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(1) In Pyrrho.

Spect. c. 9.

de l'Aftronomie, comme il eft aifé de s'en appercevoir en lifant Ovide. Car fans vouloir entrer ici dans un trop long détail, on voit bien que lorsque ce Poëte dit que Phaeton, à la vue du Signe du Scorpion, abandonna le Chariot, il a voulu nous marquer que l'événement dont il s'agit, étoit arrivé dans le mois où le Soleil eft dans ce Signe.

Enfin fi toutes ces explications ne font pas adoptées, on peut s'en tenir à celle de Plutarque (1), & de Tzetzès, qui difent qu'il y a eu véritablement un Phaeton qui regna fur les

s'étoffes, & qui fe noya dans le Pô; que ce Prince

s'étoit appliqué à l'Aftronomie, & qu'il avoit prédit cette grande chaleur qui arriva de fon temps, & qui défola tout fon Royaume.

Ces deux Auteurs ont fans doute fuivi le fentiment de Lucien, qui après avoir raillé agéablement fur cette fable dans un de fes Dialogues, dit fort férieufement dans le Traité de l'Aftronomie, que ce qui a donné lieu à cette fiction, c'eft que Phaeton s'étoit fort adonné à l'Aftronomie, & s'étoit appliqué fur-tout à connoître le cours du Soleil; mais qu'étant mort fort jeune, il avoit laiffé fes Obfervations imparfaites; ce qui fit dire à quelque Poëte qu'il n'avoit pas pu conduire de char du Soleil jufqu'à la fin de fa carriere.

L'Antiquité nous a laiffé quelques monumens de cette fa ble: le premier, qui est tiré du Cabinet du Chevalier Maffei, reprefente Phaeton mort & étendu, pendant que le char encore entier eft au milieu des airs. Ce Monument a deux chofes fort fingulieres: l'une, que le char n'eft conduit que par deux Chevaux, contre l'opinion commune qui lui en donne (2) Liv. des quatre. Les Anciens au rapport de Tertulien (2), diftinguoient en cela le Char du Soleil d'avec celui de la Lune; le premier étant toujours tiré par quatre chevaux, & le fecond par deux feulement. L'autre Monument eft tiré du Cabinet de Meffieurs de Charlet. Le champ repréfente des flammes, le char brifé, dont on ne voit qu'une roue, Phaeton mort, & les chevaux en grand défordre. On'y voit auffi à côté d'un des chevaux, deux Oifeaux avec des huppes fur la tête, qu'on prend pour deux Cygnes, & on croit que le Sculpteur

a voulu peindre en même temps la Métamorphofe de Cygnus Roi de Ligurie. Cependant à dire vrai, ces deux Oifeaux ne reffemblent point à des Cygnes. L'Ouvrier a trop bien deffiné le refte de l'Ouvrage, pour croire qu'il fe foit fi groffierement mépris en reprefentant des Cygnes. Ce font là de ces énigmes qu'on ne trouve que trop fouvent dans les Antiques, & qu'il eft fort inutile de vouloir pénétrer. Dans le troifiéme Monument, qui eft tiré de Beger, Phaeton eft mone té fur un Char, & les chevaux en défordre, annoncent une chute prochaine. Ce Monument a cela de fingulier, que les Heliades fœcurs de Phaeton, y paroiffent fur le bord d'un fleuve dans le moment qu'elles commencent à être changées en Peupliers. Le Cygne qui eft auprès fait voir que le Scul pteur a voulu raffembler toutes les circonftances de cette fable. Mais je dois remarquer qu'Apollonius de Rhodes (1) raconte fur ce fajet une particularité qu'on ne trouve point Argonautes. dans les autres Poëtes; fçavoir, que Peau de l'Eridan fut fi infectée par l'embrafement, & par la foudre que Jupiter lança contre Phaëton, que les Oifeaux qui voloient fur ce fleuve n'en pouvant fupporter la puanteur, y tomboient morts.

