FABLE I I L'ESCLAVE, & les MEURTRIERS. Ans le tems des profcriptions D De Marc-Antoine & de Lé pide, Les troubles, les diffentions Porterent la fureur jufques au parricide. Un Sénateur fut condamné A perdre injuftement la vie: La lumiere à fes yeux alloit être ravie ; Un Efclave ancien, fidelle En ce preffant danger le voyant fans fecours, Réfolut de montrer fon courage & fon zele, Et de le fauver même au dépens de fes jours. Il prend la robe de fon maître, Sort, s'avance; & feignant de l'être, Dit à la Soldatefque ; un Arreft m'a profcrit; ز Exécutez, cruels, ce qui vous eft préfcrit: Trenchez mes jours, mon ame eft prête A fubir fon fort rigoureux. Vit à regret couler un fang fi généreux. C'eft un grand, mais rare tréfor Celui-cy peut être eft l'unique. FABLE III. Le RENARD, & le COQ Mont Onté fur deux treteaux un Renard Dans un marché, fur un ton énergique Vantoit de fon Orviétan La vertu rare & fpécifique. Notre Docteur matois moins fçavant qu'ef fronté, Se difoit de la Faculté. J'ai fait des cures merveilleufes Crioit-il vous, qui m'écoutez, De mes découvertes heureuses, Je viens d'un païs d'où j'apporte Elixirs éprouvez je fçai Grec, & Latin: Pour faigner, pour purger, pour donner un clyftere, Je ne cede à perfonne enfin Je fuis Droguifte, Apoticaire, Et mon didactique génie Poffede l'enciclopedie. Je fçai guérir les maux les plus invétérez. Son zele m'eft suspect ainsi que fa science = S'engraiffer de notre substance; Et nous rendre, en trompant notre crédulité, Victimes de fa cruauté, Ou dupes de fon ignorance. Tel, en empirique Gascon, Vante fes talens, fes proiieffes, Qui n'eft rien moins qu'expert en la profeffion: I eft des Charlatans de toutes les efpeces. FABLE E Mafque difoit au visage, LJ'ai de l'avantage fur vous: Je trompe les yeux des jaloux : Utile & favorable au myftcre amoureux, Je prens la forme que je veux: Je fuis ami des ris, de la danfe, & des jeux. Etat républicain, j'aime la liberté, Je dérobe aux regards votre difformité; |