Imágenes de páginas
PDF
EPUB
[merged small][ocr errors]

comme le dérangement des mois & des faifons étoit cause par le défaut de l'ancien Calendrier, après qu'on l'eut réfor mé, la Fête de la fondation de Rome fe trouva avec celle de Palès fixée au 21. d'Avril.

Les Latins connoiffoient encore une autre Divinité cham pêtre, qu'ils nommoient Anna Perenna, que quelques Auteurs croyent être la fœur de Didon, fi celebre dans le quatriéme de l'Eneide & qui fe retira dans le pays des Laurentins où Enée la reçut. Mais comme elle craignoit que Lavinie ne voulût lui ôter la vie, elle fe jetta dans le fleuve Numicus, dont elle devint une des Nymphes. D'autres penfent que c'étoit la Lune elle-même qui avoit pris le nom d'Anna, de l'année, ab anno, parce que l'année étoit com pofée de mois Lunaires. Mais la plus commune opinion est que c'étoit une bonne femme de la campagne qui apporta quelques gâteaux au Peuple Romain dans le temps qu'il s'étoit retiré fur le mont Aventin, lequel en reconnoissance voulut que fon nom fût éternellement honoré; & c'est à rennitate cultas, qu'elle prit le furnom de Perenna. Je la compte au nombre des Divinités de la campagne, fur l'autorité de Varron qui la met dans le même rang que Palès, Cerès, &c=(a) Sa Fête étoit celebrée avec folemnité aux Ides de Mars, fur les bords du Tybre, pendant laquelle le Peuple donnoit de grands témoignages de réjouiffance, comme on le verra dans les vers que cite Ovide (b): on y buvoit largement, on y danfoit, & les jolies filles y chantoient des vers dans lef quels la pudeur n'étoit pas ménagée. Mais auffi faifoit-on allusion à une avanture galante qu'Ŏvide rapporte dans le même

(a) Varron dans fa Satyre Menipée,
avoit mis ces deux vers, qu'Aulu: Ġelle
liv. 13. ch. 21. nous a confervés, & que.
Louis Carrion dans fon Commentaire fur
les Antiquités, Leçon premiere, dit qu'il
faut lire ainfi:

Ted, Anna Perenna, Panda, te Lato,
Pales,

Nerienes & Minerva., Fortuna ac

Ceres.

pe

[blocks in formation]

endroit. Anna, dit-il, ayant été reçue dans le ciel, Mars qui étoit amoureux de Minerve, pria la nouvelle Déeffe de le fervir dans fes amours: celle-ci à qui le Dieu de la guerre n'étoit pas indifferent, lui ayant promis ce qu'il fouhaitoit, vint lui dire un jour que Minerve confentoit à l'époufer; & ayant pris un habit semblable à celui de la Déeffe, elle se trouva au rendez-vous; mais elle fut la dupe de fon déguisement, qui fut découvert (a).

Comme Palès étoit la Déeffe des Troupeaux & des Bergers qui les gardoient, Bubona ou Burona étoit celle des boeufs & des Bouviers (1). On lui facrifioit d'une maniere (1) Auguft. champêtre, & on Finvoquoit pour la fanté des bœufs. Mellona, autre Divinité champêtre, prenoit foin des Abeilles, & du miel qu'on en retiroit (2).

On invoquoit auffi pour la même chofe, Ariftée, celui-là même qui a donné lieu à ce bel Episode du quatriéme des Georgiques, que Virgile a embelli de tous les ornemens de la Poefie. On croit que cet Ariftée à qui Virgile donne pour mere la Nymphe Cyrené, étoit Roi d'Arcadie, & qu'il s'appliqua au foin que demandent les Mouches à miel, dont il fçavoit reparer les pertes. Ce que le Poëte que je viens de citer dit, qu'à l'occafion d'une maladie qui avoit fait périr tous fes Effains, il alla trouver fa mere dans la grote profonde qu'elle habitoit à la fource du Penée, & qu'elle le renvoya au fage Protée; ainsi que la maniere dont ce Dieu lui dit qu'il pouvoit reparer cette perte, ne font que d'ingenieu fes fictions qui nous cachent l'adreffe qu'avoit ce Prince à conferver & à faire renouveller fes Abeilles. Quoiqu'il en foit, Ariftée fut mis au rang des Demi-Dieux, & en reçut: les honneurs.

