Imágenes de páginas
PDF
EPUB

roient d'un profond repos d'efprit, & trouveroient tous les fiécies heureux, & toutes fortes de gouvernemens raisonnables. On ne feroit point une cabale de la pieté; on éviteroit mille fcandales, qui deshonorent la Religion. Je voudrois que ce faint abandonnement s'étendit auffi jufques aux chofes où nous penfons qu'il s'aC git de la gloire de Dieu, jufqu'à nos amitiez que nous eftimons faintes; car c'est en cela qu'il fe commet beaucoup de fautes: Les affections qui font purement naturelles, civiles ou fenfuelles, font fufpectes d'abord; mais celles qui ont la devotion, l'avancement fpirituel, ou quelqu'autre bien pour prétexte, font plus mal aifées à épurer. Nôtre paffion s'y mêle; on s'engage dans le piége fans y penfer; nôtre fimplicité fe laiffe facilement furprendre, quelquefois nous allons jufqu'à l'injuftice, & nous fongeons autant à deffendre, ou nôtre premier choix ou l'ouvrage de nos mains, que le plus raifonnable parti. Enfin, la grande régle de l'Apôtre, nous fait nôtre leçon, & elle ne veut point que nous foïons ni à Paul ni à Cephas, mais à J. C. O quel avantage de n'être qu'au tres-bon Jefus ; de ne connoître que Jefus que Jefus en la terre, & de n'aimer les chofes qu'à proportion qu'elles font en lui, & qu'il eft en elles. Demandez-lui qu'il me faffe cette grace,

& croïez

s'il vous plaît, que je me fouviens trés-fouvent à l'Autel, de tous vos befoins; Dieu les connoit, & je le conjure qu'il y furvienne par celui auquel il ne peut rien refufer. C'eft en lui que je fuis, &c.

Du 3. Decembre 1637.

LETTRE VI.

A Mademoiselle de Bourbon, fur le mépris de la grandeur.

MADEMOISELLE,

Je fuis bien glorieux d'apprendre que celle qui eft dans le cœur de tout le monde, craigne de n'être pas dans ma memoire. Quand elle feroit un temple, vous y pourriez avoir place; jugez donc fi je n'ai pas interêt de vous y conferver, afin que vous la rendiez précieufe, de pauvre & d'infidelle qu'elle eft naturellement. C'eft principalement à l'Autel, Mademoiselle que vous m'êtes préfente, parce que c'eft .là que mon fouvenir peut m'acquitter des obligations que j'ai à vôtre bonté. Je demande bien à Dieu qu'il ajoûte d'autres lys à ceux de votre Couronne; mais je lui demande auffi qu'il y mêle l'amour des épines de fon Fils, & qu'il vous affermisse

dans ces genereufes maximes du mépris de la grandeur où je vous ai vûë. Nôtre Seigneur ne hait pas les Princes & les Princeffes; mais il ne les aime pas fort tendrement. Ses careffes font pour les pauvres, & parmi cette foule de Saints que l'Eglife honore, le nombre des Rois & des Reines eft bien petit. En effet, les Chrêtiens font oints dans le Baptême pour être Rois, mais ils ne commencent l'exercice de leur Roïauté qu'aprés la mort; & tout ce qui a de la pompe & de la fplendeur, a de la malignité, & quelque chofe de contraire à la fainteté; mais la grace eft capable de porter les fardeaux les plus pefans, & je ne doute point que vous ne la demandicz fouvent à Dieu : il me femble qu'il veut faire quelque chofe de fort extraordinaire dans votre ame. Tâchez, s'il vous plaît, qu'il la trouve comme une cire capable de recevoir toutes les impreffions, & ne lui faites pas retirer la main qu'il avance pour vous attacher; & en vous attachant, vous mettre fur la tête une couronne incomparablement plus riche que celle que vous portez. Elle merite bien que vôtre cœur fe donne tout entier à lui pour la poffeder, & je vous affeure que vous recevrez beau

[ocr errors]

נע מזוח

[ocr errors]

coup plus you roue 11 aurez aonné. Pour un

,

Roi, quelque grand qu'il fût ce feroit beaucoup; mais pour le Roi des Rois, per

mettez-moi de vous dire, que ce n'eft rien; qu'il vous fera le grace en recevant, & qu'il faut qu'auparavant il le rende digne de lui: C'eft ce que je demande pour vous à fa bonté, & il me femble que je ne puis mieux vous témoigner que je fuis veritablement, &c.

Du 18. Decembre 1637.

LETTRE VII.

A Monfieur Bouchard; remerciement d'un Eloge Latin. Projets des Poëmes de Clovis de la Pucelle Lonez.

MONSIE

ONSIEUR,

J'ai reçû le cinq de ce mois la Lettre du quatre Septembre, dont il vous a plû de m'obliger, avec l'Eloge latin, par la voïe de M. Gaffendi: Il faudroit que je me serviffe de toutes vos paroles pour vous en rendre d'aum beiies, & d'auffi puiffantes que celles que vous m'avez écrites. Vôtre générofité ne s'eft pas contentée d'un préfent; elle m'en a fait deux à la fois, fi riches, fi précieux, que l'on voit bien que vous êtes à la fource de l'éloquence. Pour

mai

1. D..

que la providence a connne parmi des

rochers, & qui fuis feparé de Rome, & de Paris par tant de mers & de montagnes ;

il ne faut pas que vous vous étonniez, fi je vous réponds fans ornemens & fans graces. C'eft beaucoup que mon ftile ne fe fente pas encore de la barbarie, dont je fuis voifin; & qu'ayant commencé une periode en françois, je ne la finiffe pas en provençal. Il eft vrai que la Provence eft le berceau de nos Muses; mais auffi n'y ont-elles rien fair que begaïer ila fallu qu'elles aïent paffé la Durance & le Rhône, pour apprendre à parler, & qu'elles aïent établi leur demeure fur les rivages de la Seine: là, non-feulement elles ont trouvé des perfonnes qui les ont vétuës, mais auffi qui les ont parées, qui leur ont appris l'ufage de leurs beautez, qui leur ont fait reconnoître leurs forces, & qui les ont introduites dans le cabinet. Tous les jours elles s'enrichiffent, & fi on leur donne quelques chaînes, ce font des chaînes de perles & de diamans: elles ne fe contentent plus du chalumeau ou de la lyre; elles prennent la trompette, & ont envie de donner une Pucelle au Heros du Taffe, qui ne fera point indigne de fa valeur; elles veulent même remonter plus haut dans nôtre Hiftoire & témoigner dans un Clovis baptifé, qu'un de mes amis entreprend, qu'elles font capables de fournir plus d'une longue carriere, Pour moi je revere ces grands deffeins, & je me cohtente de les confulter quelquefois au bord

,

« AnteriorContinuar »