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Rom. Ant.

cet Antiquaire, la grande victoire navale de Démetrius Poliorcetès fur Ptolomée, que décrit Plutarque. Enfin un basrelief d'une très-grande beauté (1), nous préfente Neptu- (1) Admir ne enlevant une jeune fille, qu'il emporte fur fes chevaux marins. L'amour, à qui ce Dieu a abandonné fon trident, s'en fert pour animer fes chevaux dont il y en a un qui tient la queue d'un dauphin dans fa bouche. Deux jeunes filles paroiffent fur le rivage prier Neptune de leur rendre leur compagne. Les Mythologues qui parlent tant des amours de ce Dieu & de fes différentes métamorphofes, ne difent rien que je fçache de cet enlevement.

Mais il ne faut pas confondre Neptune avec Taras fon fils, qui paroît fur les médailles des Tarentins avec les fymboles de fon pere. La ville de Tarente en Italie, que les Grecs nomment Taras, rapportoit fon origine au fils de ce Dieu, qui en avoit jetté les premiers fondemens. Les Tarentins en reconnoiffance le repréfentoient fur leurs médaillés (2) fous la forme d'un Dieu marin, monté fur un dauphin, (2) Voy.Be & tenant ordinairement à la main le trident de fon pere: je ger, Trefor de dis ordinairement, car quelquefois il a à la place, la maffue d'Hercule, fymbole de la force; ou une chouette, pour défigner Minerve protectrice des Tarentins; ou une couronne pour faire allusion à fes conquêtes; ou avec la corne d'abondance, , pour fignifier la bonté du pays où il avoit bâti la ville de Tarente; ou enfin avec un pot à deux anfes, & une grape de raisin avec le thyrfe de Bacchus, fymbole de l'abondance du vin chez les Tarentins.

Brandebourg.

gon.

(i) Theo

N

CHAPITRE V.

Nerée, les Neréides, Doris & Triton.

ERE'E, que tous les Anciens mettent au nombre des Dieux de la Mer, étoit felon Hefiode (1), fils de l'Ocean & de Tethys. Apollodore (2) lui donne l'Ocean pour (2) Liv. 1. pere, & pour mere la Terre, & d'autres Mythologues le font fils de Neptune. Hefiode loue beaucoup ce Nérée qui étoit felon lui un vieillard doux & pacifique, qui aimoit la justice & la moderation. Les Anciens ont recherché la raifon pourquoi ce Poëte, ainfi que l'auteur d'un Hymne qu'on attribue à Orphée, fe font étendus fur les louanges de ce Dieu marin. Le Diacre Jean en rapporte une raifon aussi ridicule que fauffe; c'eft, dit-il, que les Marins, qui ont tou jours la mort préfente devant les yeux, font ordinairement gens de bien; mais malheureusement c'eft tout le contraire. Le bon Diacre, comme le remarque M. le Clerc, qui habitoit dans un lieu loin de la Mer, n'avoit jamais vû ni navigateurs ni matelots, & en parle comme nous parlons des habitans de la Lune. Ce fçavant Critique a dohc recours à la langue des Pheniciens, dans laquelle les mots, Nahae Noae, d'où le nom de Nerée a été formé, fignifient briller, éclairer, ce qui rapporté à l'homme, veut dire, fçavoir, avoir de l'intelligence, être fage (a).

.te,

Quoiqu'il en foit, tous conviennent avec Hefiode, qu'il époufa fa foeur Doris, & qu'il en eut les cinquante Neréïdes, dont voici les noms. Proto, Eucrate, Sao, AmphitriEudore, Thetis, Galené, Glaucé, Cymothoé, Speo, Thalie, Melite, Eulimene, Agavé, Pafithée, Erato, Eunicé, Doto, Pherufa, Dynamene, Nefée, Actée, Protomedée, Doris, Panope, Galatée, Hippothoé, Hipponoé, Cymodocé, Cymatolege, Amphitrite, Cymo, Etone,

(a) Voyez la Note de M. le Clerc fur le vers 233. de la Theogon. d'Hesiode,

Halimede, Glauconomé, Pontoporia, Liagore, Evagore, Laomedée, Polynomé, Autonomé, Lyfianaffe, Evarné, Pfamathé, Menippe, Nyfo, Eupompe, Themifto, Pronoé Nemertès. On trouve dans cette lifte, faite fur Hefiode deux fois Amphitrite, parce qu'il y a deux Néréïdes de ce nom, qui different en quantité, de quelques fyllabes.

Homere (1) en rapporte les noms un peu différemment, (1) Iliad. L & n'en nomme que trente-trois; les autres, dit-il, étant 18. reftées au fond de la mer : Glaucé, Thalie, Cymodocé, Nefa , Spio, Thoa, Halia, Cymothoa, Actea, Limnoria, Melita, Jera, Amphithoé, Agavé, Doto, Proto, Pherufa, Dynamene, Dexamene, Amphinome, Callianira, Doris, Panope, Galatée, Nemertis, Apfeudès, Callianaffe, Clymene', Janire, Janeffe, Mære, Orithye, Amathie. Ces noms, au refte, prefque tous tirés de la Langue Grecque, convienment parfaitement à des Divinités de la Mer, puisqu'ils expriment les flots, les vagues, les tempêtes, la bonace, les Rades, les Ifles, les Ports, &c.

