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Ne doit-on pas avouons que principalement parmi les Dieux
Topiques, qui n'étoient gueres connus que dans quelques vil-
les particulieres qui les avoient choifis pour leurs patrons, il fe
trouve fouvent des fymboles inexplicables?

Cependant je crois qu'on pourroit dire, & même avec beaucoup de vraisemblance, que c'étoit un myftere emprunté des Gaulois, au fujet de l'œuf Anguinum, ou de ferpent, que ces peuples cherchoient avec empreffement, & enlevoient avec précipitation, craignant que l'infecte qui l'avoit formé, ne fe jettât fur eux, comme je le dirai dans un plus grand détail, dans (1) Liv. 6. l'hiftoire de la Religion de cet ancien peuple (1). Les Breffans étoient trop voifins des Gaulois, & avoient trop de commerce avec eux pour avoir ignoré cet article de leur Religion.

Voilà ce que j'avois à dire des Dieux des Grecs, des Romains & de quelques autres Peuples d'Italie. Il ne faut pas qu'on s'imagine que j'aye épuifé la matiere. Il y en avoit tant qui n'étoient connus que dans une feule ville, ou tout au plus dans quelques petits cantons, qu'il feroit impoffible de les nommer tous. On en déterre même tous les jouts qui font entierement inconnus. J'ai crû qu'il fuffifoit de parler de ceux qui avoient quelque célébrité, & dont les Anciens ont fait mention.

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V.LS

SECONDE PARTIE

DES DIEUX DES AUTRES PEUPLES

de l'Europe, furtout de ceux des Gaulois

des Germains.

OMME l'Hiftoire des autres Dieux de l'Europe n'eft pas à beaucoup près auffi intéressante que celle de ceux des Grecs & des Romains; qu'elle a moins de liaison avec les BellesLettres, & que fouvent ces Dieux font,fous d'autres noms, les mêmes que ceux dont j'ai parlé jufqu'ici, je ferai beaucoup plus court dans cette Seconde Partie, que je ne l'ai été dans la premiere. Je tâcherai cependant de donner de ces Dieux une notion exacte; de rapporter ce qu'il y a de plus curieux à fçavoir fur leur fujet, & de mettre fous un point de vûe aifé à faifir, ce qui est répandu dans un grand nombre d'Auteurs qui en ont parlé avant moi: commençons par les Dieux de nos Ancêtres.

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Trag.

LIVRE SIXIEME

DES DIEUX DES GAULOIS.

L n'y a gueres parmi les Anciens que Cefar, Cefar, Diodore de Sicile, Mela, Strabon, & Pline qui nous ayent laissé quelques lumieres fur la Religion des Gaulois; mais outre que ce qu'ils en difent eft peu confiderable, il faut obferver qu'ils parlent des Dieux de ce Peuple conformement à leurs idées; c'est-à-dire, que lorfqu'ils avoient remarqué dans quelqu'un de ces Dieux, ou quelque attribut, ou quelque fymbole reffemblants à ceux de leurs Divinités, il ne manquoient de leur donner les mêmes noms. Ainfi, felon eux, un tel étoit Hercule, ou Apollon, ou Mercure; parce qu'il avoit quelque chofe d'approchant de leur Mercure, de leur Apollon, ou de leur Hercule ; car dans le fond les Anciens Dieux des Gaulois devoient être bien inconnus aux Grecs & aux

pas

(1) Jup. Romains, puifque dans un de fes Dialogues (1) Lucien fait dire à Mercure, qu'il ne fçait comment s'y prendre pour inviter ces Dieux à fe trouver à l'affemblée des autres, parce que ne fçachant pas leur langue, il ne peut ni les entendre, ni fe faire entendre d'eux.

Si

pour suppléer au peu que nous apprenent à ce fujet les Grecs & les Romains, on avoit le fecours de quelques Auteurs Gaulois, on pourroit y chercher l'origine & les fondemens de leur Religion; mais les Druydes, feuls dépofitaires de leurs myfteres, n'écrivoient rien, & 'cachant foigneufement au Peuple le fond de leur Religion, ils fe contentoient d'inftruire ceux qui afpiroient à la même dignité, dont ils étoient extrémement jaloux.

