: que le Général Anglois leur donneroit un paffeport qui leur ferviroit jufques à ce qu'ils euffent réjoint leur Général : que jufques à ce qu'on eût livré le Fort, il en fortiroit douze des principaux qui y étoient, favoir, van Ray, le Pafteur, deux Souscommis, deux Affiftans, deux Sergens, deux Canonniers, qu'en leur place il y entreroit quatre Anglois & quatre Orancaies Javanois, & pas un Javanois de plus, tant que les Hollandois y feroient.

Cette capitulation fut fignée le 1. de Février 1619. par Wydurck Rama Roi de Jaccatra, par Thomas Dael Général, & tous les Officiers de fon Confeil, & tous ceux du Fort.

Dès le foir, toute l'argenterie du Géné ral Coën fut délivrée au Général Daël; mais on ne voulut pas me permettre d'aller çe foir-là dans le Fort. Le lendemain matin, voici ce qui fe pafla pour le bonheur de la Compagnie.

Le Pangoran de Bantam, émû des promettes que je lui faifois par Houtbraken, & d'ailleurs jaloux de la proie qui alloit tomber au Roi de Jaccatra, fit

partir promptement le Dommagon avec zooo.hommes,.pour empêcher nôtre accommodement, & pour m'emmener. Le Dommagon étant arrivé fut trouver le Roi, qui ne fe doutoit de rien, & lui rendit une lettre du Pangoran. Comme en la lui rendant il vit qu'il n'y avoit prefque perfonne avec ce Prince, il lui mit le poignard fur la gorge, & en même tems fes gens fe rendirent maîtres de toutes les avenues, puis de toute la Ville.

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Le Roi se voiant au pouvoir du Dommagon qui le menaçoit de lui ôter la vie, confentit à tout ce qu'il voulut. Ce fut-là comme un préfage de la deftinée qui l'attendoit; car enfin il ut chaffé de fon Roïaume avec fes femmes & fon fils aîné, & s'en alla plus avant dans le païs, d'où il fut pourtant contraint de revenir, pour gagner fa vie à pêcher avec un canot.

Les Anglois me voiant tiré de leurs mains & mené à Bantam & leur entreprise renversée, demandérent la permiffion de rembarquer leur canon; deforte que le Fort ne demeura plus environné que des habitans de Bantam, qui pour paroître nos amis, y portoient des rafraîchiffemens, à condition que nos gens ne travailleroient point aux fortifications.

Pour moi je fus mené à Bantam, & étroitement gardé dans le Palais du Roi,

quoi que l'on m'y fît des careffes, dans l'efpérance que le Général Coën rendroit le Fort à ce Prince. Cependant ceux qui y étoient travailloient le plus fecrétement qu'il leur étoit poffible à perfectionner les ouvrages, & felon le confeil que, je leur donnai, ils le nommérent Batavia, & mirent ce nom en groffes lettres fur le portail. Les fortifications étant en état, nos gens firent des forties fur les Javanois; ce qui me mit plufieurs fois en danger d'être poignardé.

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Le 25. de Mars 1619. le Général Coën mouilla l'ancre fous le Fort de Batavia. La flote qu'il amena, des Moluques étoit compofée de 17. vaiffeaux. Il trouva mauvais qu'on eût donné un nom au Fort fans fon confentement,, & le fit éfacer, Le lendemain aiant débarqué, fes gens, au nombre de 1 2. drapeaux de foldats & de Matelots, il prit le 30. du mois la Ville de Jaccatra fans réfiftance, n'y aiant eû des nôtres que deux hommes de tuez, & trois du côté des Javanois.

Auffi-tôt il en fit rafer les murailles, &abattre les maifons; puis le 8. d'Avril il fe rendit devant Bantam, où il envoia fur l'heure nous demander au Pangoran, avec 70. autres prifonniers qui avoient été pris fur le Lion noir.

Ces propofitions furent dures à enten

dre, & le Pangoran s'en prenant à moi, me menaça de me faire tuer. Le lende main le Général lui écrivit par deux perfonnes qui lui dirent encore de bouche, qui fi nous n'étions tous à bord dans 24heures, on fauroit bien nous aller prendre. Sur cette menace le Pangoran en fit embarquer 63. dans la vieille chaloupe du Lion noir, mais il me retint encore a vec 7. ou 8. autres.

Au foir étant feul avec moi, il me dit qu'il me comparoit à un petit oiseau, qu'un Roi tenoit dans une cage d'or, qui mangeoit des meilleurs morceaux de fa table, & en recevoit plufieurs autres bons traitemens. L'oiseau dit un jour au Roi, il eft vrai que vous me faites beaucoup de bien, mais dequoi me fert-il? Permettez-moi qu'au moins une fois je me ferve de mes ailes : je vous promets de revenir dans la cage dorée où je fuis fi bien gouverné. Le Roi fe fiant fur fa promeffe lui laiffa prendre fa volée. L'oiseau revint en éfets, mais ce ne fut pas pour rentrer dans fa cage. Il me voulut faire entendre qu'il craignoit mon retour.

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Enfin, on me relacha auffi le lendemam avec les autres qu'on avoit encore. Je retournai avec la flote à Batavia,où je fus reçû avec joie par les gens du Fort, qui avoient fouvent craint pour ma vie. Enfuite

Je

le Général me renvoia devant Bantam, avec une flote, pour en retirer tout ce que je pourrois. Il y eut beaucoup de Chinois qui fe rendirent à nôtre bord, & je les envoiai à Batavia. Jereçus ordre du Général d'en faire déclaration au Pangoran, qui répondit que cela ne lui importoit nulle ment, & que ces gens-là iroient où ils voudroient, ajoûtant, qu'il l'avoit bien dit, que l'oifeau s'envoleroit & qu'ils revien droit, non pour rentrer dans fa cage, mais pour faire envoler les autres oifeaux aveclui. Le 2.d'Août 1619. je commençai les hoftilités contre Bantam, quoi que nous euffions encore 11. de nos gens dans la loge qui y étoit. Nous tirâmes fur la Ville, & prîmes une troupe de pêcheurs, dont 2. ne voulant pas fe rendre prifonniers, furent tuez.

Le 20.d'Octobre, il y eut un homme fur le Dordrecht, l'un des vaiffeaux de nôtre flote, qui prit mon couteau, & l'avala avec le manche, & avec cela un clou de fer ardent. Un autre but à trois trais un plein baril de quart, qui contenoit 1 2. frifons.

Le 11. de Novembre, j'allai, avec 6. vaiffeaux & un yacht qui étoit fous mon commandement, de Bantam à Pulo Paniam, croifer fur les Anglois. Le lende main le Gouverneur Houtman, qui mentoit le Quëft- frife, vint ancrer auprès de nous à la rade où nous étions.

Tome VII.

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