Imágenes de páginas
PDF
EPUB

de ce Dieu leurs armes & leurs dépouilles.

Parmi les animaux le Lion, qui dans fes rugiffemens semible jetter du feu par la gueule, lui étoit confacré, & les chiens étoient destinés à la garde de fes Temples. Il en avoit plufieurs à Rome, mais le plus ancien, bâti par Romulus, étoit hors de l'enceinte de la ville, les Augures ayant crû que le Dieu du Feu ne devoit pas être dans la Ville même. Mais la plus grande marque de refpect que les Romains. avoient pour ce Dieu, étoit, felon Denys d'Halicarnaffe, que les Affemblées fe tenoient dans fes Temples, où l'on traitoit les affaires les plus graves de la République : les Romains ne croyant pas pouvoir invoquer rien de plus facré, pour affurer les décisions & les Traités qui s'y faifoient, que le Feu vengeur dont ce Dieu étoit le fymbole.

Comme on croyoit que Vulcain avoit enfeigné tous les ufages que les Ouvriers & les autres hommes peuvent faire du feu, tous ceux qui travailloient en métaux, ou pour parler plus jufte, tous les hommes en general offroient à ce Dieu des facrifices, en reconnoiffance d'un préfent fi avantageux; ainfi que nous l'apprend Diodore de Sicile (1).

(1) Lib, 5'.

On avoit auffi établi des Fêtes en fon honneur, dont la principale étoit celle pendant laquelle on couroit avec des torches allumées, qu'il falloit porter fans les éteindre jufqu'au but qu'on avoit marqué, fous peine d'infamie: celui qui en dévançoit un autre, avoit, felon Pline (2), fon flambeau pour (2) Liv. 18. récompenfe.

Les monumens anciens repréfentent ce Dieu d'une maniere assez uniforme ; & il y paroît toujours avec de la barbe, la chevelure un peu negligée, à demi-couvert d'un habit qui ne lui defcend qu'au-deffus du genou, portant un bonnet rond & pointu, tenant de la main droite un marteau, & de la gauche des tenailles. Comme on s'eft toujours efforcé de trouver des raisons myftiques dans ces fortes de représentations, Eusebe (3) dit que le nom d'Ephaftos marque la force (3) Prepar,› du feu, & que le bonnet qu'on lui donnoit, & qui étoit Evang.1.3 bleu, défignoit le circuit du Ciel, où le feu tient lieu de la

partie la plus fubtile.

A a iij

Quoique tous les Mythologues difent unanimement que Vulcain étoit boiteux, aucune des images de celles qui nous restent, ne le représente avec cette défectuofité: cependant Ciceron, dans fon premier Livre de la Nature des Dieux, parle ainfi d'une de fes ftatues : « Nous admirons ce Vulcain d'Athenes, fait par Alcamene; il eft debout & vétu, & paroît boiteux, mais fans aucune difformité ». La plupart des Medailles de l'Ifle de Lemnos représentoient ce Dieu avec la legende, Deo Volcano.

[ocr errors]
[ocr errors]

De tout ce que je viens de dire on peut conclure qu'il y a eu trois Vulcains; le premier & le plus ancien, eft le Tubalcain dont parle Moyfe, qui le met dans la dixiéme génération du côté de Caïn, & qui fut veritablement le premier qui inventa l'art de forger le fer. Sanchoniathon qui le met dans la feptiéme géneration, dit qu'avec cet art il inventa auffi l'appất, la ligne & la nacelle, & qu'après fa mort il fut honoré comme un Dieu, fous le nom de Diamithios. Il eft vrai que cet ancien Auteur le nomme auffi Chryfaor, & qu'on n'eft pas peu embarraffé à trouver dans ce Chryfaor Ephaftos, ou Vulcain, les Grecs faifant naître Chryfaor du fang de Mé dufe, comme nous le dirons dans l'hiftoire de cette Gorgone; mais M. Fourmont l'aîné croit avoir trouvé la veritable (1) Choref- origine de ce nom dans un mot Phenicien (1), qui veut dire celui qui travaille au feu, ou dans le feu.

canor.