Seia & Segecia ou Segefta, étoient deux autres Divinités de la campagne, qui avoient foin des bleds, & que les Labou reurs honoroient d'un culte particulier; avec cette difference

[blocks in formation]

de Civit. Dei lib. 6.

(2) Idiz. ib

(1) Idem.1.4.

(2) Liv. 18.

que la premiere veilloit à la confervation des grains dans le temps qu'ils étoient encore enfermés dans la terre, & la feconde au temps de la moiffon, comme Tutilina, ou Tutelina en avoit foin lorfqu'ils étoient dans les greniers (1). Turnebe croit que c'étoit cette Déeffe, dont il n'étoit pas permis de proférer le nom, de laquelle Pline fait mention (2). Macrobe dit (3) que ceux qui invoquoient cette Divinité, s'abftenoient (3) Sat.1.1. de tout travail le jour qu'ils lui facrifioient. Elle avoit une Chapelle fur le mont Aventin, & une ftatue dans le Cirque. Quelques Auteurs donnent à la même Déeffe le nom de Titulina, & Scaliger fur l'autorité de Varron, dit qu'on lui avoit confacré un Autel fur le mont Aventin, comme à une Divinité protectrice du Peuple Romain.

€. 2.

C. 16.

[ocr errors]

(4) De Civ.

Dei. lib. 4.

C. 21.

Robigus, qui tire fon nom du mot latin robigo ou rubigo, qui fignifie la rouille, étoit encore une Divinité qu'on invoquoit pour la confervation des bleds, qu'on croyoit qu'il préfervoit de la rouille; il y avoit une Fête en l'honneur de ce Dieu, que l'on appelloit Robigalia. Varron en parle fouvent dans fon cinquiéme Livre de la langue Latine, auffi - bien que dans celui de l'Agriculture. Quoique tous les autres Auteurs l'ayent regardé comme un Dieu, Saint Auguftin en fait Cependant une Déeffe, qu'il nomme Robigo (4).

Bonus Eventus, le Bon Succès, a auffi été honoré par l'An(5) Liv. 35. tiquité, d'un culte particulier. Pline rapporte (5) que la statue de ce Dieu avoit été faite par Euphranor, tenant une coupe de la main droite, & de la gauche un épi de bled & un pavot. Le même Auteur dit encore que Praxitelle avoit auffi fait une statue du même Dieu dans le Capitole : & Varron qui fait mention de cette Divinité (6), le met au nombre des grands de Re ruftic. Dieux des gens de la campagne. Plufieurs perfonnes croyent encore aujourd'hui que quelques débris d'un Temple qu'on voit à Rome entre l'Eglife de la Minerve & celle de S. Eufta(7) Lylio che,font les reftes du Temple qui étoit confacré à ce Dieu (7).

(6) Lib. 1.

Giraldi.

Populonia, dont le nom eft dérivé de populatio, pillage, degát, étoit auffi au nombre des Divinités champêtres on la prioit dans les facrifices qu'on lui offroit, d'empêcher que la grêle & la foudre ne ravageaffent la campagne.

[ocr errors]

(1) Aug. de Civ. Dei 1. 6. lib. de Superft.

c. 10. Senec.

(2) In 6. Æn.

