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&

tôt que

ceux que Dieu en retire; congratulons - les de leur delivrance au lieu de les regreter, rejoiiiffons-nous de les fçavoir en feureté. Si j'avois eu affez de force, j'aurois pris la pofte pour aller mêler mes larmes, avec les vôtres, plûtôt que pour vous confoler. Il faut que Dieu parle à vôtre cœur, plu les hommes qui ne vous peuvent gueres dire de chofes, que vous ne puiffiez vous dire à vous-même. Aujourd'hui j'ai prié au faint Autel pour le repos de l'ame de cette chere fille, & c'eft tout ce qu'elle demande de moi. J'efpere qu'il lui aura fait mifericorde, & je lui demande pour vous la grace de lui faire un bon facrifice de celle qu'il vous a prife, Je fuis.

LETTRE

CXLIII,

A Monfieur le Comte de Grignan Lieutenant General, & Commandant pour le Roi en Provence; fur le même fujet.

MONSIEUR,

J'ai apris, que vous vous êtes retiré aux Chartreux pour vous confoler avec Dieu dans cette fainte folitude, de la perte que vous venez de faire. C'eft en ufer comme un mari veritablement Chrétien, & m'ôter la peine de vous rien dire fur un fi doulou

reux fujet. Toutes les raisons que d'ordinaire on apporte en ces occafions, n'ont gueres de force pour apaifer la douleur d'un cœur veritablement affligé ; fi elles font dites avec eloquence, elles peuvent bien di vertir l'affliction pour quelque tems; fi elles font folides & tirées de l'Ecriture fainte elles doivent convaincre l'efprit par leur verité mais fi l'efprit de Dieu ne les y fait entrer & ne les y fortifie, elles ne le perfuaderont jamais. C'eft donc Dieu, Monfieur, qui doit être vôtre unique Confolateur. C'eft dans la retraite parmi des bienheureux morts au monde, qui font enterrez dans leurs Cellules comme dans des tom beaux , que vous recevrez la force de fouffrir la mort d'une femme, qui par tant de raifons vous étoit fi chere. C'eft-là que dans la feparation de hommes & dans la priere vous lui ferez un facrifice amoureux de la perfonne qu'il vous a prife. C'est-là que vous confidererez que vôtre union étant plutôt pour le Ciel que pour la terre, vous ne devez pas vous affliger que vôtre com pagne vous devance dans le voïage de la patrie, où vous tendiez tous deux, & où, quand vous vous retrouverez vous ferez joints d'un lien qui ne fe pourra plus rompre. Je ferois grand fcrupule de vous détourner davantage dans vôtre retraite. Vous ne doutez pas que je n'aïe fenti vôtre afflic

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tion, & pour l'amour de vous & pour l'a mour de la pauvre deffunte. Je l'ai aujour d'hui offerte au faint Autel, à son Juge, que j'efpere qu'il sera son Sauveur. Je luis de tout mon cœur.

LETTRE CXLIV.

A Monfieur Meyronet Procureur General à la Chambre des Comptes de Provence ; Sur la mort de fon frere.

MONSIEUR,

Je m'intereffe trop dans les biens, & dans les maux qui arrivent à vôtre Famille, pour n'avoir pas été fenfiblement affligé de la mort de Monfieur votre frére. C'eft affu

rement une grande perte, & pour vôtre Maison, & pour la Province, mais à proprement parler, on ne perd pas fes parens, quand ils meurent en bons Chrétiens. Il n'y a que les pecheurs qui periffent, & faint Paul ne veut pas, que les Fidels pleurent leurs morts, comme faifoient les Gentils qui n'ont point d'efperance. La mort de ceux-là n'eft qu'un paffage à l'éternité, ils ne s'en vont pas feulement, ils nous devancent de quelque tems, & ils nous vont atrendre dans la Patrie, où nous ne pouvons plus être feparez. C'eft-là, où l'amitié fraternelle fera parfaite & incapable d'altera

tion

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tion,ou dans la poffeffion d'un même heritage, il y aura une union admirable des cœurs. La vie prefente n'a jamais dû être agreable à un vrai Chrétien, qui la doit porter en patience, & defirer continuellement d'en être delivré comme d'un baniffement. Mais nous fommes en un fiécle, où il me femble, qu'elle n'a nulle apparence de feduction comme parle faint Auguftin, pour se faire aimer Heureux donc font ceux Dien en retire pour les placer dans ce Roïaume, dont le Roi eft la verité, la Loi la Charité, & la durée l'Eternité; ce font les paroles du grand S. Auguftin, avec lesquelles je finis. Je fuis de tout mon cœur.

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A Vence de 9. Mai 1665.

LETTRE CXLV.

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que

A Monfieur Meyronet Greffier des Eftats de Provence; fur la mort de fon fils.

MONSIEUR,

J'ai apris avec beaucoup de douleur la mort de Monfieur vôtre fils, & pour fon merite propre, & pour vôtre confideration. La perte eft fans doute grande, & vous avez raifon d'en être touché. Mais fi vous êtes pere, vous êtes Chrétien & enfant de Dieu,

S

il faut donc que la nature le cede en vous aux fentimens, & aux mouvemens de la Foi. Il faut que le pere charnel fe conforme à la volonté du Pere celefte, & qu'il lui facrifie par un acquiefcement volontaire & amoureux, ce qu'il lui a pû prendre par le droit de fa puiffance fur tous les hommes. Ce facrifice eft douloureux › je l'avouë, mais il en fera plus agreable à celui qui s'eft facrifié parmi les douleurs, & les opprobres de la Croix, lui feul peut, & doit être vôtre Confolateur, & tout ce que les hommes vous pourroient dire de plus beau & de plus fort fur ce fujet, pourroit bien endormir vôtre plaïe, mais non pas la fermer. Pour moi je le prierai au faint Autel de vous donner la grace de bien ufer de cette affliction & de mettre en fon repos l'ame de ce cher fils, que vous pleurez. Je fuis de tout mon cœur.

A Vence ce 9. Mai 1665.

LETTRE CXLVI.

A Madame la Marquise de Ramboüillet. Exhortation à ne point craindre la mort.

MADAN

ADAME,

J'aprens par toutes les Lettres qui me vien

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