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cru qu'il avoit plus de befoin de prieres que de louanges. J'ai été foigneux de le secourir par celles-là, & je prie Dieu qu'elles lui foient utiles. Je fuis..

LETTRE XCVIII.

Au même. Réflexions fur la vie & fur la mort de Monfieur de Marca Archevêque de Toulouse.

MONSIEUR,

ge

:

Il eft vrai que ce n'eft pas une chofe étrande voir mourir un homme de foixante & dix-ans; la carriere eft affez longue, & peu de perfonnes y arrivent avec autant de fanté que Monfieur l'Archevêque de Touloafe mais la conjoncture où elle a fini eft ce me femble affez remarquable, pour ne la laiffer pas paffer fans y faire reflexion. C'étoit un homme affurement d'un grand & rare merite. Il avoit une parfaite connoiffance de la fcience Ecclefiaftique, une memoire prodigieufe, un jugement folide, un efprit net, & un débit facile ; qualitez qui ne fe trouvent gueres enfemble. Il avoit encore de la bonté & de la douceur, & une certaine habileté dans les affaires pour trouver des expediens à toutes chofes, Ses mœurs ont été innocentes & dans la Ma

giftrature & dans la Prélature: mais fi vous voulez que je vous dise mon fentiment avec liberté, il étoit plus propre pour celle-là que pour celle-ci. Ce n'eft pas qu'il n'eût une connoiffance exquife des Conciles & de l'Hiftoire Ecclefiaftique; mais il a paru par fa conduite, qu'il n'avoit ni ce zele, ni cette fermeté pour foûtenir les interêts de l'Eglife contre les Puiffances féculieres, qui font les qualitez les plus neceffaires d'un veritable Evêque. Nous en avons vû un exemple bien remarquable en fa conduite dans l'affaire de Monfieur le Cardinal de *** je ne veux pas l'accufer d'avoir fongé dés nôtre Affemblée de 1655. à monter fur fa Chaire; mais fi l'interêt propre ne le fit pas agir comme il agît, on ne le peur excufer d'avoir eu trop de complaifance pour le Miniftre. Ce fut lui qui fe rendit chef du parti contre l'exilé, il donna tous les biais pour faire prendre la conclufion que l'on prit il fut & le Promoteur & le Solliciteur de cette délibera

tion fi peu honorable pour le Clergé de France, que je ne puis m'empêcher d'en rougir toutes les fois que j'y penfe. Dieu me fit la grace de n'y avoir point de part: je ne marchandai pas entre les offres qui me furent faites, quoi qu'affez grandes, & mon devoir. Je m'en attirai la difgrace du Miniftre, mais je crus que je devois préferer l'honneur de mon Ordre à ma forrune,

Un grand emploi dans la Cour & dix mille livres de rente davantage ne valoient il pas à mon avis que je les achetaffe à ce prix. Ceux qui opinoient conformément aux fentimens qu'on lear infpiroit, eurent honte de leur avis;ils l'avoient appris par cœur,& ils le recitoient comme un rôlet de Comedien. La calamité d'un Confrére de ce rang ne les toucha point. Leur propre peril, par cet exemple, ne fut pas capable de les porter à lui donner le miferable fecours de leurs offices enfin on n'a jamais vû affaire plus férieufe, moins ferieufement & moins humainement traitée. J'ai toûjours diftingué la These generale de la particuliere, & fans vouloir juftifier celui que l'on puniffoit avant qu'il fût accusé, ce que je ne croïois pas que l'on pût faire, je foûtiens que nôtre devoir & nôtre interêt nous obligeoit à ne l'abandonner pas de cette façon. Depuis ce tems-là on a vû par les effets de la deli, beration, qui paffa, qu'en effet elle étoit une pure illufion. Mais ne peut-on pas dire que la nomination de Monfieur l'Archevêque de Touloufe à l'Archevêché de Paris eft celle d'un fonge. Il a été felicité. Il a eu fes Bulles., Il s'eft vû tout prêt de monter fur cette grande Chaire, & la mort l'a empêché de faire le pas qui reftoit: elle a renversé tous fes deffeins: elle a trompé toutes les efperances de fes parens : elle a

étonné tous fes amis. Si durant dix ans il avoit travaillé à en venir là, confeffons que la Providence s'eft bien mocquée de fon travail, & qu'elle nous donne un grand exemple de la vanité des projets des hommes. Croïez-moi, le vrai chemin de l'Epif copat n'eft pas celui que la plupart tiennent en ce fiécle: Si ce n'étoit qu'une dignité temporelle, on pourroit y tendre par la brigue, la faveur, la complaifance, & la lâcheté ; mais fi c'eft une dignité fpirituelle & une continuation du Sacerdoce de JefusChrist, comme fans doute il n'eft autre chofe, je ne vois pas comment il est permis d'y arriver comme d'ordinaire on y arrive. Eft-ce qu'il y a un autre Evangile, & d'autres Canons que les anciens mais je ne les ay pas encore vûs, & jufques à tant que je fois affuré que Dicu a changé l'ordre qu'il avoit établi, je m'arrêterai aux regles de mes peres. Mais s'il n'eft pas permis de fe procurer à foi-même un Siége vuide, fi celui qui demande un Evêché vacant eft déja jugé, Comme dit faint Bernard, com. ment fera-t-il permis d'envahir la Chaire de fon Confrére, & de fe fervir de fa science pour venir à bout de cette invafion. Tremblons, mon cher Monfieur, fous les jugemens de Dieu, qui laiffe agir les hoinmes de cette forte, & qui permet qu'ils reüffiffent; mais tâchons à nous conduire de

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telle forte qu'il ne nous abandonne pas à nos convoitifes dereglées, mais qu'il daigne nous honorer: par fon efprit. Je fuis.

LETTRE XCIX.

A la Réverende Mere Agnès Religienfe Car-
melite. Efprit de fainte Therese, preferable
à toute la Philofophie."

MA

A TRES-CHERE FILLE,

Je prie le faint Enfant de vous donner part en l'efprit de fa fainte Enfance. C'est le plus grand bien que je vous puis fouhaitter, & celui feul affurement que vous fouhaittez. En effet c'eft l'unique tréfor d'une ame veritablement chrétienne & d'une fille de fainte Therefe. Tout l'efprit de la Philofophic & de la Théologie ne le vaut pas, & qui le poffederoit n'auroit plus rien à poffeder fur la terre. Jefus Enfant paroît ignorant, mais fon ignorance eft la fcience de fon Pe-re, & la doctrine des Anges & des hommes; elle confond la fageffe des hommes, & fait voir qu'elle eft une veritable folie. Croïez, s'il vous plaît, que je ne vous ai pas oubliée devant Dieu : j'efpere la même chofe de vôtre charité. Les filles de fainte Therese font les filles de l'Eglife qui doivent continuellement prier pour leur Mere

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