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*Sauvages & vagabonds, qui leur donna des loix, & qui appel» la cette terre Latium, parce qu'il s'y étoit caché pour éviter la » fureur de fon fils: c'eft fous fon regne qu'on dit qu'étoit le fiécle d'or. Mais qu'ils traitent ceci de fictions poëtiques, » & qu'ils difent s'ils veulent que le de Picus s'appelpere loit Stercé, & qu'il fut ainfi nommé à caufe qu'étant fort » bon Laboureur, il apprit aux hommes à amender la terre » avec du fumier, d'où vient que quelques-uns l'appellent Stercucé. Quoi qu'il en foit, c'eft pour cela qu'ils en ont fair le Dieu de l'Agriculture.

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Ryckius obferve judicieufement à ce fujet, que les anciens Latins, privés de l'ufage des lettres jufqu'au temps d'Evandre qui n'arriva en Italie que peu d'années avant la guerre de Troye, voyant dans ce pays tant de lieux qui portoient le nom de Saturne, crurent que c'étoit l'ancien qui y avoit regné.

Nous avons dit que c'étoit fous le regne de Janus & de Saturne, quel qu'il foit, qu'avoit été le fiécle d'or, fur lequel les Poëtes avoient donné l'effor à leur imagination : voici, fans parler des autres, ce qu'en dit Ovide : « On observoit alors les regles de la bonne foi & de la juftice, fans > y être contraints par les Loix. La crainte n'étoit point le motif qui faifoit agir les hommes: on ne connoiffoit point encore les fupplices. Dans cet heureux fiécle, il ne falloit -point graver fur l'airin ces loix menaçantes qui ont fervi dans la fuite de frein à la licence. On ne voyoit point en - ce temps-là de criminels trembler en préfence de leurs Juges: la fécurité où l'on vivoit, n'étoit point l'effet de » l'autorité que donnent les loix. Les arbres tirés des fo»rêts, n'avoient point encore été tranfportés dans un mon» de qui leur étoit inconnu : l'homme n'habitoit que

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la terre

où il avoit pris naiffance, & ne se servoit point de vaisseaux » pour s'expofer à la fureur des flots. Les villes, fans murailles ni foffés, étoient un afyle affûré. Les trompettes, » les cafques, l'épée étoient des chofes qu'on ne connoiffoit » pas encore, & le foldat étoit inutile pour affûrer aux Citoyens > une vie douce & tranquille. La terre, fans être déchirée

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(1) Prepar.

» par la charrue, fourniffoit toutes fortes de fruits; & fes ha bitans, fatisfaits des alimens qu'elle leur prefentoit fans être » cultivée, fe nourriffoient de fruits fauvages, ou du gland qui tomboit des chênes. Le Printemps regnoit pendant toute l'année; les doux zéphirs animoient de leur chaleur les fleurs qui naiffoient de la terre : les moiffons fe fuccedoient, fans qu'il fût befoin de labourer ni de femer. On voyoit de toutes parts couler les ruiffeaux de lait & de ne» &tar; & le miel fortoit en abondance du creux des chênes » & des autres arbres (a) ».

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Comme rien n'eft plus célébre dans l'Antiquité que ce fiécle d'or, je vais dire ce qui peut y avoir donné lieu. Les an ciens habitans du pays Latin menoient une vie fauvage, fans loix & prefque fans Religion, lorfque Janus y arriva. Ce Prince adoucit la férocité de leurs mœurs, les raffembla dans des villes & dans des villages, leur donna des Foix, & fous fon regne fes fujets jouirent d'un bonheur qu'ils ne connoiffoient pas: ce qui fit regarder le temps où il avoit regné comme un temps heureux & un fiécle d'or. Car voufoir le faire durer autant que la vie de Saturne, c'eft ce qu'on ne fçauroit foutenir. Jamais fiécle ne fut plus rempli de guerres & de carnage, & jamais le crime n'inonda la terre avec plus de fureur. Saturne pour monter fur le trône en chassa fon pere: Jupiter fon fils le traita précifément & à la lettre comme il avoit traité fon pere, & ce Prince n'affermit son trône que par la défaite & la perte de tous fes parens.

