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LETTRE CXXXVIII. A Madame de Longueville; fur la paix de l'Eglife de France en 1668. De la morale Chrétienne, & des Faftes de l'Eglife compofez par l'Auteur.

MADAME,

Recevoir des congratulations de la paix que Dieu vient de rendre à fon Eglise, & les recevoir de la part de Madame la Ducheffe de Longueville, c'est ajoûter l'allegreffe à la joïe, & le triomphe à la victoire. Ileft vrai que j'y prens une grande part, mais non pas comme en aïant eu à la guerre où je n'ai pas été digne de fervir. En verité cette paix eft un coup de la droite du Trés haut, & un coup qu'elle feule pouvoir faire. Dieu n'a jamais mieux fait paroître qu'il eft le Protecteur de fon Eglife qu'il eft, le Maître des flots qui attaquent fa Nacelle, des vents qui grondent contr'elle & des foudres qui la menacent; que lui feul fçait tirer la lumiere des tenebres, & le calme de la tempête. L'en pouvons nous jamais affez benir, affez remercier, affez glorifier Que tous fes Anges l'en beniffent, que tous les Saints Evêques qui le contemplent dans le Ciel l'en remercient: Et nous autres adorons fa main toute-puiffante qui

a fait en nos jours des choles fi grandes. J'écris, felon votre avis, à Monfieur le Nonce, qui merite fans doute une grande loüange, d'avoir fi genereufement & fi fagement travaillé à cette grande affaire. Vous y avez auffi une grande part, Madame. C'est une benediction pour vous trés- particuliere. J'efpere que Dieu confervera en Candie Monfieur le Comte de S. Paul qui y eft allé expofer fa vie pour fon fervice, & que vôtre Alteffe le reverra chargé de lauriers innocens & glorieux, ce qui ne fe trouve pas roûjours enfemble. J'ai entrepris une morale Chrétienne pour l'inftruction des Prêtres de mon Diocéfe ; * c'est ce qui m'a diverti du travail de l'Hiftoire ; je n'ai refolu que d'en faire encore deux fiécles, car les autres font des fiécles, que je ne puis écrire fans larmes, fans horreur, fans indignation, tant les chofes y font alterées & corrompuës. Les Fastes font achevez, & je les fais mettre au net;mais n'eft-ce point trop écrire, & ne vaudroit-il pas mieux achever ma vie, en filence, & dans la priere? Regnum Dei non eft in fermone : Afpirons, Madame à ce Roïaume, vivons pour ce Roïaume, &n'eftimons rien digne de nôtre amour, que ce Roïaume de paix, de justice, de charité, & de verité, je vous demande pardon de ma negligence à écrire à V. A. qu'elle croïe, Cette morale vient d'être donnée au Public,

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s'il lui plaît, que j'ai toûjours pour elle de la veneration, & que je fuis auffi fortement que jamais.

LETTRE CXXXIX.

A Monfeigneur Bargellini Archevêque de Thebes Nonce en France; fur la paix de l'Eglife de France en 1668.

MONSEIGNEUR,

Le bruit de la paix, que Dieu vient de rendre à fon Eglife de France, eft venu jusqu'à cette extremité du Roiaume, où il a plû à la Providence de me placer; en même tems j'ai appris avec quelle fageffe, quelle force, & quelle fincerité vous avez travaillé à ce grand ouvrage, & que c'est presqu'à vous feul, que l'heureux fuccés en eft dû. Tous ceux, qui aiment l'Eglife, vous en beniffent, j'ai cru que je ne me devois pas taire en cette occafion. Je prens donc la liberté de vous écrire pour vous congratuler de l'heureufe iffuë d'une fi difficile, & fi importante negociation. Vous avez fait dignement l'Office de Nonce Apoftolique, c'eft-à-dire d'un Ange de paix. Vôtre prudence a conduit vôtre zele, vôtre fermeté a foûtenu vos bonnes intentions, & Dieu a beni vos foins par un fuccés, que l'on peut

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appeller un miracle. Il y avoit bien longtems que tous les gens de bien demandoient à Dieu cette paix, mais elle fembloit tous les jours s'éloigner davantage; il ne nous reftoit plus que les larmes, & les gemiffemens dûs à Dieu pour obtenir un bien fi neceffaire, & qui n'avoit plus d'apparence. Enfin il a exaucé nos gemiffemens, il a en tendu la voix de nos larmes ; & lorfque nous lui difions, Maître fecourez-nous, car nous allons périr, il a commandé aux vents & à la mer, & la bonace s'eft faite grande. Si les pieds de ceux qui annoncent la paix font beaux combien font venerables les pieds de ceux qui font la paix, & qui la donnent que de loüanges, Monfeigneur, ne meritez vous pas ? que de benedictions? quelle gloire fera celle de vôtre Nonciature dans l'Hiftoire de l'Eglife, dans les diffenfions paffées avec les Heretiques ? Le Saint Siége a emploié plufieurs grands Cardinaux, illuftres par leur efprit, leur éloquence, & leur doctrine, mais peu ont réiiffi à donner la paix ; celle que vous avez faite étoit plus difficile entre les domeftiques de la foi, qu'avec des ennemis declarez, qui pen foient que leur guerre fût fainte: il a donc fallu une haute fageffe, une prudence confommée, une habileté extraordinaire pour achever heureusement une affaire fi fâcheufe. Maintenant l'Eglife de France jouira par

?

vous des fruits de cette heureufe paix. L'aux torité du Siége Apoftolique fera refpectée de tous, & nous loüerons tous le Dieu de verité d'un même cœur, & d'une même bouche. Je ne cefferois jamais de parler, fi je voulois fuivre le tranfport de ma joïe. Mais cette Lettre eft deja affez longue, il eft tems de la finir, & de vous affurer qu'entre tous les Prélats de France, il n'y en a pas un qui foit plus veritablement, & plus paffionnement.

Ce 10. Mars 1669.

LETTRE CL.

A Madame du Plessis de Guenegaud. Con folation fur la mort de fon fils.

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J'ai apris par la Gazette, la mauvaise nouvelle de la mort de Monfieur vôtre fils. Elle m'a fenfiblement touché pour l'amour de vous, dont je connois la tendreffe pour un fils, fi digne d'être aimé ; mais je me fuis confolé, connoiffant vôtre pieté, qui vous rend foumife à la volonté de Dieu, que vous fervez, & que vous aimez. Les peres & les meres dans le Chriftianifme gendrent pas des enfans pour le monde ;

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