Le fecond Vulcain étoit un ancien Dieu ou Roi d'Egypte; le troifiéme enfin, quelqu'un des Titans, qui par quelque mécontentement fe retira dans l'Ifle de Lemnos.

4738

D

CHAPITRE XIII.

Hiftoire de Mercure.

E tous les Dieux du Paganisme il n'en eft aucun qui ait eu tant d'emploi & tant d'occupation que Mercure. Les Grecs le nommoient Hermes, & ce nom fignifioit Interprete, ou felon Proclus, Mellager. Son nom Latin venoit, fi nous en croyons Feftus, des Marchands, ou plutôt des marchandises, Mercurius à mercibus. Interprete & miniftre fidéle des autres Dieux, & en particulier de Jupiter fon pere, il les fervoit avec un zele infatigable, même dans des emplois peu honnêtes. C'étoit lui qui étoit chargé du foin de conduire les ames des Morts dans les Enfers, & de les ramener. Il étoit outre cela le Dieu de l'Eloquence & de l'Art de bien parler ; celui des Voyageurs, des Marchands, & même des Filoux. Ambaffadeur & Plenipotentiaire des Dieux; il fe trouvoit dans tous les Traités de paix & d'alliance. Tantôt on le voit accompagner Junon, ou pour la garder ou pour veiller à fa conduite; tantôt Jupiter l'envoye pour entamer quelque intrigue avec quelque nouvelle maitreffe. Ici c'eft lui qui tranfporte Caftor & Pollux à Pallene. Là il accompagne le char de Pluton, lorsqu'il enleve Proferpine; embarraffés de la querelle mûe entre trois Déeffes au fujet de la beauté, les Dieux l'envoyent avec elles au berger Paris. Tant de fonctions différentes ont fait croire qu'il y avoit eu plufieurs Mercures, & qu'on avoit attribué au feul fils de Jupiter, des attributs qu'il auroit fallu partager entre plusieurs Dieux du même nom.

Les Mythologues en effet reconnoiffent plufieurs Mercures. Lactance le Grammairien en compte quatre; l'un fils de Jupiter & de Maïa, le fecond, du Ciel & du Jour ; le troifiéme, de Liber ou Bacchus, & de Proferpine; le quatriéme, de Jupiter & de Cyllene, qui tua Argus, & qui

(1) Le jour eft mis la pour

Dies au femi-
Bir.

(2) De Nat. Deor. 1. 2.

s'enfuit enfuite, difent les Grecs, en Egypte, où il donna la connoiffance des lettres aux Egyptiens. Celui que la plûpart des Anciens reconnoiffent, & à qui les Poëtes attribuent toutes les actions qui paffent fous le nom de Mercure, eft le fils de Jupiter & de Maïa ; c'eft à lui principalement qu'on bâtiffoit des Temples, & qu'on dreffoit des Autels & des ftatues.

[ocr errors]

Suivant Ciceron il y en avoit cinq: « l'un fils du Ciel & du Jour (1); un autre, fils de Valens & de Phoronis : c'est celui qui fe tient fous la terre, & qui s'appelle Trophonius ; le troisiéme eft fils de Jupiter & de Maïa ; ce Jupiter » eft le troifiéme entre les Jupiters que l'on compte; c'eft de >>ce Mercure & de Penelope qu'on dit que Pan eft né. Le quatriéme eft fils du Nil, que les Egyptiens croyent qu'il » n'eft pas permis de nommer. Le cinquième, que les Phe»neates honorent, eft celui qui tua, dit-on, Argus, & qui » pour cette raison, obtint l'empire de l'Egypte, & donna aux Egyptiens des Loix, & la connoiffance des Lettres (a).

