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Me-té.

chers conduifit l'Empereur. Ce Prince vouloit qu'on fe Avant J. C. hâtât, mais un Officier s'y oppofa, & fit marcher les troupes en bon ordre. Alors l'Empereur de la Chine, ayant rejoint le refte de fon armée, punit les efpions Chinois, tira des fers Lieou-kim & le récompenfa. Ainfi finit cette grande expédition qui paroiffoit devoir caufer la ruine de l'un ou de l'autre Empire.

Kam-mo. Ven-bientum-kao.

L'an 199.

Su-ma-kum

Cependant on s'étoit feparé fans faire la paix, & les Huns, dès la même année, avoient recommencé leurs courses dans le territoire & les environs de Ta-tum-fou. Hi, Roi de Tai avoit été obligé d'abandonner fon Royaume. Ces courses devenant plus frequentes, l'Empereur qui en étoit fincérement affligé, à caufe des maux qui affligeoient fes Sujets, cherchoit tous les moyens d'y remédier; il paroiffoit difpofé à entreprendre une nouvelle guerre. Lieou-kim l'en détourna en lui repréfentant que l'Empire avoit befoin de la paix afin que les troupes nouvellement licentiées euffent le tems d'aller se reposer dans leur Patrie. Il ajouta qu'avec un Prince tel que le Tanjou, qui étoit un barbare encore couvert du fang de fon pere, qui vivoit avec fa belle-mere dont il avoit fait fa femme, qui n'étoit redoutable que par la violence & la tyrannie, qui ne connoiffoit ni la juftice ni la piété, il falloit employer la rufe & l'artifice. Afin que par la fuite on parvint à le réduire, fans répandre le fang des Chinois, il propofa de lui donner en mariage une Princeffe Chinoise fille de l'Empereur, dans l'efpérance qu'elle adouciroit le caractère barbare de fon mari,& que fi elle avoit un fils, les Huns fe trouveroient gouvernés un jour par un Prince du fang Impérial de la Chine. Son deffein étoit, lorfque ce jeune Prince feroit en âge, de le faire venir à la Chine où il feroit élevé fuivant les coûtumes des Chinois; parlà, pendant tout le tems que Me-té regneroit en Tartarie l'Empereur étoit sûr d'avoir un gendre, & après fa mort un petit-fils Maîtres de ces grands Etats, les armes devenoient inutiles, & les Peuples fe foumettoient d'eux-mê

mes.

Quelques Hiftoriens Chinois guidés, moins par le bien

Avant J. C.

Me-té.

Lie-tai-ki

Su.

public, que par cette fierté infupportable qui forme le caractère de cette Nation, défapprouverent ce confeil, prétendant que la Puiffance & la Majefté de l'Empereur de la Chine devoient feules en impofer aux Huns, & qu'il étoit deshonorant pour les Chinois, de voir le fang de leur Empereur mêlé avec celui d'un Barbare. Soit que ce motif prévalût dans l'efprit de l'Impératrice Liu-heou mere de la Kam-mo. Princeffe, foit que ce fut par attachement & par tendreffe pour fa fille, elle ne voulut jamais confentir qu'on l'envoyât en Tartarie; mais prenant une fille efclave, à laquelle l'Empereur donna le titre que portoient les Princeffes de fa famille, elle la fit conduire au Tanjou qui l'époufa comme fille de Kao-ti. Alors Lieou-kim conclut le traité entre les deux Nations. Dans la fuite, & lorfque les Chinois furent obligés de donner des Princeffes du Sang Impérial aux Souverains de Tartarie, ce ne fut, le plus fouvent, que des filles efclaves qu'ils leur envoyerent, après les avoir honorées du titre de Kum-tchou ou Princeffe du Sang.

La paix qui venoit d'être faite, n'empêcha pas que les Chinois ne fe tinffent toujours fur leur garde. Les Huns poffedoient alors le pays d'Ortous qui n'eft éloigné de Sigan-fou que de fept cens li. Ils pouvoient fe rendre dans Kam-me. cette Capitale en peu de tems; & avant que l'on eût pû mettre fur pied des troupes fuffifantes pour les chaffer, ils fe feroient trouvés au centre de l'Empire. Lieou-kim qui, pendant fon voyage en Tartarie avoit été à portée de s'en convaincre par lui-même, confeilla à l'Empereur de placer fur les frontieres plufieurs familles Chinoifes, connues par leur bravoure & capables de deffendre l'entrée de la Chine cet avis fut fuivi & l'on difperfa dans ces terres environ un million d'hommes.

