Imágenes de páginas
PDF
EPUB

Sfu-ki.
Kam-mo.

Sfu-ki. Kam-mo. Ven-bientum-kao.

L'an 210.
Teou-man

puissant, fubjugua tous les autres, & la Chine, délivrée de la tyrannie, fous laquelle elle gémiffoit depuis plus de huit cens ans, fut gouvernée par un feul Monarque qui prit le titre de Hoam-ti; c'eft-à-dire, Augufte, Empereur. Jufqu'alors ces Princes s'étoient bornés au fimple titre de Vam ou de Roi.

Après que Chi-hoam-ti eut pacifié l'Empire, il songea à le garantir des incurfions des Huns. Il envoya contre eux à cet effet un de fes Généraux appellé Mum-tien (a) à la tête de trois cens mille hommes. Les Chinois reprirent dans cette expédition tout le pays d'Ortous (b), & les Huns furent obligés de fe retirer plus au Nord. Mais pour empêcher qu'ils ne rentraffent dans le pays dont on venoit de les chaffer, l'Empereur Chinois fit conftruire fur les bords du fleuve Hoam,quarante-quatre villes fortifiées de bonnes murailles, &. de fortes garnifons: il fit garder avec foin tous les défilés & les endroits par lefquels on pouvoit entrer. Ensuite, à l'imitation des Rois de Tchao & de Yen, il fit élever une grande muraille qui commençoit à Min-tcheou, ville du district de Lin-tao-fou dans la Province de Chenfy. Elle couvroit toute cette Province & alloit rejoindre les deux murailles que les Tchao & les Yen avoient fait conftruire, ce qui formoit une vafte muraille qui fe terminoit dans le Leao-tong. En même tems le Général Chinois fe campa dans la Province de Cham, aujourd'hui, Yen-gan-fou dans le Chenfy, pour être plus à portée de repouffer les Huns en cas d'invafion.

Ces Peuples avoient alors pour Empereur un Prince Avant J. C. nommé Teou-man, qui, contraint de céder aux grandes armées des Chinois, s'étoit retiré plus au Nord où il étoit refté pendant environ dix ans. Après la mort de l'Empereur Chi-hoam-ti & celle du Général Mum-tien arrivée dans le même tems, la Chine fut exposée à de nouveaux troubles. Les Grands de l'Empire se revolterent contre le nou

Sfu-ki.
Kam-mo.
Ven-bien-
tum-kao.

Lic-tai-ki

Su.

(a) Le Sfu ki ne met que cent mille hommes.

(b) Il portoit alors le nom de Ho nan c'est-à-dire, qui eft au midi du ficuve

Hoam-ho. Il ne faut pas le confondre avec la Province de Honan fituée au midi du Petcheli, quoi que ces noms foient écrits de la même façon.

l'an 210. Teou-man

vel Empereur; toutes les garnifons, qui avoient été mifes fur les frontiéres abandonnerent leurs poftes : les Huns Avant J. C. repafferent le Hoam (a), rentrerent dans le pays d'Ortous & reprirent tout ce qu'ils poffedoient avant qu'ils euffent été chaffés par les Tsin.

Ven-bientum-kao.

C'est à cette époque que les Chinois commencent à nous donner des détails plus exacts & plus circonftanciés fur l'histoire des Huns, & Teoù-man eft le premier Empereur de cette Nation dont le nom foit parvenu jufques à nous. On prétend qu'il tiroit fon origine d'un Prince Chinois nommé Chun-goei (b) de la famille Imperiale de Hia, qui Sfu-ki. s'étoit retiré dans la Tartarie (c). On n'a aucune connoif- Han-chou fance de fes fucceffeurs jufqu'à Teou-man, qui, felon le rapport des Hiftoriens, regnoit mille ans après. Ainfi l'époque de l'établissement de l'Empire des Huns doit être remonté jusques vers l'an douze cens trente avant J. C. Je dis environ, parce qu'on ignore combien Teou-man a regné, & que les Chinois femblent n'indiquer que d'une maniere trop générale le nombre des années qui fe font écoulées entre ces deux Princes.

Quoi qu'il en foit, Teou-man avoit un fils aîné auquel

(a) Hoam grand fleuve de la Chine qui prend fa fource à l'Occident de la Province de Chanfy remonte vers le Nord, entre dans la Tartarie, puis defcendant au midi, traverse enfuite la Chine & va fe jetter dans la mer Orientale. Les anciens Chinois croyoient qu'il tiroit fon origine des montagnes qui font à l'Ouest de Khoten dans la petite Bukharie, qu'il traversoit le lac de Lop où il fe perdoit fous terre, & qu'enfuite il reparoiffoit quelque diftance de-là, formoit le Hoamho; c'eft-à-dire, le Fleuve Jaune ou bourbeux. Les Tartares le nomment Caramouran ou le Fleuve noir, & Marc-Paul, Cara-moran.