C'étoit pour la même raison fans doute qu'on honoroit une autre Divinité fous le nom de l'Eclair (1); & le culte qu'on lui rendoit, étoit pour qu'il préfervât les biens de la campagne. Pilumnus & Picumnus étoient felon Servius (2), deux Dieux qui étoient freres, dont le dernier avoit inventé l'ufage de fumer les terres, d'où il fut furnommé Sterquilinus ; &, Pilumnus celui de moudre le bled, c'eft pourquoi il étoit particulierement honoré par les Meûniers. Nonius Marcellus dit que Pilumnus & Picumnus préfidoient aux aufpices des mariages, & pour appuyer fon opinion il cite un paffage de Varron (3), qui dit que fi l'enfant que venoit de recevoir la (3) Lib. z.de Sage-femme, avoit l'apparence de vivre long-temps, elle le vitapop.Rom. pofoit à terre pour conjecturer s'il feroit d'une taille bien droite; & qu'on dreffoit dans les Temples des lits Dieux Pilumnus & Picumnus, Divinités qui préfidoient aux mariages.

pour les

Sterculius étoit un des furnoms qu'on avoit donné à Saturne, parce qu'il avoit le premier mis du fumier dans les terres pour les rendre fertiles (4).

Hippona étoit la Déeffe des Juments & des Ecuries (a).

Le Dieu Jugatinus, préfidoit aux côteaux & aux montagnes, & la Déeffe Collina, aux collines. Saint Augustin la nomme Collatina; mais peut-être s'eft il mépris en lui donnant ce nom, Vallonia, felon ce Pere de l'Eglife, étoit la Déeffe des Vallées.

Rufina, qui fut ainfi nommée du mot Rus, la campagne, préfidoit fuivant le même faint Docteur, aux campagnes. Lylio Giraldi rapporte que cette Déeffe étoit par quelques> Auteurs appellée Rutina,

Quelques paffages tirés du quatriéme Livre de la Cité de Dieu de S. Auguftin, vont nous faire connoître plusieurs autres de ces Dieux champêtres, & il fuffira de les avoir nommés pour connoître les emplois aufquels ils étoient destinés. Les Romains, dit-il, avoient une Déeffe Fructufée, qu'ils in voquoient pour faire une bonne récolte: un Dieu Spineufe

(a) Plutarc. in Parall. Apul. 1. 3. de Afin. aur. Tertull. in Apol. Fulgent. de obsc vocibus, &c.

(4) Macrob. Sat. lib. 1.c.7.

[ocr errors]

(1) Antiq. Rom. 1. 4

pour arracher les épines des champs une Déeffe Nielle; pour empêcher la nielle dans les bleds. Ils avoient Proferpine pour préfider au germe des bleds: un Dieu Nodotus, pour les noeuds du tuyau: la Déeffe Volutina, pour l'enveloppe de l'épi: Patelene, pour l'épi qui commence à s'ouvrir : Hoftiline, quand la barbe de l'épi & l'épi font à niveau (a). Lacturce, quand le grain étoit en lait: Maturne, quand il étoit mûr; & Runcine, quand on le coupoit.

Obfervons, 1°. Que prefque tous ces Dieux avoient leurs Fêtes marquées, qu'on celebroit à la campagne dans les faifons où l'on croyoit avoir befoin de leurs fecours, & dans les lieux mêmes où l'on croyoit qu'ils préfidoient; ainsi qu'on peut le voir dans les Faftes d'Ovide, & dans le Calendrier Romain dreffé par Rofin (1). 2°. Que prefque tous ces Dieux tiroient leur origine des Latins, comme leurs noms le marquent affez, & l'on ne trouve rien qui les regarde dans les Ecrits des Grecs.

(a) Les anciens Romains difoient hoftire, au lieu d'aquare, égaler.

P

CHAPITRE VIII.

Des Satyres, Faunes, Ægipans, &c.

ARMI les Dieux de la campagne, les Satyres & les autres qui font dénommés dans ce titre, étoient les plus celebres: c'étoient autant de Dieux, ou plûtôt de DemiDieux que les Payens s'imaginoient habiter dans les Forêts ou dans les Montagnes, & qu'ils repréfentoient comme de petits hommes fort velus, avec des cornes à la tête, des pieds de chevre, & une queue derriere le dos. On les nommoit indifferemment ou Pans, ou Ægipans, ou Satyres, ou Silenes; avec cette feule difference, que les Silenes étoient des (2) In Attic. Satyres avancés en âge, fi nous en croyons Paufanias (2) & Servius (3).

(3) La L.6. Æn.

Le

« AnteriorContinuar »