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Il y croît du poivre, quoi-que ce ne foit pas en abondance. Les Gufurattes y font un grand trafic, y portant des toiles peintes & d'autres toiles de coton, qu'on tranfporte enfuite aux Moluques & ailleurs. Il y a des arbres dont on nomme les uns Arbres Triftes de jour, & les autres Arbres Triftes de Nuit. Les uns fleuriffent de jour, & les autres ne fleuriffent que de nuit ; les uns & les autres produifent des fleurs d'une admirable odeur.

Le foir du même jour 10. de Novembre 16 8. toute la flote fe rendit à la rade d'Achin, où elle rencontra huit Jonques de Gufuratte. Le 11. le yacht le Griffon, qui avoit été fept jours à paffer le détroi: de Malacca, rejoignit la flote, qui re mit à la voile pendant le premier quart, & ancra le 23. après-midi à la rade de Malacca.

Il y avoit une carraque tout proche de terre. Les Portugais voiant que nos chaloupes alloient l'attaquer, y mirent le feu; mais comme il ne prit pas, nos gens eurent le tems de s'en emparer. C'étoit un vieux bâtiment ufé, où il n'y avoit rien qu'une petite partie de ris qui n'étoit pas net : & des noix de cocos. On le brûla entiérement. Nous y euffions trouvé beaucoup de vaiffeaux,fi l'on n'eût pas été aver

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ti de nôtre venuë, par une fufte qui nous avoit découverts en mer..

Le 24. il fut arrêté qu'on iroit monter les chaloupes dans une Ifle qui a une demilieuë de tour, à l'Ouëft-quart-de-Sudouëft de Malacca, qu'on nomme l'Ile de Pedras. Le lieu parut fort commode pour cette manœuvre, parce qu'il y avoit de bonne cau pour les ouvriers. Chaque vaif>feau fournit un certain nombre de foldats, fous le commandement du Capitaine Hubert Scheurmans, pour mettre en fûreté ceux qui devoient y travailler.

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Le même jour Pierre Gerritfz, Maître du vaiffeau Amfterdam, fut envoié avec deux chaloupes au Commis Hollandois qui étoit de Johor, dans la Ville de Batufabar, ou Batufauwer, pour donner avis au Roi de nôtre venue, & lui offrir d'acomplir le Traité qu'il avoit fait avec l'Amiral Corneille Matelief, pour afficger par mer la Ville de Malacca, pendant que le Roi l'affiégéroit par terre. On le prioit donc de fatisfaire auffi de fa part à fon engagement, & le Commis avoit ordre de l'en folliciter, & de demander du ris & de l'arack pour la flote.

Le 25. l'Amiral & tous les gens de fon Confeil étant allez dans l'Ifle où l'on montoit les chaloupes, il y vint une fré

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gate avec près de 40. perfonnes, hommes, femmes & enfans, originaires de Pégu, qui fuplioient qu'on les tirât de deffous la tiranie des Portugais. Il leur fut permis d'entrer dans l'Ifle, & de s'y retirer.

Ils raportérent que les Portugais travailloient de toutes leurs forces à fortifier Malacca ; qu'une partie de la Nobleffe & des femmes quittoient la Ville, qu'il n'y avoit que 400. foldats & les Cafados. Deux heures après Soleil couché on tira trois coups de canon du Fort, on fit grand feu de moufqueterie, & l'on entendit battre les tambours.

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Le 26. du même mois de Novembre le Zélande eût ordre d'aller fe poster à l'Ouest, & de croifer à l'entrée du détroit, fur un vaiffeau chargé de toile, que les Portugais atendoient de S. Thomas.

Le 27. à la pointe du jour, 4. frégates, deux fuftes, & quelques autres bâtimens, jufqu'au nombre de 36. s'avancérent vers I'Me où l'on travailloit. Le Lion Rouge qui étoit de garde, les aiant découverts, tira un coup d'avis mais ceux qui étoient dans l'Ile n'y aiant pas fait atention, les Portugais mirent fans peine leur monde à terre, & furprisent les fentinelles qui ne fe tenoient pas fur leurs gardes. Il fut tué quelques-uns de nos gens : les autres s'enfuirent vers le bord de la mer, & les ennemis s'ar rêtérent à piller.

Pendant ce tems-là, les nôtres, nonobftant leur petit nombre, aiant repris courage, retournérent à la charge, tuérent 23. hommes, en blefférent plufieurs, chafférent le refte, & firent trois Capitain's prifonniers. Nous perdîmes le Capitaine Scheurmans, fon Sergeant, trois foldats, trois autres furent bleffez, & trois faits prifonniers. Il fut réfolu que pour prévenir un pareil accident, tous les foldats feroient envoiez dans l'Ifle.

Le 28. fur le midi, 3. Salettes qui font de petites câpres du Roi de Johor, vinrent à bord de l'Amiral, & lui dirent qu'ils croifoient fur les côtes de Malacca qu'il y avoit 15. jours qu'ils étoient partis de Johor: qu'il n'y avoit alors aucun vaiffeau Hollandois, & qu'on ne difoit point qu'il y en dût venir : qu'ils avoient rencontré les deux chaloupes fur leur route. On écrivit alors une nouvelle lettre au Commis de Johor, & on l'envoia par un de ces câpres.

Le 1. de Décembre 1608. un François. natif de la Rochelle, qui étoit avec les Portugais, deferta, & fit raport à l'Amiral de l'état où étoit la Ville, favoir qu'il y avoit 35. piéces de gros canon, & qu'elle étoit bien pourvue de poudre, de plomb & de

vivres.

Le 3. on amena fous le pavillon une jon

que de Java, chargée de ris, de poules, de poivre, d'arack & de poiffon fec, qui avoit été prise en mer par le Lion Rouge; & comme elle fe difoit être de nos amis, & qu'elle alloit à Johor, on prit fa cargaifon, & on paia ce qui y étoit à un prix dont les Javanois furent contens. Le 5. on en ufa de même avec une autre jonque.

Le 7. le Sous-commis du Zélande, qui croifoit vers le cap Rachado, vint raporter que le matin du jour précédent, qui étoit. le 6. ce vaiffeau avoit chaffé fur un autre d'environ 80. tonneaux, dont la chaloupe s'étant aprochée, l'ennemi avoit fait un fi grand feu fur elle, qu'après avoit fait perte d'un homme, elle avoit été obligée de fe retirer, pour fe raccommoder, & prendre plus de gens qu'étant retournée à l'ataque, & le vaiffeau s'étant vû preffé, ceux qui le navigeoient y avoient mis le feu fur le foir, & s'étoient fauvez dans leur canot, à force de rames : que cependant le vaif feau avoit brûlé tout entier.

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Le même jour, les deux chaloupes.qui avoient été envoiées à Johor,en revinrent, & raportérent qu'elles avoient donné la chaffe à deux bâtimens, qui aiant jetté à la mer une balle de ris & une de clou de gérofle, elles les avoient pêchées, & les avoient aportées. Auffi-tôt on commanda deux navires & deux yachts, pour allen

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