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Ce qu'on y trouve en abondance font des chevres, dont le Gouverneur fait tuër plus de 5000. par an pour en avoir les peaux. Il y a peut-être 30. familles qui y vivent miférablement. Il y a aufli des bœufs fauvages, des vaches, des taureaux, des ânes, des pourceaux, des. coqs de bruïére, des faifans, des oies fauvages, Mais tout eft fi faroûche qu'on a beaucoup de peine à en découvrir & à en tuër.

Il y a des marais falans dans lefquels Peau entre, & où même elle fourd, & la: chaleur la faifant coaguler, il s'en forme de bon fel, qui y eft en abondance. Ceux qui relâchent à cette Ifle pour s'en pou voir, doivent prendre les habitans par la douceur; finon ils s'enfuient dans les montagnes, & y emménent leurs troupeaux de chevres, ainfi qu'il eft arrivé en cette occafion.

Car le Zélande y aiant relâché le premier, & aiant mis des gens à terre pendant la nuit tout le monde s'enfuit hormis un un vieillard, que le Commis Obelaer traita fort honnêtement, lui faifant même des prefens en le renvoiant, pour l'obliger de dire aux autres que s'ils vouloient amener des rafraîchiffemens, on les leur paieroit bien. Cependant il ne revint point, & l'on pe vit plus perfonne.

L'Amiral & Jaques le Févre defcendi rent à terre, acompagnez chacun de 25. moufquetaires, avec quelques piquiers, & chaque troupe prit un chemin particulier. Ils pafférent la nuit dans l'Ifle, & les habitans aiant vu qu'ils n'y avoient fait aucun defordre, envoiérent dire à l'Amiral qu'ils lui meneroient des chévres, fi fes gens ne commettoient aucune violence, & ne touchoient point au foin dont ces bêtes devoient vivre.

Le 14. ils livrérent 9o. chévres, qui furent diftribuées fur les vaiffeaux, & on les païa en fromages, & en d'autres marchandifes qu'ils defirérent. Cependant on avoit fait débarquer les foldats & quelques Matelots, qu'on logea dans une petite Eglife, & à qui l'on fit faire tous les jours des exercices militaires. On prit auffi beaucoup de poiffons, comme une efpéce de mulets, des brémes, des dorades, des tortues, & d'autres auffi gros que de petites moruës, & d'un goût excellent. Pour des oranges & des limons il n'y en avoit point.

Au côté oriental de l'Ifle coule un ruiffeau, qui eft une aiguade bonne & commode, quoi qu'elle foit à trois lieues dans les terres. Le vent d'Eft-nord-eft foufle continuellement dans les parages voifins, & il n'y pleut qu'aux mois Septembre,

Octobre & Novembre. Mais la pluïe y tombe alors avec tant de force, qu'elle fait rouler de gros morceaux de roches & des arbres des montagnes.

Un foldat du Hoarn avoit été condamné à la grande cale, par-deffous la quille du vaisseau, & à être déferté dans la premiére Ifle, pour avoir tué un Sergent, fa Sentence fut mife à éxécution, & il fut laiffé dans P'Ifle du Mai. Les autres Ifies du Cap Verd où l'on pourroit fe rafraîchir, étant défenduës par des Forts que les Portugais y ont conftruits, on ne peut pas y relâcher fûrement.

Ainfi Jean de Molre premier Commis du vaiffeau Amiral, & Jaques le Févre, Fifcal de la flote, qui ont écrit cette prefente Relation, donnent avis aux Sieurs Directeurs de la Compagnie, qu'il vaudroit mieux ordonner aux vaiffeaux d'aller fe rafraîchir dans les Ports du continent du Cap Verd, où il y a bon moüllage, & où l'on trouve quantité d'oranges & de limons.

De plus, il faut confidérer que fi les Hollandois continuent à marquer l'Ifle du Mai pour rendez-vous, le Roi d'Espague pourra y envoier fes galions, pour atendre les flotes, qui n'entrent ordinairement dans le Port que vaiffeau à vaiffeau ; & il leur feroit facile de les détruire. Au lieu qu'on

pourroit tour-à-tour leur marquer differens Ports au continent, pour fe mettre à couvert de furprise, d'autant plus qu'on ne s'éloigneroit prefque pas de la route qui conduit fous la Ligne, puifque les vents alifez d'Eft-nord eft y fouflent auffi.

Enfin chacun s'ocupa, dans le Port de I'lfle du Mai, à fe racommoder & à faire de l'eau, & comme ce fut-là que toute la flote fe trouva raffemblée, cette circonftance fournit ici l'ocafion de fpécifier tous les vaiffeaux dont elle étoit compo fée, & d'en parler en détail.

1. L'Amiral, qui étoit du Port de 800. tonneaux, fe nommoit Les Provinces-Unies, & étoit monté par l'Amiral Verhoeven. Jean de Molre en étoit le premier Commis, & Frans Jacobfz d'Edam le Capitaine, ou le Maître. Il portoit deux piéces de canon de 24. livres de baile; quatre piéces de 18. livres de balle; deux pierriers de fonte de 13. livres de baile; 18. piéces de petit canon & deux de rechange, 10. autres pierriers avec les munitions de Guerre néceffaires, & des vivres pour 160. hommes, pendant trois ans.

2. Hollande, du port de 1000. tonneaux, dont le Commis fe nommoit Jaques de Bitter de Harlem, & le Maître Simon Janfz Hoen, ou Houn. Il portoit

fix canons de demi-calibre, & 2 2. petits, avec deux autres de rechange; 10. pier riers, &c. & des vivres pour 230. hommes, auffi pendant trois ans.

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3. Amfterdam, du Port de 600. ton→ neaux, dont le Commis fe nommoit Pierre Hertfingh, & le Maître Pierre Gerritsz d'Amfterdam. Il portoit 22. canons, pierriers, & des vivres pour 140. hommes. pour140. 4. Le Lian Rouge avec les fleches, du port de 460. tonneaux, dont le Commis fe nommoit Gilles le Fieft d'Anvers, & le Maître Jean Wallifchfz d'Edam. Il portoit 18. canons & huit pierriers, avec des vivres pour 120. hommes.

5. Le yacht le Paon, de 2 2. tonneaux, dont le Commis fe nommoit Pierre Segerfz d'Utrecht, & le Maître Meus Gysbertfz d'Amfterdam. Il portoit 18. canons & fix pierriers, avec des vivres pour 7.0. hommes:

6. Le yacht l'Aigle, de la même capaci té & de la même monture que le Paon, & également pourvû de toutes fortes de munitions. Le Commis fe nommoit Jean Heffelfz de Steenwyk, & le Maître Rutgert Thomafz d'Amfterdam..

7. Middelbourg, du port de rooo.tonneaux, monté par le Vice-amiral FrançoisWittert. Le Commis fe nommoit Jaques Bouvaert, & le Maître Corneille Leenertfa

A. S

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