à

(b) Parmi les Fondateurs de l'Empire Turc l'Hiftorien Beidawi nomme Dibbacaoui defcendu de Turk, fils de Japhet; d'un autre côté les Chinois font remonter l'origine des Huns jufques à la Dymaftic de H.a par Chun-goci qui defcen

doit de l'Empereur Yu, Fondateur de
cette Dynaftic. Yu étoit encore appellé
Ta-yu ou Ta-yu-heou. Je ferois fort
porté à croire que Dibba - caoui n'eft
qu'une altération de ce dernier. Au lieu
du D les Chinois fe fervent du T, L'Y &
le B chez les Tartares font fouvent em-
ployés l'un pour l'autre, comme dans
Yefou - kai ou Bifou-kai & l'H afpiré
fortement devient un K. Ainfi Ta-yu-
heou fait Da-bou - keou. Peu différent
dans le fond de Debbacaoui ou Dibba-
coui. Dans les manufcrits Perfans ce mot
étoit écrit fans les points voyelles, &
par conféquent le véritable fon a dû être
ignoré Dabbou-kou ou Dibba-cou étant
écrits avec les mêmes confonnes font le
même mot. Ainfi l'Hiftorien Perfan fe
trouveroit conforme aux annales Chi-
noifes.

(c) Aprèsla deftruction de la Dynaftic
de Hia arrivée l'an 1122 avant J. C.

Avant J. C.

l'an 210. Teou-man

Sfu-ki.

l'Empire devoit appartenir legitimement après fa mort. Ce jeune Prince appellé Me-té vivoit tranquillement à la Cour de fon pere, lorfqu'une femme vint mettre entre eux la divifion (a). Epoufe de Teou-man, elle en avoit eu un fils, fur la tête de qui elle vouloit faire paffer la Couronne au préjudice de l'aîné, & Teou-man, qui n'eut point affez de fermeté pour réfifter aux follicitations d'une femme qu'il aimoit, dépofa Me-té, l'éloigna de la Cour & l'envoya comme en ôtage chez des Peuples voifins nommés Yue-chi. Dans ledeffein de le faire périr chez ces Barbares, il leur déclara la guere, perfuadé que les Yue-chi s'en vengeroient fur ce fils; mais il en fut la principale victime. Lie-tai-ki- Les Tartares Yue-chi, battus par Teou- man, chercherent en effet Me-té pour le faire mourir ; mais cé dernier, qui fut inftruit affez à tems de ce que l'on tramoit contre lui, s'échappa par une prompte fuite & regagna les Etats de fon pere, où fe laiffant entraîner à tout ce que la vengeance peut infpirer de plus cruel, il commit des forfaits que les fuccès effacerent de la mémoire des hommes: & l'on ne vit plus en Me-té qu'un héros, fondateur en quelque façon de l'Empire des Huns.

Han-chu.
Kam-mo.

Su.

Sfu-ki.
Han-chu.

Ven-bien-
tum-kao.
Lie-tai-ki-

Su.

Me-té,connu & chéri des Peuples à caufe de fa bravoure, trouva le moyen de fe former une troupe de dix mille hommes de Cavalerie & fe mit à leur tête pour reclamer fes droits. Les Hiftoriens rapportent qu'il inventa une forte de flêches auxquelles il donna le nom de Flêches - refonnantes. Il exerça fes Cavaliers à les lancer d'abord fur des oifeaux, enfuite fur les plus beaux chevaux qui fe recontroient, & la mort étoit la punition de celui qui ne touchoit point au but: enfin, pour s'affurer de plus en plus du courage & de la fidélité de fes foldats, il porta la cruauté jufqu'à faire tirer fur celles de leurs femmes qu'ils chériffoient le plus. Il n'admit à fa fuite que ceux qui éxécuterent fes ordres ; les autres furent mis à mort. Me-té fondit avec fa troupe fur Teou-man, le poursuivit, le tua avec tous fes gens, & n'épargna en cette occafion ni l'Im

(4) Les impératrices femmes des Tanjou portoient le titre de Yen-chi

pératrice, ni fon fon fils, ni ceux des Grands qui ne voulurent point fe foumétrre. Tant de meurtres furent les dégrès qui fervirent à élever ce Prince barbare sur le trhône. Avant J. C. Cet événement arriva l'an deux cens neuf avant Jefus-Me-té. Christ, la premiere année du regne d'Ulh-chi Empereur

de la Chine, & la vingt-neuvième du quarante-deuxième cicle Chinois.

[ocr errors]

l'an 209.