Toute l'Antiquité convient que Nerée excelloit dans l'art de connoître l'avenir. Il prédit à Paris la guerre que l'enlevement d'Helene devoit attirer fur fa patrie (2), & il apprit (2) Iliad: L Hercule où étoient les pommes d'or qu'Euryfthée lui avoit 6. ordonné d'aller chercher. Il voulut, dit-on, fe changer en plufieurs figures, pour s'empêcher de donner cet éclairciffement au Prince Grec ; mais celui-ci le retint jusqu'à ce qu'il eût repris fa premiere forme. Apollodore nous apprend que Nerée faifoit fon féjour ordinaire dans la mer Egée (3), où il étoit environné de Neréïdes qui le divertiffoient par leurs chants & leurs danfes (4). Auffi Paufanias (5) croit que le (4) Orphée, vieillard qu'honoroient les Gytheates, & qui felon eux avoit Hymn. in Nefon palais dans la mer, n'étoit autre que Nerée ; & il cite, pour le prouver, les trois vers d'Homere, que M. l'Abbé Gedoyn a traduit ainsi :

Pour vous, Nymphes, rentrez dans vos grottes profondes,

(3) L. 4. Arg.

reid.

(5) In Lac,

Un vieillard fortuné vous attend fous les ondes:

Allez revoir Nerée, & briller à sa Cour.

Il est évident qu'il y a beaucoup de Physique mêlée dans cette Fable, les Poëtes ayant pris fouvent Nerée pour l'eau même, que fon nom fignifie. Hefychius en effet le dérive de vapès, qui veut dire, coulant ; mais je crois cependant que le fond de la fable nous repréfente quelqu'ancien Prince de ce nom, qui fe rendit fameux fur la mer, & qui perfectionna fi fort la navigation, qu'on venoit le confulter de toutes parts fur les dangers des voyages maritimes. Ces pretendues métamorphofes, & ces figures différentes qu'il prenoit pour se défaire de ceux qui venoient le confulter, ne font que 'des fymboles qui nous marquent qu'il étoit fin & rufé, fage & prévoyant, comme nous le dirons dans un mo() V. Na- ment de Protée. Quelques Auteurs (1) cependant ont crû que Nerée avoit été l'inventeur de l'Hydromancie, ou de la fcience de prédire l'avenir par de l'eau ; & que le moyen c'eft pour cela qu'on le représente comme un grand Devin, & peut-être même que ce n'eft que pour cette raifon qu'il a été mis au nombre des Divinités de la Mer. M. le Clerc (2) Sur He- confirme ce fentiment (2) par une heureuse conjecture, faifant venir le mot de Nerée de la langue Hébraique, dans laquelle il fignifie Prophete, videns, & c'eft ce qui l'a fait re garder par tous les Anciens comme un homme habile dans T'art de prédire l'avenir; ce qu'Horace exprime ainfi

tal. Com.

Liode.

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Ainfi
pour entendre cette fable, il faut diftinguer deux Ne-
rées; l'un Poëtique, dont les fables ne font fondées que fur
les étymologies de fon nom; l'autre réel, dont l'hiftoire a été
chargée d'idées poëtiques.

Mais que devons-nous penfer des Néréïdes fes filles ? doiton les regarder comme des perfonnages métaphoriques, ainfi que leurs noms le fignifient, ou comme des perfonnes réelles? Je conviens, 1°. Que les Neréïdes, que nomment Hefiode & Homere, ne font la plupart que des Etres poëtiques, mais qu'il y en a qui ont exifté veritablement, telle que Caffiopé mere d'Andromede, Pfammathé mere de Phoque,

laquelle

du

Jaquelle, felon Paufanias, étant allée dans le pays voifin da Parnaffe, lui donna fon nom; ce pays en effet a depuis été appellé la Phocide; Thetis mere d'Achille, & quelques autres. Mais 2°. il faut convenir auffi qu'on a donné le nom de Neréïdes à des Princeffes qui habitoient, ou dans quelques Ifles, ou fur les côtes de la mer, ou qui fe rendirent fameufes par l'établissement du commerce où de la navigation. On le transporta enfuite, non-feulement à quelques perfonnages poëtiques, & dont l'existence n'est dûe qu'à des étymologies conformes aux qualités de leurs noms ; mais aussi à certains poiffons qui ont la partie fuperieure du corps à peu près femblable à celui d'une femme.

Pline dit que du temps de Tibere on vit fur le rivage de la Mer une Néréïde, telle que les Poëtes les représentent (a), & qu'un Ambaffadeur de Gaule avoit dit à Augufte, qu'on avoit vû fur les bords de la Mer plufieurs Néreïdes mortes. Albert le Grand (b), & quelques autres, parlent fouvent de pareils prodiges.

On publioit la même chofe des Tritons que les Poëtes repréfentent comme des monftres, ayant la moitié du corps d'un homme & l'autre d'un poiffon, avec une conque à la main, dont ils font retentir le rivage (c). Lorfque ce nom étoit pris au fingulier, il marquoit celui des Tritons qui précedoit toujours Neptune, dont il annonçoit l'arrivée au fon de fa conque, & qui a paffé à caufe de cela pour être le Trompette de ce Dieu. Hefiode, qui en a donné la genealogie, dit qu'il étoit fils de Neptune & d'Amphitrite; Virgile & Ovide en ont fait le portrait (d). Pline rapporte qu'on écrivit à Tibere, qu'on en avoit vû un près de Lifbone, fonnant de

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