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mille fept cent vingt millions. Au lieu de trente-une onces que chaque homme tranfpire, ne prenons qu'à peu près la moitié de cette quantité, feize onces ou une livre, afin qu'on ne nous accufe pas de porter l'éva luation trop haut; nous trouverons que la fomme de la transpiration de tous les hommes en un feul jour, ne fera pas moindre que trois cent quarante-fept milliards deux cent millions de livres d'eau; produit qui auroit été prefque double, fi nous ne l'avions diminué de moitié. Si nous ajoutons à cette quantité celle des animaux de diverfes familles qui habitent la terre entiere, nous aurons un résultat au moins double, lequel, avec le précédent, formeroit un billion quarante-un milliards fix cent millions de livres d'eau. ·

Indépendamment de tous ces principes d'évaporation naturels & néceffaires, combien n'y en a-t-il pas d'autres qui font accidentels, foit qu'ils dépendent des révolutions fortuites qui arrivent dans les diverses portions de notre globe, comme ceux qui font occafionnés par les éboulemens & affaiffemens de terre, les tremblemens de terre, les volcans, &c. ceux-mêmes qui dépendent de la volonté des hommes, de leurs arts, de leurs travaux divers, &c. foit tout ce qui s'exhale des végétaux & des animaux, qui

perpétuellement meurent & fe corrompent, &c ? Ces diverses fources, desquelles s'exhalent journellement une énorme quantité de parties aqueufes, font d'autant plus abondantes, que leur fécondité est perpétuelle, que , que les vapeurs qui s'en élevent fe fuccedent les unes aux autres, qu'elles vont fe réunir dans les gouffres & les abymes éternels de l'atmosphere, qu'on ne peut guere s'empêcher de comparer à un océan fans bornes, fufpendu fur nos têtes, à deffein, ce femble, de tranfmettre aux animaux, & fur-tout aux végétaux, le fluide électrique qui regne dans cette mer immenfe, qu'on doit regarder, avec raison, comme un vaste & durable foyer de l'électricité naturelle.

S'il étoit poffible de révoquer en doute la certitude du dogme que nous venons d'établir, il ne nous feroit pas difficile de recourir à d'autres preuves. Nous ferions voir, par des expériences multipliées, que plufieurs liquides, & même quelques folides, augmentent notablement de poids, étant exposés à l'air; ce qui ne peut venir que de l'eau répandue dans l'atmosphere, qui eft attirée & abforbée par ces corps. L'acide vitriolique, & même tous les acides minéraux, dans des vaiffeaux qui ne font point bouchés, acquierent bientôt un poids plus confidérable; il

en eft de même de quelques autres liquides. L'alkali fixe végétal, bien fec, n'attire-t-il pas puiffamment l'humidité de l'air? ne s'unit

il

pas à l'eau avec une chaleur & une effervefcence confidérable? ne se réfout-il pas en liqueur ? phénomene qui l'a fait nommer improprement huile de tartre par défaillance. Selon Hellert cet alkali attire trois fois fon

poids d'humidité. ( Chymie métallurgique, tom. I, pag. 26.) Combien d'autres fubftances falines n'ont pas de même une affinité trèsmarquée avec l'eau ? Tous les extraits fecs de la plupart des matieres, tirées du regne végétal, n'absorbent-ils pas en peu de tems une certaine quantité de cette humidité qui eft répandue dans l'atmosphere ? La chaux vive qui, par la calcination a été privée de l'eau & du gas dont elle étoit faturée dans l'état de pierre calcaire; cette chaux vive ne s'éteint-elle pas à l'air, en s'emparant d'une affez grande quantité de l'eau que l'air tenoit en diffolution? Cette eau, attirée par les fubftances en qui on remarque la propriété de la déliquefcence ou de la caufticité, existoit dans l'air; elle y étoit en quantité confidérable, puifque ces matieres diverses en attirent beaucoup, & que fouvent leur poids en eft notablement augmenté. Quelque part, par exemple, qu'on mette une livre de l'alkali

fixe végétal, dans un état de ficcité, il atti rera l'humidité de l'air, & bientôt cet alkali, tombé en déliquium, pefera trois livres. Si dans tous les endroits d'un lieu quelconque à droite, à gauche, en haut, en bas, &c. on plaçoit une femblable quantité de cet alkali, ou même des quantités plus grandes, comme 10, 20, 60, 100 livres, &c. on obtiendroit bientôt 30, 60, 180 & 300 livres. Dans ce dernier cas on auroit donc deux cents livres d'eau, auparavant répandues dans l'atmosphere, fans que pour cela la portion d'air fût enfuite privée de la même qualité. Il en feroit de même de tous les autres endroits de l'atmosphere où on mettroit une certaine quantité de cet alkali fixe, le phénomene feroit le même ; il arriveroit également, soit qu'on élevât plus ou moins haut dans l'air ce fel; nous l'avons éprouvé fur de très-hautes montagnes. Cette vérité paroît encore être prouvée de la maniere la plus décifive par les expériences fuivantes. Faites bien fécher du fel de tartre ou de la potaffe; renfermez enfuite ce fel dans un vase parfaitement fec, & rempli d'air qui foit dans ce même état; bouchez avec foin l'ouverture, vous verrez, malgré ces précautions, que le fel fera fondu quelque tems après, du moins en partie. Si on met une pierre à cautere bien feche dans

un vaiffeau de verre rempli d'air, & enfuite fermé hermétiquement, au bout de quelques heures on la trouvera plus humide & plus pefante. Il eft donc prouvé par l'expérience qu'il n'y a aucun espace dans l'atmosphere, du moins jufqu'à la hauteur des montagnes, où l'air ne contienne une quantité de parties aqueufes, fi grande que l'imagination ne peut s'en former une idée. M. Bouguer, dans fon ouvrage de la figure de la terre, a prouvé que les vapeurs s'élevoient encore plus haut; ce favant géometre a même fixé à quatre mille quatre cents toifes la hauteur extrême des vapeurs, ce qui les porte a une lieue environ au-deffus des plus hautes montagnes ; & rend croyable, ce que plufieurs phyficiens ont affuré, que les vapeurs répandues dans l'air de l'atmosphere, font le tiers de fa maffe.

C'est à la vertu que l'air a de diffoudre l'eau, qu'on doit attribuer la grande quantité de parties aqueufes qui font contenues dans l'atmosphere. Quelle que foit la cause qui fait élever les vapeurs, il eft certain qu'elles font bientôt diffeminées & répandues dans la maffe d'air qui nous environne, & qu'elles y refteront fufpendues & même diffoutes jufqu'à ce que différentes circonstances produifent une véritable précipitation. Le premier qui, par voie d'expérience, a prouvé

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