Eufebe (1), après avoir rapporté le Fragment de Sancholiv. i. c. io. niathon, fait à peu près la même reflexion. Voilà donc, ditil, l'Hiftoire de Chronos, ou de Saturne, voilà ce qu'il ya de véritable dans cette vie, qu'on place fous fon regne, & qui eft devenue fi célebre dans les Ouvrages des Auteurs Grecs: voilà. fes hommes qu'ils appellent πρῶτον χρύσεον τὸ γένος; la premiere race des mortels, la race de l'âge d'or, qui felon les Anciens a vécu fi heureufe dans les premiers fiécles du monde.

(a) Aurea prima fata eft ætas, quæ, vin

dice nullo

Sponte fua, fine lege, fidem rectumque

colebat,

Pana metufque aberant, &c. Ovid.
Met. Lib. I. Fab.3.

Ajoutons cependant que cette idée du fiécle d'or, étoit prife fans doute dans la tradition, qui portoit que nos premiers peres, ou du moins depuis Noé jufqu'à la féparation qui fe fit fous Phaleg, avoient vécu en commun, & mené une vie heureuse, eu égard aux temps qui fuivirent.

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Hiftoire d' Atlas, des Pléiades fes Filles, d'Hesperus, & des Hefperides.

IL y a peu

y a peu de perfonnages dans l'Antiquité qui fe foient rendus plus célébres qu'Atlas. Tous les Anciens conviennent qu'il a donné fon nom à cette montagne, ou plûtôt à cette chaîne de montagnes qui traverfent une partie de l'Afrique de l'Orient à l'Occident, jufqu'aux extrémités de ce continent; de même qu'à l'Ocean, & à l'Ifle Atlantique.

Suivant Héfiode (1), Atlas étoit fils de Japet, & de Cly- (1) Theog. mene fille de l'Ocean, & frere de Menoetius, de Promethée, d'Epimethée, tous Princes Titans, dont nous parlerons dans la fuite. « Atlas, dit ce Poëte, foutient le ciel fur »fes épaules, aux extrémités de la terre, dans le pays des Hefperides; & tel étoit le fort auquel Jupiter l'avoit defti

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né ». Apollodore (2), Diodore de Sicile, & tous les An- (2) Liv. 1. ciens conviennent auffi qu'Atlas étoit fils de Japet; mais le premier de ces deux Auteurs lui donne pour mere, Afia, autre fille de l'Ocean.

Nos Modernes toujours guidés par des étymologies qu'ils tirent des langues de l'Orient, ont abandonné les Anciens, & ont fait venir Atlas de la Phenicie, ou des pays voisins, dans l'extrémité de l'Afrique. C'eft ainfi qu'en parlent Bochart & Voffius (3). M. Fourmond l'aîné qui eft perfuadé (3) De Idol. qu'Abraham eft Saturne, croit qu'Atlas, eft le même que Lot. Mais fans entrer ici dans des difcuffions qu'on peur voir dans les Ouvrages de ces Sçavans, je crois pouvoir

L. I.

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m'en tenir à Diodore de Sicile, qui raconte ainfi l'hiftoire de ce célébre Titan.

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Après la mort d'Hyperion, les enfans d'Uranus partage»rent le Royaume entr'eux. Les deux plus célébres furent Atlas & Saturne. Les lieux maritimes étant échus