Ces familles fervirent à contenir pendantquel que tems les L'an 197. Huns ; au moins il eft certain que ces peuples, foit qu'ils ne fuffent pas en état de remuer ou qu'ils n'ofaffent le faire à caufe de ces nouvelles garnifons; foit qu'ils vouluffent obferver les Traités, ne prirent aucune part dans une revolte qui arriva à la Chine, malgré les vives follicitations des principaux rebelles qui leur envoyerent demander du fe- L'an 195.

Me-té.

Kam-mo. Sfu-ki.

Sfu-ki.
Kam-mo.

Lie tai-ki

Su.

cours. Mais quelque tems après un de ces rebelles nomavant J. C. mé Liu-van Roi de Yen s'étant retiré en Tartarie avec dix mille hommes, les Huns ne firent plus de difficulté de recommencer leurs courfes. Il eft vrai que l'Empereur Kao-ti venoit de mourir, & quoique fon fils Hiao-hoei-ti lui eût fuccédé, toute l'autorité étoit entre les mains de l'Impératrice Tai - heou. Le Tanjou avoit beaucoup de mépris pour cette Princeffe. Dans les lettres qu'il lui écrivit il L'an 192. s'exprimoit dans des termes fi peu convenables, que l'Impératrice fit affembler fon Confeil, pour délibérer si elle ne feroit pas fur le champ couper la tête aux Ambassadeurs, & fi elle ne porteroit pas enfuite la guerre dans la Tartarie. Un Miniftre nommé Fan-hoei ofa fe vanter de traverfer & de fubjuguer tout l'Empire des Huns avec cent mille hommes. Un autre Miniftre appellé Li-pou que ce difcours irritoit dit hautement que Fan - hoei méritoit la mort, puifqu'autrefois avec trois cens mille hommes il commandoit n'avoit pu débarraffer le feu Empereur Kaoti ; » Vous l'avez - vû, dit-il, affiégé par les Huns fans ofer le fecourir. Aujourd'hui les Peuples ont encore ce défaftre préfent à leurs yeux; on» leur entend dire nous avons été fept jours fans vivres, le bruit de leurs plaintes n'eft point encore ceffé, les malades ne font point encore guéris de leurs bleffures. Prétendez» vous, Fan-hoei, par des paroles trompeufes, exciter tout l'Empire à recommencer la guerre, & pouvoir avec cent mille hommes ravager celui des Huns. Non, c'est avoir trop d'orgueil; ne croyez point que ces barbares reffem» blent à des animaux incapables de diftinguer le bien d'a» vec le mal. C'eft avoir trop de mépris pour des hommes. Oui j'ofe le dire,dans l'état d'affoiblissement où nous fommes,la paix eft préferable. Ce difcours fit impreffion : l'Impératrice se contenta d'exiger que le Tanjou écrivit d'une maniere plus refpectueufe, ce qu'il fit; s'excufant, pour le paffé, fur ce qu'il n'étoit point affez inftruit des ufages de la Chine. Alors la paix fut conclue. Il paroît qu'elle dura affez long-tems, & qu'elle ne fut interrompue que par deux incurfions que les Huns firent dans le territoire de

Sfu-ki.
Ven-bien-

tum-kao. Lie-tai-kiSu.

L'an 181.
Kam-mo.
Lie-tai-ki-

Su.

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Lin-tao-fou

,

Avant J. C,
Meté.