Kam-moi

Les Tartares Orientaux fitués au Nord du Leao - tong Su-ki. étoient devenus alors très-puissants. Informés de la révolution qui venoit d'arriver chez les Huns, & du grand nombre de mécontens que la cruauté de Me-té avoit fait foulever, ils ne fongerent qu'à porter la guerre dans fes Etats, pour s'y enrichir par tes vols & les brigandages, ou lui ravir quelques-unes de fes Provinces. Une chofe, qui chez toute autre Nation que des Tartares auroit été méprisée, fixa l'attention des Grands & fervit de prétexte pour faire la guerre. Me-té avoit dans fes haras un cheval de prix qui faifoit, dit-on, mille li (a) en un jour. Les Tartares Orientaux le firent demander par des Ambaffadeurs qu'ils envoyerent Suki. exprès. Me-té affembla les chefs de la Nation tous étoient d'avis qu'on ne l'accordât pas aux Tartares ; mais l'Empereur ne croyant pas ce motif fuffifant pour rompre avec fes voifins, fit remettre le cheval. Cette conduite ne fervit qu'à augmenter l'orgueil & l'infolence des Tartares Orientaux. Ils crurent en avoir impofé aux Huns. Devenus plus entreprenans, ils exigerent de nouveau qu'on leur donnât une des femmes de l'Empereur, & ce Prince, qui ne cherchoit que la paix, la remit malgré l'avis de fon Confeil, proteftant que fon attachement pour une femme ne le conduiroit jamais à rendre fes fujets malheureux, en les obligeant de foutenir une guerre avec des voifins redoutables. Mais plus il s'efforçoit de maintenir la paix, plus les Tartares Orientaux s'empreffoient de trouver des moyens pour la rompre. Il y avoit alors un terrain abandonné qui fervoit à féparer les deux Nations, mais qui étoit de la dépendance des Huns. Les Tartares Orientaux vou

[ocr errors]

(a) C'est une expreffion Chinoife pour fignifier un cheval qui peut faire de grandes courfes. Li eft une mefure Chinoise.

1

l'an 109. Me-té.

,

loient qu'on le leur abandonnât, & les Chefs des Huns Avant J. C. confidérant le peu d'avantage que l'on retiroit de cette terre, paroiffoient affez indifférens à cet égard. Il n'en fut pas de même de Me-té. Cette terre n'étoit point un bien qui lui fût propre, c'étoit une partie des Etats que fes ancêtres lui avoient laiffés ; c'étoit un bien appartenant à fes fujets, & dont il ne croyoit pas pouvoir difpofer comme il avoit fait de l'Impératrice & de tout ce qu'on avoit exigé jufqu'alors. D'ailleurs ces demandes réïtérées des Tartares Orientaux l'irritoient. Il monta à cheval, ordonna que tous fes Cavaliers le fuiviffent, & fit mourir ceux qui refterent les derniers à éxécuter fes ordres. Il furprit les Tartares qui n'étoient point préparés à le recevoir, il les défit, tua leur Roi, fit un grand nombre de prifonniers & emmena quantité de troupeaux. Les reftes de cette Nation fe fauverent dans les montagnes de Tartarie situées au Nord de la Province de Pekim, dans le pays qui porte aujourd'hui le nom de Cartchin: ils s'y partagerent en deux bandes qui formerent deux Nations considérables dont il fera fouvent fait mention dans la fuite, & qui ont été très-puissantes dans la Tartarie. Les uns ont pris le nom Sien-pi qui étoit celui des montagnes qu'ils avoient choifies pour faire leur demeure, & les autres, pour la même raison, étoient appellés Ou-huon. Ces deux Nations parloient la même langue, & avoient à peu de chofes près

Ven-bientum-kao. Heou hanehou.

Han-chou.

tum-kao.

les mêmes coûtumes.

Après que les Tartares Orientaux eurent été ainfi difVen bien perfés, Me-té tourna fes armes victorieufes du côté de l'Occident & du Midi. Il battit les Tartares Yue-chi qui habitoient vers Kua-tcheou & Cha-tcheou.Il foumit les hordes des Tartares qui demeuroient dans le pays d'Ortous & fit le dégât jufques dans la Province de Tai, aujourd'hui Ta-tum-fou dans le Chanfi. Ces victoires le rendirent maître en peu de tems de tous les pays que les Tfin avoient enlevés aux Huns. Ses nombreuses armées qui étoient de trois cent mille hommes, & les guerres civiles qui affoibliffoient la Chine, lui donnerent la fupériorité fur tous fes voisins, & il devint le plus puiffant Monarque qui fût alors dans ces extrémités Orientales de l'Afie.

Ce

« AnteriorContinuar »