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C'eft que la premiere impreffion de mouvement a fuffi pour les produire en un inftant.

XVII THEOTIME. Cela étant

ainfi, je comprens bien que c'eft perdre fon temps, que de vouloir expliquer par les principes Cartefiens ou par d'autres femblables l'Hiftoire que l'Ecriture nous fait de la Creation.

THEODORE. Affarément on fe trompe, fi on prétend prouver que Dieu a formé le monde en fuivant certaines loix generales des communications des mouvemens. Mais on ne perd pas fon temps de rechercher ce qui doit arriver à la matiere en confequence des loix des mouvemens. Et voicy pourquoy. C'eft qu'encore que Dieu ait formé tout-d'un-coup chaque partie de l'Univers, il a dû avoir égard aux loix de la nature, qu'il vouloit fuivre conftamment, pour faire porter à fa conduite le caractere de fes attributs. Car certai nement fon ouvrage n'auroit pas pû fe conferver dans fa beauté, s'il ne l'avoit proportionné aux loix du mouvement. foleil quarré n'auroit pas pû durer longtemps: un foleil fans lumiere feroit bientôt devenu tout brillant. Vous avez lû, Theotime, la Phyfique de Mr. Defcartes;

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ENTRETIEN S: * & vous, Arifte, vous la lirez quelque jour, car elle le, merite bien.. Ainfi il n'eft pas neceffaire que je m'explique da vantage. Il faudroit maintenant examiner quelle a dû être cette premiere impreffion de mouvement par laquelle Dieu a formé tout-d'un-coup l'Univers pour un certain nombre de fiecles: car c'est là, pour ainfi dire, le point de vue dont je yeux vous faire regarder & admirer la fageffe infinie de la Providence fur l'arrangement de la matiere.

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Mais j'apprehende que vôtre imagination, peut-être déjà fatiguée par les chofes trop generales dont nous venons de parler ne vous laiffaft point aflez d'attention pour contempler un fi vaste fujet. Car, Arifte, que ce premier pas de la conduite, de Dieu, que cette premiere impreffion de mouvement que Dieu va faire, renferme de fageffe! que de rapports, que de combinaifons de rapt ports! Certainement Dieu avant cette premiere impreffion en a connu clairement toutes les fuites, & toutes les com binaifons de ces fuites; non feulement tou tes les combinaifons phyfiques, mais tou tes les combinaifons du phyfic avec le mo ral, & toutes les combinaisons du naturel

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avec le furnaturel. Il a comparé ensemble toutes ces fuites avec toutes les fuites de toutes les combinaifons poffibles dans toutes fortes de fuppofitions. Ila, dis-je, tout comparé dans le deffein de faire l'ouvrage lé plùs excellent par les voyes les plus fages & les plus divines. Il n'a rien negligé de ce qui pouvoit faire porter à fon a action le caractere de fes attributs; & le voilà qui fans hefiter fe détermine à faire cè premier pas. Tâchez, Arifte, de voir cù ce premier pas conduit. Prenez garde qu'un grain de matiere pouffé d'abord à droit, au Heu de l'être à gauche, pouffé avec un degré de force plus ou moins grand, pouvoit tout changer dans le phyfic, de là dans le moral, que dis-je dans mêmes le furnaturel. Penfez donc à la fageffe infinie de celuy qui a fi bien comparé & reglé toutes chofes, que dès le premier pas qu'il fait, il ordonne tout à fe fin, & va majeftueufement, invariablement, toûjours divinement, fans jamais fe démentir, fans jamais fe repentir, jufqu'à ce qu'il prenne poffeffion de ce Temple fpirituel qu'il conftruit par Jefus-Chrift, & auquel il rapporté toutes les démarches de fa conduite.

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ARISTE. Vraiment, Theodore,

vous avez raifon de finir nôtre entretien : car nous nous perdrions bientoft dans un fi vafte fujet.

THEODORE. Penfez y Arifte; car dès demain il faut nous y engager. ARISTE. Si nous nous embarquons fur cet Ocean, nous y perirons.

THEODORE. Non: nous n'y perirons point, pourvû que nous ne fortions pas du vaiffeau qui nous doit porter. Demeurans dans l'Eglife, toûjours foûmis à fon autorité, fi nous heurtons legerement contre les écueils, nous n'y ferons pas naufrage, L'homme eft fait pour adorer Dieu dans la fageffe de fa conduite. Tâchons de nous perdre heureusement dans fes profondeurs. Jamais l'efprit humain n'eft mieux difpofé, que lors qu'il adore par un filence forcé les perfections divines. Mais ce filence de l'ame ne peut fucceder qu'à la contemplation de ce qui nous paffe. Courage donc, Arifte, contemplez, admirez la Providence generale du Createur. Je vous ay placé au point de vue d'où vous devez découvrir une fageffe incomprehenfi

ble.

XI. EN

XI. ENTRETIEN.

Continuation du même fujet. De la Providence generale dans l'arrangement des corps, & dans les combinaisons infiniment infinies du phyfic avec le moral, du naturel avec-le furnaturel.

T

HEODORE. Avez-vous, Arifte, fait quelques efforts d'efprit pour comparer la premiere impreffion du mouvement que Dieu a communiqué à la matiere, la premiere de fes démarches dans l'Univers, avec les loix generales de fa Providence ordinaire, & avec les divers ouvrages qui devoient fe conferver & fe développer par l'efficace de ces loix? Car c'eft de cette premiere impreffion de mouvement dont il faut jetter les yeux fur la conduite de Dieu. C'est le point de vuë de la Providence generale: car Dieu ne fe repent & ne fe dément jamais. Avez-vous donc regardé de là le bel ordre des creatures, & la conduite fimple & uniforme du Createur?

ARISTE. Ouy, Theodore: mais j'ay la vuë trop courte. J'ay découvert bien du pays; mais cela fi confufément, que

je

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