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être que François I à qui Charles1539. Quint pût se fier ainfi. Falloit – il trahir cette glorieufe confiance, en faifant arrêter Charles-Quint jufqu'à ce qu'il eût donné l'inveftiture du Milanès ? Non fans doute, ce n'est pas cela qu'on prétend; on dit feulement qu'il auroit fallu tirer de lui une promeffe par écrit de cette inveftiture. Eh! de quoi eût fervi un pareil écrit ? François I n'avoit - il pas donné lui-même, par l'avis de fon Confeil, le mauvais exemple de foutenir après fa prifon & le traité de Madrid,que les engagemens pris par un ennemi au pouvoir de fon ennemi, n'étoit point obligatoires? L'Empereur l'avoit-il oublié, & indépendamment d'un pareil exemple, n'eût-il pas bien trouvé de lui-même cette défaite plus digne de lui que de François I? Auffi ne manqua-t-il pas de dire à François I, » n'exigez de moi » aucune autre promeffe que celle » que je vous fais verbalement & » volontairement. Les écrits que je » vous donnerois, n'ajouteroient rien

Mém. de du Bellay, 1. 8.

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» à votre sûreté. L'Europe les at> tribueroit toujours à la dépendan» ce, au défaut de liberté ; fi je ve> nois à mourir, mes fucceffeurs fai>> firoient ce prétexte pour fe difpenfer de tenir une promeffe,qu'ils respecteront d'avantage, quand ils » la regarderont comme un enga→gement d'honneur ; moi-même » je ne pourrois me diffimuler qu'un » Prince, de qui je n'ai point tiré » d'écrit pour venir dans fes Etats,

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en auroit tiré de moi pour m'y » laiffer paffer, & que mon frere >> auroit mieux aimé arracher cette >> inveftiture à ma fituation forcée, » que de la devoir à ma libre re> connoiffance. Attendez que je fois » arrivé dans la premiere Ville de » mes Etats; alors je vous donnerai » en Souverain l'inveftiture dont je » souscrirois ici la promeffe en pri» fonnier, & ce libre ouvrage de » la justice & de l'amitié, sera au» deffus de toute critique & de tout » prétexte. >>

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Ce difcours étoit captieux, mais il étoit fans replique après les motifs

1539.

allégués autrefois contre l'exécution 1539. du traité de Madrid; il nous femble qu'un écrit de plus n'auroit rien changé aux procédés de l'Empereur, & que François I fit très-bien de ne point gâter par une précaution inutile (1) autant que peu noble, un acte généreux de confiance héroïque; moins il mettoit de bornes à cette confiance, plus il accroiffoit le deshonneur du Prince qui fe difpofoit à le tromper, & malheur à qui ne fent pas combien François I eut d'avantage fur fon rival dans toute cette affaire! Laiffons donc Triboulet, le fou de François I, écrire sur ses tablettes (qu'il appelloit le journal des fous) le nom de l'Empereur plus fou que lui, lui, difoitil, d'ofer paffer par la France; laiffons-le répondre à François I, qui lui difoit : Que diras-tu donc, fi

(1) Il ne ferviroit de rien de dire qu'on auroit dû exiger de l'Empereur cette promefle avant fon paffage par la France, & qu'alors il Peût faite librement. Non; le même prétexte lui feroit toujours refté, c'auroit toujours été la même contrainte, on fe feroit toujours prévalu du befoin qu'il avoit de pafler par la France.

je le laiffe paffer?

Alors,
Alors, Sire, j'ef-

facerai fon nom, & je mettrai le vôtre 1539. à la place. Ce trait eft plaifant & hardi, mais la politique des grands Rois ne fe regle point par les bons mots d'un plaifant de Cour.

Pour ofer décider que François I ait été dupe de Charles - Quint, il faudroit être sûr qu'il crût aux promeffes de ce Prince. Mais on ne peut le penfer, fans oublier combien François I avoit d'efprit, combien fes vues étoient fines & perçantes, combien il connoiffoit l'Empereur, combien de fois il avoit prédit & annoncé de loin les fourberies qu'il lui voyoit préparer. Mais s'il voyoit fi bien tous ces piéges, que ne les évitoit-il? C'est qu'ils étoient inévitables. L'Empereur avoit abfolument réfolu de conferver le Milanès, il n'y avoit que la force qui pût le lui arracher. Du refte, il pouvoit négocier, promettre, mentir, tromper, mais il ne féduifoit point François I.

Ce Prince ayant réfołu de rece- Sleidan, voir fon rival en frere & en ami, Commentar crut ne pouvoir trop lui prodiguer

1.12.

Mem. de du

d'égards & d'honneurs ; il envoya 1539, fes deux fils le recevoir à Bayonne. Bellay, 1. 8. Le Connétable chargé de les conBeicar, 1. duire, les préfenta à l'Empereur,

22. n. 33.

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en le priant de vouloir bien les accepter pour ôtages; » je les accepte, » dit l'Empereur, non pour les en» voyer en Espagne me fervir d'ô»tages, mais pour les retenir auprès de moi comme mes compa» gnons de voyage."

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Qu'on fe rappelle que trois ans auparavant Charles-Quint avoit été foupçonné de l'empoifonnement du Dauphin leur frere, ou du moins qu'on avoit fait semblant en France de l'en foupçonner, & qu'on juge, fi en fe fentant coupable de ce crime, il eût ofé s'expofer à venir en France, qu'on juge fi François I l'en croyant coupable, lui auroit ainfi confié fes deux autres fils. Mais nous avons détruit ailleurs (1) cet injufte foupçon que la haine s'étoit plutôt efforcé d'avoir qu'elle ne l'avoit eu.

Le Roi à peine guéri vint lai

(1) Voir le chap. 8. du liv. 4t

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