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1544.

'dans la crainte qu'il ne fût porteur
de quelques autres papiers, on lui
donna une garde, qui le tint en
chartre privée & l'empêcha d'avoir
aucune communication avec per-
fonne; au bout de quatre jours
pendant lefquels il est à croire qu'on
avoit bien examiné & bien dure-
ment interprété les lettres du Roi,
le Chancelier renvoya le Hérault
bien escorté jufques fur la frontiere
de Lorraine, afin qu'il ne pût ni
parler à perfonne ni afficher aucun
papier; on prétend qu'en le con-
gédiant, il lui dit de rendre grace Con
à la clémence de l'Empereur qui
vouloit bien lui conferver la vie,
par un refte d'égard, qui n'étoit
pas dû à l'Envoyé d'un enne-
mi public de l'Empire, propos
auffi infenfé que dur & injufte,
puifque la plupart des fonctions
des Héraults fe font d'ennemi à
ennemi.

Les Ambaffadeurs François furent donc obligés de publier la défense de leur Maître, puifqu'on refufoit de l'entendre. Cette réponse

Sleidan) Commentar.

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exifte, elle est même imprimée, mais elle est une preuve bien forte du peu de confiance qu'on doit avoir dans ces écrits politiques qui ne font que de véritables plaidoyers, où l'on dit toujours, non ce qui eft vrai, mais ce qui eft favorable à la caufe qu'on défend. Mém. de du Il faudroit renverser toute l'histoire, Bellay, 1. ic. pour parvenir à croire certaines affertions répandues dans cet écrit. On y affure, par exemple, que François I. n'avoit fait avec Soliman II. qu'un traité de commerce ou même qu'une trève marchande, (comme fi ces deux Princes qui n'avoient jamais été en guerre, n'euffent au contraire jamais ceffé Belcar. 1. 23. d'y être) qu'il n'avoit rien fait à n. 25.26,27. cet égard que de concert avec les Etats de l'Empire; que les Ambaffadeurs François avoient toujours détourné Soliman de faire la guerre à l'Empereur, à l'Empire & au Roi des Romains; que les dépêches de Rincon, lorfqu'il avoit été affaffiné, n'avoient point d'autre objet; que ces dépêches

devoient être entre les mains des Impériaux & que s'ils vouloient avoir la bonne foi de les publier, on y verroit la vérité de ce fait; (tandis qu'il eft certain par le témoignage des du Bellay - Langei, que les deux Ambaffadeurs (1); lorfqu'ils s'obftinerent à pourfuivre leur route fur le Pô, malgré les avis de Langei, lui firent remettre leurs dépêches, afin qu'elles ne tombaffent pas entre les mains des affaffins, s'ils avoient le malheur d'y tomber eux - mêmes. )

Tous les autres faits font également altérés & auffi fauffement interprétés. Si l'on a vu Paulin fur la flotte de Barberouffe en diriger les opérations, c'eft parce qu'il n'avoit pas d'autre moyen sûr de revenir en France, comme s'il n'avoit pas pu revenir de Conftantinople de la même maniere qu'il y étoit allé. Si l'on demande ce que Paulin étoit allé faire à Conf

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(2) Voi: le chap. 3. du liv. 5.

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tantinople, l'écrit répond qu'il y avoit été envoyé parce que le Roi de France ne vouloit pas abandonner l'ufage où il étoit d'avoir un Ambaffadeur à la Porte. Si le Comte d'Anguien avoit fait avec Barberouffe le fiége de Nice, c'eft que Barberouffe, s'il l'eût fait feul, eût gardé la place pour lui, au lieu que les François le faifant avec lui, avoient intention de la prendre pour eux. Tantôt on défavoue cette alliance des Turcs, tantôt on la juftifie par des exemples mal tirés de l'ancien Teftament & par beaucoup d'autres exemples tant anciens que modernes. On voit par-tout, l'embarras de gens réduits à dire de mauvaises raifons, parce que ceux auxquels ils parlent, ne font pas difpofés à goûter les bonnes.

D'ailleurs le ton de cet écrit eft fage, modéré, pacifique. Tous les égards dûs aux Souverains, même coupables (1), y font obfervés. Fran

(1) Ceci eft relatif à l'affaffinat des Ambaffadeurs, aflaffinat que l'écrit rappelle, mais fans aigreur,

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Fois I. y eft d'ailleurs très-bien juftifié fur la violation de la trève, fur la rupture des traités & fur le renouvellement de la guerre. Le contrafte des douceurs de la paix & des horreurs de la guerre, du paffage de Charles - Quint par la France & de fes armemens contre ce Royaume, eft bien préfenté, il eft même pathétique. Les Ambaffadeurs pour prouver dans un autre endroit que François I. n'a pas pu, comme on l'en accufoit, méditer la ruine du corps Germanique employent une raison bien vague, mais prife dans le fentiment, & qui mériteroit d'étre convainquante. Mém de da Qui eft l'homme, s'écrient - ils, » ou né au fond d'une barbarie, » nourri parmi les plus efférées Na» tions du monde, qui ne foupirât voyant la mifere de fes amis? »

ככ

ou

Au refte, leurs raifons euffentelles été mille fois meilleures, elles n'auroient point perfuadé le corps Germanique. Il avoit pris fon parti, le nom des Turcs lui étoit trop odieux, pour que l'alliance d'un

Bellay,1.1.

Belcar.

n. 8.

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