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de Rofoi entra ; elle parut surprise & offenfée de me trouver aux genoux de fa fille; elle nous regarda d'un œil févere. Alix, dont le défordre avoit encore augmenté à la vûë de sa mere, tut à elle, & en fe jettant à fes pieds, elle lui dit toute tremblante: Aurois-je fait un crime, de laiffer voir au Comte de Rethel que j'obeirai, sans répugnance, à vos ordres & à ceux de mon pere? Madame de Roloi, avec · un air froid, dit à fa fille: Je crois qu'il auroit fuffi d'inftruire de vos fentimens, ceux qui vous ont permis de ne pas les combattre : la modeftie ne vous le défendoit pas ;. mais elle devoit vous faire défapprouver l'action trop paffionnée de Monfieur, qui manque, par cette licence, au refpe&t qu'il vous doit. Elle fortit, fans me donner le tems de me juftifier; & Alix, toute en pleurs, la fuivit, fans ofer me regarder.

Je reftai à la place où j'étois, pénétré de joie & de trifteffe. La tendreffe d'Alix me mettoit au comble de la felicité; & la colere injuste

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me.

jufte de fa mere, me caufoit une inquiétude extrême. J'étois dans cette fituation, & douloureufe, & pleine de charmes, quand le Seigneur de Rofoi, venant à moi les bras ouverts, me dit: Roger, vous êtes mon gendre; ma fille vous aiSa mere vient de me conter ce qui s'eft paflé: j'ai blâmé sa sévérité, & je pardonne à Alix de vous avoir inftruit de votre bonheur; vous en êtes digne. Madame de Rofoi, continua t'il, veut que votre mariage fe falfe inceffam> ment; elle vient de m'en preffer, & c'eft avec-plaifir, que je lui at promis cette fatisfaction.

Comment me rappeller ici, mon cher Raoul, ce que l'excès de ma joie me fit dire au pere d'Alix? vous pouvez mieux vous l'imaginer, que je ne puis vous le dire. Nous paflâmes chez Madame de Rofoi; nous la trouvâmes seule avec mon pere. Je mis devant elle un genou en terre, & je lui dis: Vous voïez à vos pieds, Madame, l'Amant le plus fortuné qui fut jamais. Je ne puis trouver de terC 7

mes

mes pour vous exprimer mon refpect, ma reconnoiffance, & ma joie. Levez-vous, Monfieur, me répondit-elle froidement, & ceffez de vous reprocher de manquer de termes pour me perfuader vos fentimens; je leur rends juftice. Mademoilelle de Rofoi entra dans ce moment: fa préfence ne fit point difparoître l'air froid & fombre de fa mere; elle le foutint pendant quelques jours que nous reftâmes encore. Nous partîmes enfin pour Rethel, mais la main de la divine Alix devoit bien-tôt me confoler de cette abfence. Que ce bonheur prochain m'occupoit!

Mon pere, prefque auffi content que moi, donnoit fans ceffe des ordres dans Rethel, pour qu'A · lix y fût reçûë avec toute la magnificence & la dignité convenable. Le jour que nous partimes pour retourner à Rofoi, il me fit venir dans fon Cabinet: Voilà, mon fils, me dit-il, une caflette que vous donnerez, en arrivant, à Mademoiselle de Rofoi; elle renferme toutes les pierreries &tous lesbijoux de

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de feuë votre mere: le préfent eft digne d'Alix & de vous.

Le Seigneur de Rofoi nous vit arriver avec un plaifir extrême ; il joignit à fes tendres embraffemens, le doux nom de fils. L'émotion qui parut fur le beau vifage d'Alix, me dédommagea de fon filence. Madame de Rosoi me reçut avec politeffe, mais toujours froidement: cette froideur non méritée, & trop foutenuë, m'inquiéta; je le dis à mon pere, qui me répondit: La tendreffe d'une mere pour fa fille, cause feule cette altération. Madame de Rofoi nepeut, fans être touchée, envifager une union qui va la féparer de ce qu'elle a de plus cher.

Peu d'heures après ce difcours, je trouvai Madame de Rofoi feule, dans une allée du Parc; je l'abordai refpectueulement. Plein d'eftime pour elle, attendri de l'idée que mon pere m'avoit donnée fur fa mélancolie & fur fa froideur, je lui dis: Madame, votre tendreffe pour Mademoiselle de Rofoi, me rend, du moins je le crains, déla

gréable

gréable à vos yeux: elle m'y préiente peut-être comme un homme qui va vous enlever un bien qui vous eft fi précieux; mais, Madame, il dépendra de vous que je ne vous vole rien: vous reglerez toujours mon fört, & celui de Mademoiselle de Rofoi; je vous promets, & je crois que cette charmante & tendre fille ne m'en dédira pas, de ne jamais la féparer de vous. Mon attachement pour vous,› Madame, le défir de contribuer à votre tranquilité, & de mériter votre amitié, me donneront la force de m'arracher des bras de cette chere épouse, foit que le devoir ou la gloire me contraignent à m'éloigner. Raffurez-vous donc, Madame, & ne me refúfez pas la douceur, pour moi fi fenfible, de voir difparoître une trifteffe qui m'accable de la plus vive douleur. Vous me feriez une injure extrême, me répondit Madame de Rofoi, fi vous penfiez que vous m'êtes un objet défagréable; il s'en faut bien. Soiez donc perfuadé que je défire, avec ardeur, votre mariage; puilqu'il "

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