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par le

» fort à Atlas, ce Prince donna fon nom aux Atlantes fes fujets, & à la plus haute montagne de fon pays. On dit qu'il excelloit dans l'Aftrologie, & que ce fut lui qui le premier reprefenta le monde par une fphere. C'eft pour cet»te raifon qu'on a prétendu qu'Atlas portoit le ciel fur fes épaules; cette fable faifant une allufion fenfible à son invention. Il eut plusieurs enfans; mais Hefperus fe rendit » le plus remarquable de tous par fa pieté, par fa juftice, & par fa bonté. Celui-ci étant monté au plus haut du mont » Atlas pour obferver les Aftres, fut fubitement emporté par un vent impetueux, & on ne l'a pas vû depuis. Le peuple touché de fon fort, & se ressouvenant de fes vertus, lui dé» cerna des honneurs divins, & confacra fon nom en le donnant » à la plus brillante des Planetes Atlas fut auffi pere de fept filles, qui furent toutes appellées Atlantides, mais dont les » noms propres furent Maïa, Electre, Taygete, Afterope Merope, Alcyone, & Celano. Elles furent aimées des plus célébres d'entre les Dieux & les Heros, & elles en eurent des enfans qui devinrent dans la fuite auffi fameux que leurs peres, & qui furent les Chefs de bien des Peuples. Mais » T'aînée de toutes, eut de Jupiter un fils appellé Mercure, qui fut l'inventeur de plufieurs Arts. Les autres Atlantides » eurent auffi des enfans illuftres: car les uns donnerent l'origine à plusieurs nations, & les autres bâtirent des villes. » C'est pourquoi, non-feulement quelques barbares, mais même plufieurs Grecs, font defcendre leurs anciens Heros des Atlantides. On dit qu'elles furent très-intelligentes, & » que c'eft pour cette raifon que les hommes les regarderent » comme Déeffes après leur mort, & les placerent dans le ≫ ciel fous le nom de Pléïades. Ces Atlantides furent auffi » nommées Nymphes, parce que dans leur pays on appelloit » ainfi toutes les femmes.

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.

» Le

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Le même Auteur ajoute dans le Livre IV. (1)« que les My- (1) Ch. VII. thologues difoient que dans le pays appellé Hefperitis, » vivoient autrefois Atlas & Hefperus, tous deux freres, & » tous deux très-fameux : qu'Hefperus étant devenu pere d'u⚫ne fille nommée Hefperis, la donna en mariage à fon fre»re Atlas, & que ce fut de cette fille que le pays Hefperi»tis avoit pris fon nom. Atlas eut d'Hefperis fept filles, qui furent appellées Atlantides, du nom de leur pere, ou Hef perides, de celui de leur mere. Comme elles étoient d'une beauté & d'une fageffe peu communes, on dit que fur leur » réputation Bufiris Roi d'Efpagne conçut le deffein de s'en » rendre le maître, & qu'il commanda à des Pirates d'en» trer dans leur pays, de les enlever & de les lui amener. . Ces Pirates ayant trouvé dans un Jardin les filles d'Atlas qui s'y divertiffoient, fe faifirent d'elles; & s'étant enfuis: au plus vite dans leurs vaiffeaux, ils les embarquerent avec eux: mais Hercule les ayant furpris pendant le temps qu'ils mangeoient près du rivage, & ayant appris de ces jeunes Vierges le malheur qui leur étoit arrivé, il tua tous leurs raviffeurs & rendit enfuite les Atlantides à leur At, las. Ce Prince reconnoiffant donna à Hercule (a) les pom» mes qu'il étoit venu chercher.

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pere

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Les Mythologues avoit dit, le même Auteur au Chapitre précédent, font fort partagés au fujet de ces Pommes: » car les uns difent qu'il croiffoit effectivement des Pom»mes d'or en certains Jardins d'Afrique qui appartenoient » aux Hefperides; mais qu'elles étoient gardées par un épouvantable Dragon qui veilloit fans ceffe. D'autres prétendent que les Hefperides poffedoient de fi beaux troupeaux de brebis, que par une licence poëtique on leur avoit donné le furnom de dorées, comme on l'avoit donné à Venus » à cause de sa beauté. Quelques-uns enfin ont écrit que ces brebis étoient d'une couleur particuliere, qui tiroit fur l'or. » Ces derniers ajoutoient même, que par le Dragon il faut entendre le Pasteur qui gardoit ces brebis, homme très-fort (a) On parlera encore de ce voyage d'Hercule & du jardin des, Hefperides dans Thiftoire de ce Heros, Tome III.

Tome II.

P

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