Lin-toa-fou dans le Chenfy. Il eft vrai que le Tanjou les défavoua & voulut faire paffer ceux qui les avoient faites pour des brigands, fur fefquels il n'avoit aucune autorité; mais fon deffein n'étoit que d'amufer les Chinois avec lefquels il ne vouloit pas rompre une paix, qui lui étoit néceffaire pour rétablir fes affaires, quoique dans le fond elle fut nuifible à ses sujets qui étoient tellement accoutumés à vivre de brigandages, qu'il n'y avoit que la guerre qui pût leur procurer les chofes les plus néceffaires. Comme ces incurfions fourniffoient à leurs fubfiftances le Tanjou étoit forcé de les permettre. Les Grands de la Nation ne faifoient même aucune difficulté de les entreprendre. C'est dans cette vûe, après que l'Impératrice fut morte, & que Hiao-ven-ti lui eut fuccédé, que le Vice-Roi d'Occident Su-ki. vint camper dans le pays d'Ortous avec un corps L'an 177. Huns; de-là il ofa faire des courfes jufques aux portes de Si-gan-fou Capitale de l'Empire, ce qui obligea l'Empereur d'envoyer contre lui une armée de quatre vingt-cinq mille hommes. Les Huns furent chaffés; mais cette course étoit une infraction aux traités, & il falloit, pour donner quelque fatisfaction aux Chinois, punir, au moins en apparence, le Vice-Roi ; c'eft ce que fit le Tanjou en le rappellant, le forçant à quitter les frontieres de la Chine, & l'envoyant commander d'un autre côté où il devint plus utile aux Huns: il foumit de vastes pays, où probablement ils avoient pénétré auparavant, mais qui n'étoient point alors fujets du Tanjou.

des

Ven-bien

Le Vice-Roi d'Occident se rendit à la tête d'une puiffante armée dans le pays des Yue-chi. Ces Peuples, qui Sfu-ki avoient été battus autrefois par les Huns furent entié- tum-kao. rement foumis dans cette guerre ; ils habitoient dans le pays de Kan-tcheou, de Kua-tcheou & de Cha-tcheou qui n'étoient pas alors de la dépendance des Chinois, comme ils le font aujourd'hui. De-là continuant fa marche vers le Sud-oueft, il alla foumettre les Peuples de Chenchen, qui demeuroient dans le défert de Chamo au Nord du Tibet & dans les environs du Lac de Lop, où ils vivoient, comme les autres Tartares, fous des tentes Tome I.

E

Me-té.

Sfu-ki.
Lie-tai-ki-

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Avant J.C. avec de nombreux troupeaux. Les Ou-fiun, Peuples fr tués à l'Occident du pays des Huns, au Nord d'Igour & le long des rivieres d'Irtifch & d'Ili, tomberent auffi sous la domination des Huns; mais ces pays malgré leur étendue & leur éloignement du principal campement_du Tanjou, ne furent pas encore les bornes de fon Empire. Le Vice-Roi avec les troupes s'avança jusques chez les Hou-te, Peuples encore plus occidentaux: leur pays fitué vers le Kaptchaq en tournant un peu au Nord, produit d'excellens chevaux & beaucoup de Marthes Zibelines. Les Huns fubjuguerent encore plufieurs autres Peuples voifins, de forte qu'il paroît que les Etats de Meté s'étendoient depuis la Corée & la mer du Japon jusques aux frontieres Orientales du Kaptchaq, & peut-être même jufques au Volga; une partie de la Siberie en tirant une ligne parallele à Tobolsk lui étoit soumise. Pendant que le Vice-Roi étoit occupé à faire la conquête de ces vaftes pays, le Tanjou apportoit tous fes foins à regagner les bonnes graces de la Cour de la Chine, & à renouveller le Traité de paix. Si les Chinois avoient eu quelque fujet d'être mécontens des irruptions faites par les Huns, le Tanjou prétendoit avoir auffi à fe plaindre des Officiers Chinois qui n'avoient pas moins contribué que les Huns à l'infraction des Traités faits depuis long-tems entre les deux Nations ; il foutenoit que, dans ces courses faites à l'infçu des deux Monarques, le plus grand tort étoit du côté des Chinois qui lui avoient fouvent porté leurs plaintes à ce fujet, fans avoir jamais voulu recevoir les excufes qu'il avoit toujours été prêt de leur faire; qu'ils avoient même arrêté fes Ambaffadeurs & rompu d'eux-mêmes la paix. Enfuite pour faire voir qu'il avoit défaprouvé la conduite du Vice-Roi; il affura l'Empereur, qu'il avoit envoyé cet Officier faire la guerre dans l'Occident. Il prit delà occafion d'annoncer à ce Prince les grandes conquêtes que les Huns venoient de faire dans la grande Boukharie, dans la Tartarie occidentale & dans la Siberie. Il comptoit vingt-fix Royaumes différens, dont les

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