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le bien de l'Eglife, à qui vous êtes fi utile; aimez-moi toûjours, & croïez que je fuis de tout mon cœur, &c.

LETTRE III.

A la Reine de Pologne, fur les révolutions de Pologne.

MADAME,

Il y a fi long-temps que je ne m'étois fervi de la grace que V. M. m'a faite, de me permettre de lui écrire quelquefois, que je n'avois plus la hardieffe de l'entreprendre; mais l'impreffion de mes Poëfies chrétiennes, que l'on vient de faire, eft une occafion qui m'oblige, ce me femble, de me fervir d'un fi glorieux privilége. Le nom de V. M. paroît à la tête de ce volume, comme fa fauve-garde, & fa principale gloire. Dans l'Epitre dédicatoire, je ne faifois que des pronoftics des grandes chofes, qu'elle a depuis executées. Encore que je fois prefque dans un autre monde que V. M. le bruit des grandes révolutions qui font arrivées en Pologne, n'a pas laiffé d'y péné

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1.

tici,
∞ de me faire fentir de la joïe, de la
crainte, & de la trifteffe tout enfemble;
car quand je ne ferois pas attaché autant

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que je le fuis, aux interêts de vôtre Grandeur, & à la feureté de vôtre Roïale perfonne, que fa vertu me rend encore plus précieufe que fon Diadême; il m'étoit impoffible, tenant le rang que je tiens dans l'Eglife, d'apprendre les nouvelles du bou

leversement d'un Etat auffi confiderable dans la Chrétienté, qu'eft celui où vous régnez, fans être agité de tous ces mouvemens. Vôtre Couronne, Madame, me paroît d'autant plus gloricufe, qu'elle a été jufques ici plutôt heriffée d'épines, que brillante de diamants, ou parfemée de fleurs, Je tremble pour tous ceux que la Providence fait affcoir fur les Trônes de la terre, parce que leur condition les éloigne davantage du Roïaume des Cieux, qui n'eft promis qu'aux petits & qu'aux humbles, & que les Puiffances font menacées dans l'Ecriture fainte, d'être tourmentées puiffamment. L'autorité fuprême, la puiffance de faire tout ce qu'on veut, les richeffes les délices & la flaterie continuelle de ceux qui approchent les Rois, font tout-àfait oppofées à l'efprit de l'Evangile, qui · eft un efprit de croix, de fouffrance, & d'abjection. Mais quand les Rois fe trouvent dans la fouffrance, dans les révoltes & dans les dangers; il leur eft aifé de fe defabufer de l'amour de la grandeur du monde, & ils peuvent pratiquer beaucoup

de vertus en cet état de calamité, dont ils ne trouveroient pas l'occafion dans la profperité de leurs affaires. V. M. a fi bien ufé de tous les malheurs où elle s'eft vûë engagée, & elle a montré un cœur fi Roïal, & fi Chrétien tout enfemble, que j'eftime cette grace plus grande fans comparaison, que celle qui l'a portée fur le Trône. Toutes les Princeffes peuvent être Reines, mais toutes les Reines ne font pas de faintes Amazones comme vous. J'efpere qu'enfin Dieu, qui a éprouvé vôtre vertu par des attaques fi rudes, la couronnera par un repos profond & affeuré. Je ne cefferai de lui demander cette grace, & c'eft par là feulement que je puis témoigner avec quelle paffion & quel refpect, je fuis de V. M. &c.

LETTRE IV.

A Monfieur Balzac, pour le remercier d'un Livre dont il lui a fait présent.

Cette Lettre eft écrite du ftile de celui à celui à qui

elle eft écrite.

MONSIEUR,

C'eft un riche & fâcheux préfent, que celui que j'ai reçû de vôtre part. Je n'ai vû dans le titre que Lettres choifies; & dans la lecture j'ai trouvé les myfteres de la Philofophie, l'idée de la parfaite éloquence,

les graces de la Poëfie, les fecrets de la Politique, & le caractere de l'honnête homme. Il y a dans le Ciel des étoiles qui ne brillent point, mais il n'y a pas une ligne dans vos deux volumes, qui ne jette de la lumiere; je n'entens pas cette lumiere qui éblouit, & qui reffemble à celle des éclairs & des cométes, mais à celle que l'efprit conduit par une fouveraine raison, & éclairé le premier par une heureuse nature, feme dans les ouvrages: Lumiere qu'on peut comparer à cet éclat lumineux qu'on voit fur les fleurs, lorsque le Soleil fe leve, & qu'on pourroit appeller la fleur des fleurs mêmes. Vous ne maniez-pas toûjours de l'or, mais la forme de vos matieres eft toûjours précieuse; quand vos Sujets fe trouvent riches, vous leur donnez par vôtre art de nouvelles richeffes; ils reçoivent toûjours plus de l'ouvrier qu'ils ne lui fourniffent. La beauté de l'enchaffeure furpaffe le prix des diamans que vous mettez en œu vre, & vous fçavez faire plus de fortes de bouquets, que la nature ne fçait faire de fleurs pour les compofer. De grace, apprenez-moi où vous avez trouvé ces mines; quel eft ce climat fi favorifé du Ciel, qui produit de fi admirables parfums? En quel antre allez-vous rêver de fi belles chofes ? qui eft le génie qui vous apprend tant de myfteres n'auriez-vous point trouvé quelA Y

que recueil de tout ce qu'Apollon & les Mufes, les Grecs, & les Romains ont jamais penfe, & dit d'agréable? Mais en même temps que je parle ainfi de vôtre préfent, & que je tâche de vous faire entendre l'eftime que j'en fais, je le trouve fâcheux & incommode; parce qu'il m'ôte le moïen de vous en bien parler, & de vous témoigner comme je voudrois, ma reconnoiffance. Vous avez pris tout l'or, toutes les pierreries de l'éloquence; vous avez épuifé tous les genres dans les complimens, les remerciemens, les confolations & les louanges: Dans le grave & dans le férieux, vous n'avez rien laiffé que ce que vous n'avez pas crû digne d'être choifi. Ne pouvant donc vous remercier des plus belles Lettres du monde, que par une Lettre fort médiocre ; je veux que mon affection pour vous, n'ait point de médiocrité, & vous aimer avec autant d'ardeur, que vous fçavez écrire avec force. Je me trompe fort fi ce païement ne vous fatisfait, & fi vous ne vous plaifez davantage au feu du facrifice qu'à la fumée de l'encens. Si tous ceux qui vous ont présenté en profe & en vers cette fimée, euffent eu la chaleur d'un veritable facrifice, comme ils en faifoient paroître la lumiere; vôtre fiécle vous auroit rendu plus de juftice, & vous ne feriez-pas du nombre de ces excellentes perfonnes; qui en le ren

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