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A vant J. C.

Sfu-ki.

chaffer dans leurs forêts. Plufieurs fois le Tanjou envoya des Ambassadeurs à la Chine pour demander la paix. D'un Ou-goei. autre côté les Chinois avoient donné ordre à Vang-ou & à d'autres Officiers de paffer en Tartarie pour s'informer exactement de la fituation des Huns, pendant que ceuxci faifoient la même chose à l'égard de la Chine. Mais ce qui les inquiétoit le plus étoit ce commerce que les Chinois entretenoient avec les peuples Occidentaux, c'est-à-dire vers la Bactriane, le Khorafan & les Indes. Les Huns étoient continuellement occupés à chercher les moyens de l'interrompre, & engageoient les peuples voifins à entrer dans leurs vûes, en leur faifant entendre qu'ils y étoient également interreffés.

L'an 108.

Kam mo.

Tous ces petits Royaumes, dont la plupart confiftoient en cinq ou fix villes, étoient fouvent forcés d'obéir aux Huns, parce qu'ils n'étoient pas affez puiffants pour leur réfifter, & par la même raifon ils fe trouvoient enfuite expofés à la colere & à la vengeance des Chinois. C'est ce qui arriva particulierement aux Leou-lan, qui arrêtoient & faiHan-chou. foient périr ceux que l'Empereur de la Chine envoyoit dans l'Occident. Ce Prince fut obligé de faire partir le Général Tchao-pou-nou à la tête de fept cens cavaliers pour leur faire la guerre. On prit la capitale des Leoulan fituée fur les bords du Lac de Lop: on tua leur Roi, & de-là on paffa dans le pays des Igours dont les troupes furent défaites. Les Huns informés que les Leou - lan étoient devenus tributaires des Chinois, leverent aussi-tôt une armée & entrerent dans ce pays. Le nouveau Roi fut obligé d'envoyer un de fes enfans en ôtage chez le Tanjou, pendant qu'un autre étoit retenu chez les Chinois, dont il redoutoit également la puiffance: ces peuples venoient de foumettre toute la Corée jufqu'à la mer Orientale.

Sfu-ki.

Kam-mo.

Le Tanjou avoit fait demander plufieurs fois la paix; mais les Chinois exigeant de lui qu'il leur envoyât fon fils aîné en ôtage, il ne voulut jamais y confentir. Il répondit que c'étoit agir contre les anciens traités, puisque les Chinois au contraire avoient coutume d'envoyer en

Avant J.C.

Tartarie une de leurs Princeffes avec de grands préfents,
afin que les Huns ne fiffent point de courfes chez eux. En
agissant ainsi, le Tanjou avoit moins envie de faire la Ou goei.
paix que de tirer des Chinois des fommes & quelques
préfents; & pour en impofer d'avantage, il dit à Vam-ou
alors Ambassadeur de la Chine auprès de lui, qu'il vouloit
fe rendre en perfonne à la Cour de l'Empereur pour con-
clure le Traité. Vam-ou en donna avis à son Maître, qui
fit auffi-tôt préparer un Palais magnifique à Si-gan-fou pour
y recevoir le Tanjou; mais le hazard voulut que dans le
même - tems, l'Ambaffadeur des Huns tomba malade &
mourut, malgré les foins que les Chinois employerent
pour lui conferver la vie. L'Empereur fit porter en Tar-
tarie le corps de cet Ambaffadeur avec des préfens
confidérables. Le Tanjou crut ou feignit de croire qu'on
avoit fait mourir fon Miniftre, retint prifonnier l'Envoyé
des Chinois, & comme Vam - ou n'avoit pû jufqu'alors
faire partir pour la Chine le Prince héritier de l'Empire
des Huns; ceux-ci, qui n'avoient point de mefures à garder,
recommencerent leurs courfes fur les frontieres des Chi-
nois: ce qui obligea l'Empereur d'établir un camp & des
troupes dans le pays d'Ortous.

L'an 107.

