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LETTRE CLXV.

Au même ; fur fon retour.

NSE

ONSEIGNEUR,

Je goute par avance la joïe de vôtre retour, & je demande à Dieu un beau tems qui le facilite. Il me femble que ma fanté va reve nir, & que j'aurai des jambes pour me foûtenir aïant en vous un homme qui m'aidera à foûtenir le fardeau de ma charge. Que faint Gregoire, dont nous allons dire l'Office, nous a donné d'admirables enfeignemens pour la bien foûtenir, & qu'il eft un exemple admirable pour ceux qui ont le rang de Pafteurs. J'efpere fa protection, & je la demande pour vous & pour moi. Je fuis tout à vous.

A Vence ce 12. Mars 1672.

LETTRE

CLXVI.

Vive confolation à une perfonne accablée
d'un grand coup.

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Je reffens fi vivement la perte que vous

venez de faire, que je ne fçai ce que je vous dois dire, mais tout ce que je vous pourrois dire ne peut affurement confoler vôtre douleur. Il faut que Dieu ferme cette grande plaïe, ou qu'il l'adouciffe. Il eft la fource de toute la paternité qui eft au Ciel & en la terre, & le Pere primitif de tout les peres. De forte que comme c'eft pour lui que les peres Chrétiens doivent aimer leurs enfans c'eft par lui qu'ils peuvent fupporter leur perte, pour la fupporter chrétiennement.La nature en ces occafions a des mouvemens qui font au deffus de toutes les maximes & de tous les raifonnemens de la Philofophie. Or les confeils qui viennent du dehors font trop foibles pour appaifer le bruit qu'elle fait au dedans; mais la grace de Dieu y re met toutes choses dans l'ordre fans qu'elle faffe connoître ce qu'elle fait. Elle n'attaque

pas

la douleur à force ouverte, mais elle la trompe & la furprend quelquefois : Elle laiffe fentir l'amertume du mal qu'elle gue rit, & ne laiffe pas fentir la douceur de la gúerifon. C'eft la maniere dont elle traite les ames fortes, & qu'elle veut conduire à une haute perfection. Elle brûle fes victimes toutes pléines de vie & les fait survivre à leur facrifice. Laiffez-vous donc conduire par elle & ménagez bien cette grande occafion de témoigner à Dieu vôtre fidelité. 11 veut l'éprouver par ce grand coup de ton

herre. Je voudrois bien être proche de vous maintenant pour pleurer avec vous & vous témoigner comme je fuis veritablement.

LETTRE CLXVII.

AM... Confolation à un Evêque fur la mort de fa mere.

MONSEIGNE

CONSEIGNEUR,

J'ai apris par cet ordinaire la mort de Madame vôtre Mere, & cette nouvelle m'a fenfiblement affligé & pour vous & pour le public. Je fça quelle étoit vôtre tendreffe pour elle, & je n'ai point de peine à m'imaginer quelle eft vôtre douleur en une fi dure feparation; mais je fçai encore mieux quelle eft la fermeté de vôtre efprit & la force de vôtre cœur. Il eft rempli de la grace Epifcopale qui y purifie les fentimens de la nature & les foumet parfaitement à l'ordre de Dieu. Les Chrétiens font obligez de pleurer leurs morts d'une autre façon que les Gentils qui n'ont point d'efperance, & les Prêtres de Jefus-Chrift doivent regretter leurs peres & leurs meres d'une autre façon que le commun des Chrétiens. Car ils font obligez à vivre détachez d'une façon parti

culiere, vous fçavez ces veritez mieux que moi & je ne vous en dois pas dire davantage, ni vous plaindre comme je ferois un autre. C'eft le public, ce font les pauvres qui doivent être plains, aïant perdu leur bonne mere, Certes s'il y avoit un faint Pierre fur la terre, je ne doute point qu'il ne reffufcitât Thabithe; mais elle eft plus heureuse de vivre avec Dieu, qui l'a retirée des miferes de cette vie. Si un verre d'eau n'eft pas donné fans recompenfe aux petits de l'Evangile, quelles recompenfes n'aura point reçû celle qui leur a donné tant de bien. Heureux êtes vous d'être le fils d'une telle mere. Je fuis de tout mon cœur.

FIN.

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