[ocr errors]

Sans s'embarraffer de quelle maniere on pourroit réduire à un moindre nombre tant de Mercures, dont quelques-uns paroiffent avoir le même pere ou la même mere, je crois pouvoir foutenir qu'il n'y en eut jamais que deux ; car pour celui qui eut Pan de Penelope, & qu'Herodote dit avoir vêcu environ huit cens ans avant lui, c'eft-à-direvers le temps de la guerre de Troye, il y a bien de l'apparence que c'étoit quelque Prêtre de ce Dieu qui avoit féduit cette jeune Princeffe. Je ne reconnois donc que l'ancien Mercure, ou le Thot, ou Thaut des Egyptiens, qui étoit contemporain d'Ofiris ; & celui qui, felon Hefiode, étoit fils de Jupiter & de Maïa; c'eft de ces deux-là que je vais donner l'histoire. Il n'y a point de perfonnage, fans en excepter aucun, dans l'Antiquité profane,plus célebre que le Mercure Egyptien.

(a) Mercurius unus, inquit Cicero (1), | calo parre Die matre natus, cujus obfca nius excitata natura traditur quod afpectu Proferpinæ commotus fit: alter Valentis & Phoronidis filius, is qui fub terris habetur, idem Trophonius. Tertius Jove tertio natus

& Maia, ex quo & Penelopa Pana natum ferunt.Quartus Nilo patre, quem Ægyptii nefas habent nominare. Quintus, quem colunt Pheneata, qui Argum dicitur interfe ciffe, ob eamque caufam Egypto prafuiffe, atque Ægyptiis leges & litteras tradidiffe

liv. 1. &c.

Il étoit l'ame du Confeil d'Ofiris (1), qui s'en fervit dans (1) Voyez les affaires les plus délicates, & qui avant fon départ pour Herod. Diod. la conquête des Indes, le laiffa à Ifis qu'il avoit nommée regente du Royaume, comme l'homme le plus propre à la fervir dans l'administration de l'Etat. Ne fe contentant pas de donner des confeils à la Reine, ce Miniftre fidéle s'appliqua à faire fleurir les Arts & le Commerce dans toute l'Egypte. Occupé des Sciences les plus fublimes, il acquit de profondes connoiffances dans les Mathematiques, furtout dans la Geométrie, & apprit aux Egyptiens la maniere de mefurer leurs terres, dont les limites étoient fouvent dérangées par les accroiffemens du Nil, afin que chacun pût reconnoître la portion qui lui appartenoit. Enfin il y eut peu de Sciences dans lefquelles il ne fit de grands progrès; & ce fut lui en particulier qui inventa l'ufage de ces lettres myftérieuses qu'on appelle hyeroglyphiques, & qui ne fervirent dans la fuite que dans les matieres qui concernoient la Religion. Diodore de Sicile ajoute à ces traits (2) : « qu'Ofiris l'ho- (2) Liv. Ï¿ »nora beaucoup, parce qu'il le vit doué d'un talent extraor dinaire pour tout ce qui peut aller au bien de la focieté humaine. En effet Mercure forma le premier une langue exacte & reglée, des dialectes groffiers & incertains dont » on fe fervoit. Il impofa des noms à une infinité de choses d'ufage, qui n'en avoient point. Il inventa les premiers caracteres, & regla jufqu'à l'harmonie des mots & des phrafes. Il inftitua plufieurs pratiques touchant les facrifices & les autres parties du culte des Dieux, & il donna aux hom»mes les premiers principes de l'Aftronomie. Il leur propofa enfuite pour divertiffement la lutte & la danfe, & >> leur fit concevoir quelle force, & même quelle grace le corps humain peut tirer de ces exercices. Il imagina la lyre, dans laquelle il mit trois cordes par allufion aux trois faifons de l'année : car ces trois cordes rendant trois fons, grave, l'aigu & le moyen; le grave repond à l'Hyver, le moyen au Printemps, & l'aigu à l'Eté. C'eft lui qui apprit > l'interpretation ou l'élocution aux Grecs, qui pour cette raifon l'ont appellé Hermès, ou l'Interprete. Il a été le confident Bb

[ocr errors]

B

[ocr errors]
[ocr errors]
[ocr errors]
[ocr errors]
[ocr errors]

20

Tome II.

le

« AnteriorContinuar »