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habitez: toutesfois leur malice les oppoferoit à ceux qui ont fait tomber les murailles de la Rochelle, & vôtre memoire pourroit être accusée des fautes d'autrui. Nous ne voulons point parler des malheurs que pourroient attirer les cris des pauvres, def quels on prendroit le bien, parce que nous croions affurement que devant que nos prieres arrivent jufques à vôtre Eminence, le mal fera détourné, & qu'elle aura fauvé l'heritage du Fils de Dieu, des mains de ceux qui defirent de s'en engraiffer plutôt qu'ils ne fongent à fecourir le Roi dans fes neceffitez. Il nous ouvrira fon cœur fi vous nous daignez ouvrir fon oreille, & nous ne doutons point que vous ne foïez nôtre protecteur auprés de fa Majesté en toutes les rencontres. Cependant vôtre Eminence nous pardonnera, s'il lui plaît, la liberté que nous avons prife de lui adreffer nos plaintes, & de recourir à elle comme à nôtre feul azile,& nous fera l'honneur de croire que nous ferons toûjours.

LETTRE XL.

A Madame la Princeffe. Confolation fur la maladie de Monfeigneur le Duc fon fils.

MADAME,

Vous avez bien raison de croire que j'ai

fenti vôtre douleur apprenant la maladie extrême de Monfeigneur le Duc ; car outre les obligations infinies que j'ai à vôtre bonté, j'ai une fi particuliere tendreffe pour tout ce qui vous regarde, qu'un moindre fujet que celui-là me donneroit beaucoup d'affiction: Dieu eft le premier Pere, Madame, & il faut tenir de lui fes enfans, fi on les veut conferver; il eft justement indigné contre ceux qui s'appuient plus fur leur vie ou fur leur grandeur, que fur fa Providence; & d'ordinaire rien ne l'oblige plutôt de les retirer à foi, que quand on en fait ou fes idoles ou fon appui principal. S'il les laiffe au monde il trompe les efperances que l'on a conçues d'une façon plus cruelle, permettant qu'ils fourniffent autant de fu jets de douleur, par leur mauvaife. conduite, que l'on s'en étoit promis dé fatisfaction. Il feroit donc à fouhaitter que toutes les meres chrétiennes, & principalement les Princeffes, euffent un peu de la fidelité & du courage d'Abraham qui facrifie fon fils, avec autant de joïe qu'il en avoit fenti en le voïant naître contre fon attente; Dieu non feulement leur rendroit leurs fils, mais il les combleroit de fes benedictions, & ils feroient la couronne de leur vieilleffe. Je crois que voïant le vôtre en cette extremité, la grace plus forte que la nature, vous a fait adorer la main de fon maître prête à

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l'immoler; & croïez auffi que c'eft cette offrande qui vous l'a redonné : elle a été beaucoup plus fainte que mes prieres particulieres je vous les dois & vous avez raifon de les exiger de moi; mais je vous affure, Madame, que de bon cœur je m'acquitte de cette dette, & que je fuis avec une inviolable fidelité & une ardente paffion.

Le 3. Mai 1641.

LETTRE XLI.

A Mademoiffelle de Bourbon. Reflexions fur l'état des Princes & des Grands.

M

ADEMOISELLE,

Je ferois indigne de l'honneur qu'il vous plaît de me faire dans la Lettre de Madame vôtre mere, fi je ne vous en rendois particulierement de tres - humbles actions de graces. Cette bonté ne m'étonne point,car j'en ai déja reçû mille preuves, & j'efpere bien que celle-ci ne fera la derniere. Il y a de la gloire à vous devoir ce que l'on ne Vous peut païer. Comme j'ai fenti vôtre douleur durant la maladie de Monseigneur le Duc, je fens vôtre joïe maintenant que j'apprens qu'il fe porté bien. Vous voïez

pas

que

la fiévrè allume auffi bien le fang Roïal que celui d'un pauvre, & qu'en un moment i ne refte aux Princes que les marques de l'infirmité de la nature, & de la peine du peché. Du lit des nôces on va au tombeau, & en un inftant toutes les pensées de la prudence fe diffipent en fumée. Il n'y a rien de grand que Dieu, & à proportion que l'on eft attaché à lui, à proportion on a de la grandeur; celle qui a un autre fondement ne peut durer tout au plus plus que la vie. Et de quelle durée eft la plus longue, en comparaifon de l'éternité? Quel avantage d'avoir une érudition éminente, & d'être fujet aux plus honteufes forbleffes des efclaves? Quelle douceur en la Puiffance qui ne fert qu'à tourmenter les autres, ou qui ne leur fait point de bien? Quelle fatisfaction dans, l'honneur exterieur que l'on reçoit forfqu'il n'eft pas accompagné d'une véritable eftime? Enfin, Mademoifelle, pour ne vous pas faire un grand fermon aprés le Carême, je vous confeille puifque vous êtes née fi grande en la terre, de fonger à vous faire fainte dans le Ciel, & de repondre fidelement à la grace extraordinaire que nôtre Seigneur a répandue dans vôtre ame. Il eft bon, mais il eft jaloux', & il vaudroit mieux n'avoir jamais goûté fon efprit, que de s'en dégoûter, & le laiffer peu à peu éteindre. Les rofes ont des

épines

épines qui deffendent leur beauté, mais les Princeffes font au milieu des-rofes,qui ne les garantiffent pas des tentations que les plaiGrs du monde leur infpirent. Tout ce qui les aborde, les flâte, & tout ce qui les fläte, les perd peu à peu ; elles fe trouvent dépouillées de cette belle robe de devotion & fans y prendre garde,elles fe trouvent révêtues des habits du monde. On remet à une autre heure, une pratique de vertu, aprés on paffe un jour fans y fonger, enfuite on la neglige, & enfin on la meprife; mais on s'en repent, & c'eft bien fouvent lorfque le tems de la pénitence eft paffe. Or cela ne vous arrivera pas s'il plaît à celui qui vous a prevenue dés vôtre enfance. Je vous offre fouvent à lui, & fais avec une paffion extrême, A Graffe ce 3. Mai 1641.

LETTRE XLII.

A Monfieur de Noyers Secretaire d'Eftat, fur la falfie des biens de fon Eglife.

MONSIEUR,

Dans l'étonnement où nous met la faifie de tous les revenus des Menfes Epifcopales & Capitulaires en cette Province, nous avons ciû qu'aprés le fecours du Ciel, nous

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