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ment votre malheur. Partons. Quoi! dit Alix, en courant à mon pere, vous voulez m'abandonner? Vous ordonnez à ce fils qui m'eft fi cher, & pour quifeul je me vois exposée à là fureur de ma mere, de m'oublier! Qui m'aidera donc à foutenir mon infortune? Hélas! que vais je devenir, s'écria t'elle en verfant un torrent de larmes, tout fe déclare contre moi! Ma mere me hait, vous m'ôtez votre amitié, & tous deux vous voulez m'enlever tout ce qui m'eft cher.

Mon pere voïant Mademoifelle de Rofoi dans cet état de trouble & de crainte, crut l'inftant favorable pour lui propofer de l'enlever dès ce moment même; mais ni toutes les raifons, ni tout ce que put lui faire envifager Mademoifelle de Rocheville, ni ma tendreffe, ni mon désespoir, rien ne put ébranler ce devoir austere dont elle eft efclave. Enfin, je fortis aufli pénétré d'admiration, que de douleur; & mon pere la quitta, gémiffant de trouver, dans cette adorable fille, une vertu qui la lui

rendoit

rendoit encore plus chere, quoiqu'elle me rendit plus malheu

reux.

Le Château de Rofoi eft une Fortereffe par fa fituation, par fes murailles, par fes foffez, & par d'autres défenses. Je le favois; mais je voulus encore l'examiner: je me flattois de pouvoir trouver un endroit foible, pour entrer par furprife. Mon pere & moi, nous fimes le tour du Chateau; & nous le fimes, fans espérance de réuffir dans notre deffein. Defefneré de l'impoffibilité d'enlever Mademoifelle de Rofoi; dès qu'elle s'y oppofoit, je pris la résolution de venir, à force ouverte, l'arracher des bras de fa mere; mais mon pere, à qui je communiquai mon projet, me dit, que je ferois en vain cet éclat; que malgré l'amitié, & même le refpect que toute la Nobleffe avoit pour lui, il ne le flattoit pas de mettre dans mon parti les Gentilshommes de la Province, dont Madame de Rofoi étoit adorée, & qui même, pourroient bien prendre les armes pour elle.

J'en

J'en revins à chercher les moïens d'enlever Alix: je dis à mon pere, que fi Mademoiselle de Rocheville vouloit être d'intelligence avec nous, nous pourrions réuflir. Nous lui parlâmes; je la preffai, je la conjurai de m'accorder fon fecours, mais inutilement: elle ne vouloit m'aider que du confentement d'Alix, dont la ferme réfiftance ne me laiffoit aucun efpoir. Hé, bien! dit brulquement mon pere, il faut confondre Madame de Rofoi. Que vous importe, Mademoifelle, qu'elle ait à vous reprocher une infidélité qui vous fait honneur ! Que: craignez-vous? Rethel eft un azile où vous pourrez braver... Hé! que devient Mlle de Rofoi, s'écria cette tendre amie, fi je ne suis pas entr'elle & la mere? Je puis feule détourner, ou du moins fufpendre, tous fes projets, & vous en avertir en un mot, la malheureufe Alix eft perdue, fi Madame de Rofoi, découvrant que j'ai trahi fa confiance, fe trouve dans fon premier tranfport, maîtreffe de s'y abandonner. Hé bien! Mademoi

felle,

felle, lui dit mon pere, que votre tendrefle même pour Alix, vous faffe condefcendre à ce que je veux: arrachons cette infortunée des bras d'une mere dont vous me faites tout craindre. Si Mademoiselle de Rofoi y confent, repartit Mademoiselle de Rocheville, je me prêterai à tout; mais n'attendez aucun fecours de moi fans fon aveu. Si vous aimiez Alix, lui répliqua mon pere, vous vous prêteriez, malgré elle, au feul fecours qui peut la mettre en état de n'avoir plus rien à redouter: votre timidité lui coûtera peut-être cher, & ne me laiffe d'autre voie, que celle de confondre Madame de Roloi. Ah! Monfieur, s'écria Mademoifelle de Rocheville, que voulezvous faire ? Vous perdez Alix pour jamais, & vous l'immolerez à la fureur de Madame de Rofoi, si cette mere malheureuse, car je ne puis m'empêcher de la plaindre, eft une fois déclarée la Rivale de fa fille. Craignez de lui arracher ce qui lui refte de honte & de remords. Au nom de cette infortu

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née fille, ajouta t'elle, gardez-vous de faire connoître à fa mere, que vous avez un fecret, que vous devez paroître ignorer, pour les interêts même, & d'Alix, & du Comte votre fils. Si par un éclat, il étoit découvert, vous verriez aufli-tôt Madame de Rofoi ne plus garder de mefures: comme elle n'auroit plus rien à craindre, elle n'auroit plus rien à ménager. D'abord, & malgré tout ce que vous pourriez faire, elle difpoferoit de fa fille en faveur d'un autre. Si elle ne l'a encore ofé, c'eft qu'elle craint que la fille étant mariée, le Comte, ardent à chercher les occafions de lui reprocher fa légereté, ne foit inftruit, par elle, qu'elle eft, comme lui, la victime des artifices de fa mere. D'un côté, Madame de Rofoi appréhende d'être haïe, méprifée du Comte, & de lui être pour jamais un objet odieux: de l'autre, elle penfe pouvoir triompher un jour, à l'aide de les charmes & de fes artifices. Elle fe flatte que les mépris apparens de fa fille, révolteront le pere,

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