Pour ce qui regarde la metamorphofe des trois foeurs de Phaeton, Phoebé, Lampetie, & Eglé, on peut dire que ces Princeffes moururent en effet de regret fur le Pô, où elles étoient allées pleurer le malheur de leur frere; & que leur metamorphofe n'eft qu'un ornement poëtique, ainfi que ce qu'on dit de leurs larmes qui furent changées en ambre, parce qu'il dégoute des Peupliers une espece de gomme qui reffemble affez à l'ambre jaune. On doit penfer de même de la métamorphofe de Cygnus Roi de Ligurie, fon frere, que la rèffemblance des noms a fait changer en Cygne.

Les Anciens ne font pas d'accord fur la nature du changement des Heliades ; quoique l'opinion la plus commune foit qu'elles furent metamorphofées en Peupliers: Virgile (a) fait dire dans une de fes Eglogues à Silene, qu'elles furent changées en Aulnes; cependant dans le dixiéme Livre de

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(a) Tum Phaetontiadas musco circumdat amaræ Corticis, &c. Virg. Ecl. 6.

(1) Liv. des

l'Eneïde, il revient au fentiment commun, puifqu'il nous ap prend que Cygnus paffoit ses jours à déplorer la perte de fon cher Phaeton à l'ombre des Peupliers, en quoi les fœurs de ce malheureux Prince avoient été changées (a). Il y avoit encore à ce fujet une troifiéme opinion, qui les faifoit changer en Larix, arbre femblable au Pin, & dont la gomme eft une efpece de Terebentine. La famille Accoleia, originaire des environs du Pô, felon Fulvius Urfinus, avoit pris à caufe de cela le furnom de Larifcola; & dans la Medaille qui nous refte de cette famille, qui eft rapportée auffi dans Vaillant, on voit d'un côté la tête d'une femme, que les Auteurs croient être celle de Clymene, mere de Phaëton, avec cette Infcription, P. Accoleius Larifcola, & au revers, trois femmes metamorphofées en Larix, qui font les trois fœurs de (1) Liv. 2. Phaëton. Vitruve (1) & Pline (2) difent que le Larix ne fe trouve qu'aux environs du Pô; qu'il jette une gomme, & qu'il ne (2) Liv. 1.6. brûle point; c'est-à-dire, qu'il brûle difficilement, à cause des fucs humides dont il eft chargé, & non pas, comme (3) Liv. 12. le rapporte Palladius (3) fur la foi de quelqu'Ancien, par la haine qu'il avoit contre le feu qui avoit confumé fon frere.

C. 9.

C. 10.

C. 15

Me feroit-il permis de hazarder une conjecture fur toute cette fable, & dire qu'elle vient des Pays du Nord, & que le fleuve Reidan, qui après avoir coulé dans la Pruffe, fe jette dans la mer Baltique, a donné lieu à la plupart des circonftances qui la compofent. En effet, il y a fur les bords de ce fleuve une quantité prodigieufe de Peupliers, & de Cygnes qui viennent au Printemps y faire leurs couvées. L'endroit où il se décharge dans la mer, eft connu par l'ambre jaune qui s'y trouve, & qui fait un gros revenu au Prince qui gouverne cet Etat, & ne fe trouve que dans ce Pays-là, & nullement fur le Pô. Il n'eft pas étonnant que ce que que ce que la tradition apprenoit de ce fleuve, ait fait nommer le Pô, Eridan; ces deux mots fe reffemblant trop, pour ne le pas croire.