Ces nouvelles garnifons rendirent inutiles toutes les L'an 10s. tentatives des Huns du côté de la Chine. Dans l'impoffibilité d'y remporter des avantages, ces Peuples tournerent leurs armes contre les Ou-fiun, que leurs liaifons avec les Chinois faifoient regarder comme ennemis du Tanjou. Les Ou-fiun effrayés envoyèrent auffitôt à la Chine pour fe mettre fous la protection de l'Empereur & faire un traité, à condition que leur Roi épouferoit une Princeffe Chinoife: ce qu'ils obtinrent. Mais le traité ne fut pas plutôt conclu, que le Tanjou obligea le Prince des Ou-fiun d'époufer une de fes filles : tant les Huns étoient alors redoutables dans la Tartarie. La Princeffe Chinoise au défefpoir de fe voir dans un pays fi éloigné & fi barbare, s'occupoit quelquefois, pour diffiper fon ennui, à faire des vers, dans lefquels Han-chou. elle dépeignoit fon malheur. Voici la traduction de

J

Avant J.C.
Ou goci.

Kam-mo.

Sfu-ki.

Ulh.

Sfu-ki.

quelques-uns que les Hiftoriens ont confervés.

Ma famille m'a donné un Epoux,

Et m'a forcé de demeurer dans un pays éloigné.

Là de miférables tentes font mes Palais,

Des pieux en forment les murailles,

La chair crue fait toute ma nourriture,

Le lait caillé est ma boisson.

Ah chere partie, je pense continuellement à vous:

Mon cœur eft mortellement blessé :

Que ne fuis-je oifeau

Pour aller vous rejoindre!

Dans la même année le Tanjou Ou-goei mourut après un regne de dix ans. Son fils Ou-fu-liu lui fucceda, & comme ce Prince étoit jeune, on lui donna le titre de Ulh-Tanjou; c'est-à-dire, du Tanjou enfant. A fon ave nement au thrône il renvoya l'Officier Chinois qui avoit été chargé de conduire le corps de cet Ambaffadeur des Huns dont j'ai parlé plus haut, & qui étoit retenu en Tartarie depuis trois ans ; il fixa son habitation vers le Nord-oueft, & mit le Vice-Roi d'Orient à Yun-tchum dans le pays de Ta- tum - fou, & celui d'Occident vers Kantcheou & So-tcheou.

L'Empereur de la Chine informé du changement qui venoit d'arriver à la Cour des Huns, renvoya deux Ambaffadeurs en Tartarie pour faire des compliments de condoleance, l'un au nouveau Tanjou, & l'autre au Vice-Roi d'Occident. Il étoit contre l'ufage de s'adresser à ce dernier dans ces fortes de cérémonies; mais l'Empereur avoit deffein de faire naître des foupçons dans l'efprit du Tanjou contre cet Officier, & de mettre par ce moyen la divifion entre eux. En effet le Tanjou irrité de ce procédé, fit arrêter les Ambaffadeurs Chinois. Kam-mo. L'Empereur de la Chine fit de même à l'égard de ceux Lie-tai-ki- des Huns qui étoient à fa Cour, & fes projets eurent

Sfu-ki.

Su.

Ulh.