Il eft vrai que plufieurs Monumens déterrés de temps en temps, ont excité la curiofité des Sçavans; mais il fe font contentés de les expliquer, fant entreprendre d'approfondir la Religion des Peuples qui les avoient érigés en l'honneur de leurs Dieux. Schoedius qui a compofé un Traité de la Religion des anciens Germains, a raffemblé à la verité tous les paffages des Anciens où il eft fait mention de celle des Gaulois; mais excepté le long Commentaire qu'il a fait fur ces autorités, & où prefque toujours il s'écarte de fon fujet il ne s'eft pas arrêté fur une Religion qui n'étoit pas l'objet principal de fon Traité. Dom Bernard de Montfaucon, engagé à expliquer l'Antiquité par les figures, eft celui de tous qui a fait graver un plus grand nombre de figures de Dieux Gaulois; mais il n'y a ajouté que peu de reflexions. Enfin un de fes fçavants Confreres (1) fe fervant de ces mêmes fi- (1) Dom Jacques Margures, entreprit de donner il y a quelques années, un Traité complet de la Religion de ce Peuple, qu'il publia en 1727. en deux Volumes in 4°. & l'on peut dire que personne jufqu'à lui, n'étoit entré fi avant dans les myfteres Gaulois; mais on auroit defiré dans cet ouvrage plus d'ordre & moins de repetitions.

tin.

14

L.

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OUR donner une idée exacte de la Religion de ces Peuples, il faut la confiderer dans deux temps différens; c'est-à-dire, avant & après la conquête de Jules-Cefar, où les Gaulois commencerent à être en commerce avec les Romains, Ce n'eft pas qu'ils n'euffent été connus des Grecs & des Romains long-temps avant que ce Prince portât la guerre dans le fein de leur pays, puifqu'ils s'étoient une fois rendus maîtres de Rome même, & que d'autre part ils euffent traversé & faccagé la Grece: mais ces irruptions Hhhh iij

fubites & paffageres, bien loin d'avoir établi quelque commerce entre ces Peuples, n'avoient fervi qu'à les faire regarder comme des Barbares, dont la puiffance ne pouvoit que leur être un jour funefte ; & les Gaulois n'avoient gueres fongé dans ces irruptions, à s'inftruire de la Religion des Peuples qu'ils ne vouloient que faccager, & s'enrichir en pillant leurs Temples & leurs maifons. Lorfque Cefar après une guerre de dix ans fe fût enfin rendu maître des Gaules, & que ce beau pays devint une Province Romaine, il fe fit de grands changemens dans la Religion des Gaulois, qui adopterent la plupart des Dieux Romains, & abandonnerent enfin prefque toutes leurs anciennes cérémonies, pour fuivre celles de leurs vainqueurs.

Comme Jules Cefar eut tout le temps de connoître un pays où il demeura fi long-temps, c'est dans la relation qu'il fait de la guerre des Gaules, & dans quelques autres Auteurs Latins qu'on doit chercher l'hiftoire de l'ancienne Religion des Gaulois ;.mais, comme on l'a déja remarqué, ces Ecrivains en difent peu de chofes : fouvent même ils fe contredifent les uns les autres ; & ce qui eft encore plus embarraffant, c'eft qu'ils en parlent tous fuivant leurs préjugés, & ne femblent chercher qu'à identifier les Dieux de cet ancien Peuple avec ceux qu'ils adoroient eux-mêmes. L'Hiftorien Jofephe leur reproche même d'avoir parlé d'une Religion dont ils n'étoient ni ne pouvoient être inftruits. En effet les Druydes n'écrivoient rien, fe contentant de charger leur memoire, & enfuite celle de leurs Novices, d'un nombre prodigieux de vers qui contenoient leur Theologie, vers barbares par rapport aux Romains, que certainement ils ne connoiffoient gueres, & dont apparemment ils n'auroient pas fait beaucoup de cas, quand ils les auroient entendus. D'ailleurs ces mêmes Druydes, cachés dans le fond des forêts d'où ils fortoient rarement, étoient peu communicatifs; & bien loin de revéler leurs myfteres à des étrangers, ils les cachoient même aux Gaulois.

Cependant comme Cefar eft fans contredit celui de tous les Anciens qui nous donne le plus de lumieres fur la

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