Qui prétend le connoître eft trompeur &. trompé. Demeurons dans une humble & modefte igno rance; Que la feule raifon regle nos fentimens ; Avec une tranquile & fage indifférence Attendons les évenemens. FABLE XXII. Le BROCHET, & la PER CHE. N avoit mis une Perche friande Sous la conduite d'un Brochet. Le poiffon d'alentour fouffroit un grand déchet Par la faim du glouton toûjours âpre, & gour mande. Truite, Carpe, Tanche, Goujon Un jour n'ayant rien à manger, Il forma, pour le foulager, Contre la Ferche un deffein parricide: Le fcrupule eft d'une ame & vulgaire, & i mide: Dans la néceffité tout doit être permis. Content de ces raifons qu'il trouve légiti mes, 11 ajoûte la Perche à fes autres victimes. Que de Brochets injuftes & gourmans Ferment l'oreille aux remords inuti les ! Infidelles à leurs fermens Que de Tuteurs dévorent leurs Pupi les! FABLE XXIII. Le PAÏSAN PLAIDEUR. D Ans un village prés d'Athe nes Certain Manant grand chicaneur, Pofsédoit plufieurs beaux domaines. Sur un oui, fur un non, il eût fait un Procès; C'étoit fa folie, & fa rage. Il en vint jusqu'à tel excès, Qu'un jour devant l'Aréopage TAYLOR Il cita fon Portier, c'étoit un Chien courant, Une autrefois (le cas eft encor plus étrange) Pour quelques grains d'orge & de blé Qu'il prétendoit qu'avoit volé Une poule auprés de fa grange, Il fit pour être ouis affigner les témoins: "1 Exploit, fommation, faifie. . . Il n'obmit-ni rufes, ni foins Pour faire condamner fon adverfe partie. Enfin notre infensé fit tant, A plaider il fut fi constant, Qu'il en perdit fes biens, la raifon & la vie. Fut, & fera toûjours le fort infortune. 19 C FABLE |