tout le fuccès qu'il en attendoit. La Cour du Tanjou fe trouva remplie de troubles: ce jeune Prince avec des Avant J.C. inclinations guerrières & capables de le faire aimer de L'an 104. ses Sujets, tenoit une conduite qui produifit un grand nombre de mécontens que les Chinois entrenoient fecrettement. On ne fe propofoit rien moins que de le faire mourir; mais les Conjurés qui n'avoient pas des forces fuffifantes pour se maintenir dans la Tartarie, manquoient d'un lieu où, après cette action, ils puffent être en fureté. La Chine leur paroiffoit trop éloignée pour leur donner du fecours affez à tems. Ils inftruifirent l'Empereur du motif qui les arrêtoit : ce qui fit prendre à ce Prince le parti de conftruire, au Nord du pays d'Ortous & du Hoam, une ville pour fervir d'azile à ceux des Huns qui voudroient fe foumettre aux Chinois. Elle fut appellé Cheou-kiang-tchim, c'est-à-dire Ville où Pon reçoit ceux qui fe foumettent; mais comme cette place L'an 103. étoit encore trop éloignée de la Cour du Tanjou, il en- Kam-me. voya en Tartarie une armée de vingt mille hommes, Su-ki. commandée par Tchao-pou-nou : ce Général prit fa route par le pays d'Ortous vers le Nord-oueft, & pénétra environ à deux mille li en Tartarie jufqu'à la montagne Sun-ki-chan, que je crois faire partie de cette chaîne de montagnes qui vont fe terminer au Nord de Kamoul, au midi des fources de l'Irtisch, après avoir traverfé le grand défert. Malgré ces précautions de l'Empereur de la Chine, la confpiration n'eut aucunes fuites facheufes pour le Tanjou: ce Prince qui en avoit été informé, avoit eu le tems de prévenir les Conjurés il avoit fait mourir leur chef, & enfuite à la tête des troupes d'Occident, au nombre de quatre vingt mille hommes, il avoit marché contre les Chinois. Il les rencontra près de Cheou-kiam-tching au nord du fleuve Hoam Lie tai ki& les inveftit de tous côtés le Général Chinois fut fu. pris en voulant paffer une riviere une riviere pour fe fauver, & toute fon armée fut mife en déroute. Le Tanjou fe préfenta aux Portes de Cheou-kiam-tching; mais n'ayant pû se rendre maître de cette Ville, il fe contenta de faire des

Ulh.

L'an 102.

courfes fur les frontiéres de la Chine, & se retira. Il reAvant J. C. vint en faire le fiége l'année suivante. Une maladie dont il fut attaqué & qui l'emporta, fauva cette place importante. Ce Prince n'avoit regné que trois ans fon fils étant trop jeune pour foutenir le poids de la Couronne de Tartarie, dans un tems où il falloit un Prince en état de réfifter aux Chinois, les Huns mirent à fa place le Vice-Roi d'Occident, frere de l'ancien Tanjou Ougoei & oncle du dernier. On lui donna le titre de Kiuli-hou Tanjou.

Sfu-ki.
Кат-то.

fe

L'Empereur de la Chine, pour se garantir contre les enAvant J. C. treprises de ce nouveau Tanjou, fit élever au Nord-ouest Kiu-li-hou. de Yen-gan-fou un grand nombre de tours qui formoient une espèce de chaîne jufqu'au lac Sopou-nor en Tartarie. Mais quoiqu'il y mît des troupes pour les défendre, elles ne purent empêcher que dans la même année les Huns ne rentraffent dans la Chine par Ta-tum-fou, n'y fiffent beaucoup de ravages, n'enlevaffent un grand nombre d'hommes & de femmes, & ne détruififfent ces tours. Un autre corps de Huns qui entra par Kan-tcheou n'eut pas le même fuccès; il fut repouffé par les troupes Chinoises & obligé de s'en retourner avec perte, laiffant tout le butin qu'il avoit fait. Les Huns harcelerent encore une armée de Chinois commandée par Li-kuam-li, qui avoit été envoyé à la tête de cent mille hommes dans le pays de Ta-ouan entre Kafchgar & la Bactriane, c'est- à - dire aux environs de Seiram. J'ai déja rapporté que ce pays étoit renommé pour fes chevaux finguliers, qui, à ce qu'on prétend, avoient une fueur de fang, & auxquels en conféquence les Chinois donnoient le nom de Chevaux céHan-chou. leftes. L'Empereur Vou-ti avoit envoyé. dans ce pays un Ambaffadeur avec des fommes confidérables pour en acheter (a); mais le Roi de Ta-ouan, trop éloigné. des Chinois pour craindre qu'ils vinffent l'attaquer, avoit tué l'Ambaffadeur, & s'étoit emparé de tout ce qu'il avoit apporté. Dans ces dernieres années, Vou-ti, que la dif

L'an ioi.

(4) Les Hiftoriens difent mille piéces d'or & un cheval d'or.

tance

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