Cependant j'envoiai la Paix & le Weefp avec leurs cargaifons en Perfe, pour fournir le comptoir, & en aporter des foies.

Enfin les Anglois & les Maures s'accor-* dérent, & nous fumes remis en liberté. Après le Duc m'envoia querir, & me pria de ne pas aigrir noire Général fur cette afaire, me faifant préfent de deux habits à la Morefque, & d'un Firman. Je travaillai auffi-tôt à envoier les vaiffeaux que nous avions où ils étoient deftinez. Le Schoonhove & la frégate Brochia furent chargez de petites piéces de toile, & d'autres toiles pour mener à Batavia, & le yacht Heufden partit le 19. de *** 1623. avec une riche cargaifon, en compagnie de deux Anglois, pour s'en retourner en Hollande. Ce fut auffi le premier vaiffeau qui y alla de Suratte en droiture.

Dans le même tems la Paix & le Weefp étant revenus de Perfe, je leur fis promprement prendre leur cargaifon, & la Paix fit voiles le 19. de *** 1 6 2 3. pour retourner auffi en Hollande, mais le Weesp partit le 29. pour Batavia.

Le 19.

de Septembre, le Dordrecht, qui fut le deuxiéme vaiffeau, qui vint en droiture de Hollande à Suratte, y aporta une groffe cargaifon. Le s. d'Octobre il nous vint trois vaiffeaux de Batavia avec beaucoup de marchandises.

Le 16. de Novembre, je fis partir quatr vaiffeaux, en compagnie de quatre Anglois, aiant fait un Traité enfemble pour réfifter à huit galions ennemis, & à quelques autres qui étoient avec eux, & agir ofenfivement fuivant l'occafion..

Le 17: de Mars 1624.ils revinrent tous enfemble de Perfe, après avoir combattu durant deux jours contre les galions Portugais, qui avoient été contraints de prendre chaffe, aiant été fort incommodez dans le combat. Albert Becker, qui commandoit les Hollandois, fut tué d'un gros boulet, dès le commencement de l'action.

Ils amenérent de Perfe le Sieur Jean van Haffel, avec Moffabeéque, qui allaient pour Ambaffadeurs du Roi de Perfe auprès de L. H. P. & du Prince Fréderic Henri de Naffau.

Nôtre caravane, qui vint d'Agra, au nombre de 450. chameaux, m'amena de Ja part du Duc, un bouc avec une corne, qui étoit toute droite fur la tête, & qu'il falloit fcier tous les deux ou trois mois, une fois d'un côté, & une autre fois de l'autre, ou bien cile auroit gagné & fe feroit étendue fur toute la tête. Elle m'amena encore d'Agra un cerf privé, avec qui, en allant à Brochia, nous en prîmes d'autres ; car on lui avoit ataché un lacet à fes cornes & on le laiffoit courir au milieu d'une

troupe de cerfs fauvages, ainfi qu'on en voioitaffez fouvent, & comme ils luttoient enfemble, les cornes du cerf fauvage s'embaraffoient dans le lacet, & y demeurant arrêtées, mes gens l'alloient prendre & l'amenoient.

Le 23. d'Avril 16 24. j'envoiai deux vaiffeaux à Batavia, richement chargez, & en renvoiai deux en Hollande qui portoient les Ambaffadeurs de Perfe. La nuit du 27. de Mai nous eûmes un éléfant, orage où les vents parcoururent toutes les pointes du compas avec tant d'impétuofité, qu'ils abattirent beaucoup de maifons & d'arbres. Il dura fix heures. Il y avoit quarante ans qu'on n'en avoit vû qui euffent duré fi long-tems.

Le 3. d'Octobre 1624. deux vaiffeaux venant d'Amfterdam & un de Zélande, prirent terre à Suratte, & y aportérent un gros fonds de marchandifes; ce qui nous acommoda fort. Peu de tems après nous aprîmes qu'il y avoit neuf galions Portugais devant Daman; furquoi je fis promptement décharger la cargaifon des trois vaiffeaux, & les fis équiper, avec un Anglois dont l'équipage fe tint auffi en état, pour faire tête aux ennemis, s'ils venoient les ataquer dans le baffin de Sohalli, où ils étoient.

Le 11.4. galions, un yacht, 25. fréga tes & quelques petites galéres, fe prefenté

rent devant le baffin. L'Amiral Fortugais écrivit aux Anglois & à nous, pour nous provoquer à nous mettre au large, & à nous battre contre lui. Nous nous moquâmes de fa fanfaronade, fachant qu'il ne pouvoit prendre aucun avantage fur nous dans le lieu où nous étions, & tâchant de l'arrêter jufqu'à ce que nos gens, on les Anglois, que nous atendions, puffentparoître.

Le 19. les galions partirent fubitement, parce qu'une frégate qui étoit en fentinelle, leur vint donner avis qu'elle avoit découvert trois vaisseaux Anglois, qui venoient du large. En éfet, ils les rencontrérent proche de Daman, & deux de leurs vaiffeaux en abordérent le yacht, & en furent com me les maîtres, y mettant des Portugais pour les conduire. Enfuire ils chafférent fur les deux autres qui prirent leurs cours vers la Perfe & fe fauvérent.

Cependant l'équipage du yacht porta promptement de petits barils de poudre dans la chambre du Capitaine, que les Portugais n'avoient encore pû forcer, & y aiant mis le feu ils firent fauter tous les ennemis qu'on y avoit laiffez pour gouverner le vaiffeau, quinonobftant l'état où eette manœuvre le mit, ne laiffa pas de naviger encore, & de fe fauver auffi vers la.Perfe. Nous aprîmes par Daman, que

les Portugais avoient perdu 60. hommes de leur nation, la plupart volontaires.

Il nous vint auffi un autre avis, qu'on avoit encore découvert trois vaiffeaux Anglois fur la côte. Nous réfolûmes, avec le Préfident des Anglois, d'envoier tous les nôtres conjointement, pour fe joindre à eux, & faire tête aux ennemis ; ce qui fut executé le lendemain.

Le 6.de Novembre 1624. il nous vint * deux vaiffeaux de Batavia, & un aux Anglois. Pour prévenir certains inconveniens, j'établis Frederic Kifgens Commandant de nôtre flote. Le 29. les fix vaiffeaux en quoi elle confiftoit, fejoignirent aux Anglois, & le 4. de Décembre ils firent voiles en Perfe.

Le 1.d'Avril 16 26. je fus inftamment prié par le Gouverneur & par le Confeil, de me rengager encore au fervice de la Compagnie, à quoi je confentis. Le 4. de Novembre, le nouveau Gouverneur de Suratte, nommé Mier Mouffa, me fit prefent, à fon avénement, d'un cheval, de dix-huit Maures d'or (qui font une monnoie) & d'un manteau de drap d'or doublé de velours.

Le 6. de Décembre nous aprêmes que le Grand Mogol étoit mort. Cette nouvelle mit tout le pars dans une fi grande confufion, que le Gouverneur nous envoia fix de fes foldats, & un petit baril de pou