Les Illes Electrides qu'Apollonius de Rhodes, dans fon Voyage des Argonautes, fait trouver dans la mer Adriatique vers l'embouchre du Pô, font une fiction : l'ambre ne se

(b) Populeas inter frondes umbramque Sororum Dum canit, &c. Idem Æneid. 1. 10.

trouve ni fur ce fleuve, ni dans ces prétendues Ifles ; en quoi je ne fais que fuivre le fentiment de Pline (a). Ce.que rapporte Lucien (1), fert auffi beaucoup à confirmer ma conjec- (1) De Cyture. Il raconte qu'étant allé fur le Pô dans le deffein d'y gnis. chercher de l'ambre, des Peupliers, & des Cygnes, les habitans du pays lui répondirent, qu'il n'y avoit fur ce fleuve ni Cygnes, ni Peupliers, ni ambre; & il ajoute qu'ayant voulu expliquer à quelque Batelier la fable de Phaeton & de fes foeurs, il s'étoit mocqué de lui, l'affûrant qu'il n'en avoit jamais oui parler.

Pour éclaircir maintenant ce que nous avons dit de Cygnus, il eft bon d'avertir que l'Hiftoire ancienne fait mention de fix perfonnes de ce nom Le premier étoit fils de Mars: Hercule monté fur le cheval Arion le vainquit, dont ce Dieu fut fi courroucé, qu'il voulut fe battre contre le vainqueur de fon fils; mais Jupiter les fépara d'un coup de foudre.

Le fecond étoit fils de Neptune, & étoit invulnerable; ce fut celui qu'Achille étouffa près de Troye.

Le troifiéme étoit fils d'Hieres & fut changé en oiseau de ce nom (2).

Le quatrième étoit cet ami de Phaëton, qui déplorant sa mort fut auffi changé en Cygne (3).

Le cinquiéme ne nous eft connu que par fon avanture racontée dans Paufanias. Le fixiéme enfin, l'eft par Conon dans Photius (4).

(a) Juxta eas, Electrides, vocavere, in quibus proveniret fuccinum, quod illi electrum appellant, vanitatis Græca cer

tiffimum documentum; adeo ut quas ea-
rum defignent haud unquam conftiterit.
Plin. liv. 3.

(2) Ovid. Met. 1.2.

(3) Virgil. En. 1. 10.

32.

(4) Narr.

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JA!

CHAPITRE X V.

Hiftoire d'Apollon..

A dit au commencement du Chapitre précedent que: les Anciens avoient fait deux Divinités différentes du So-leil & d'Apollon; cependant quand celui-ci fut devenu chez les Grecs & les Romains le fymbole du Soleil, la distinction difparut peu à peu, & on ne le regarda plus que comme le Soleil lui-même. Il me refte maintenant à expofer ce que la Mythologie de ces deux Peuples nous apprend à fon fujet. Ciceron diftingue quatre Apollons. Le premier, fils de Vulcain, étoit le Dieu tutelaire des Atheniens; le fecond étoit fils de Corybante, & natif de Crete, lequel, dit-on, eut guerre avec Jupiter même, pour cette Ifle-là. Le troifiéme, qui paffa du pays des Hyperboréens à Delphes., étoit fils du troifiéme Jupiter & de Latone. Le quatrième étoit d'Arca→ die, & a été appellé Nomion, parce qu'il avoit donné des Loix aux Arcadiens.

I paroît que Ciceron a pris ces quatre Apollons pour des perfonnages réels, puifqu'il en rapporte les genealogies: ce(1)De Orig. pendant Voffius (1) ne regarde ce Dieu que comme un perprogr. Idol. fonnage metaphorique, & foutient qu'il n'y eut jamais d'autre Apollon que le Soleil: voici les raifons fur lefquelles il fe fonde. Si l'on a fait paffer Apollon, dit-il, pour être le fils de Jupiter, c'eft que ce Dieu fut toujours regardé par les Anciens comme l'auteur du monde. On a dit que fa mere s'appelloit Latone, nom qui fignifie caché, parce qu'avant que le Soleil fût créé, tout étoit caché dans l'obfcurité du Chaos. On ajoute qu'il nâquit à Delos, nom qui fignifie manifeftation, parce que la lumiere de cet Aftre éclaire toute la terre. Si on représente ce Dieu toujours jeune & fans barbe, c'eft que le Soleil ne vieillit point, & ne s'affoiblit point. Que peuvent fignifier fon arc & fes fleches, que fes rayons? Il

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