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Le Comte d'Aumale exécutoit alors de Stenay, ce que Briffac ne pouvoit plus exécuter de Vitry; l fatiguoit le camp Impérial par des courses continuelles, il coupoit les vivres, il enlevoit des convois; il lui arriva quelquefois d'en enlever entre Bar-le-Duc & l'armée des affiégeans, malgré le peu de diftance de Bar-le-Duc à S. Dizier, malgré la distance énorme de Stenay à Barle-Duc.

S. Dizier alloit être l'écueil des forces Impériales, comme Landreci l'avoit été l'année précédente ; l'Empereur ne fongeoit déjà plus à le prendre par force & fe bornoit à le réduire par famine; il ne manquoit plus pour faire échouer ce dernier projet qu'une armée qui s'avançât pour faire lever le fiége. Celle du Dauphin ne pouvoit le tenter, elle étoit retenue par les ordres du Roi, qui ne vouloit pas abfolument qu'elle rifquât une bataille, mais le Roi lui-même, comment ne s'approchoit-il point de S. Dizier pour en faire lever le

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fiége, comme il avoit fait lever celui de Landreci ? C'eft que les conjonctures étoient différentes, c'est que la marche croifée de ces deux armées, dont l'une s'avançoit par la Champagne, l'autre par la Picardie, & dont le rendez-vous étoit à Paris, demandoit qu'il reftât à portée de cette capitale pour obferver leurs mouvemens & leurs progrès, pour envoyer du fecours par-tout où il feroit néceffaire, pour défendre Paris même ou contre le danger, ou contre la crainte quelquefois pire que le danger. Ainfi S. Dizier ne pouvoit être fecouru ni par le Roi abfent & forcé de l'être, ni par le Dauphin préfent, mais auquel il étoit défendu d'agir. On étoit obligé de fuivre le même plan de défenfe qu'on avoit obfervé en 1536; il falloit fauver la Champagne par les mêmes moyens qui avoient fauyé alors la Provence. c'eft-à-dire par les lenteurs de cette guerre Fabienne que Montmorenci avoit faite avec tant de contradictions & tant de fuccès. Les con

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jonctures rappelloient naturellement le fouvenir de ce grand Général. Le Dauphin qui l'aimoit toujours & qui n'aimoit point d'Annebaut, des Officiers qui regrettoient Montmorenci parce qu'ils avoient vaincu fous lui, des courtifans qui haiffoient d'Annebaut à cause de fa puiffance, s'unirent pour faire une efpece de violence à François I. en faveur du Connétable. Le Dauphin ofa le redemander au Roi comme fon maître dans l'art de la guerre, d'ailleurs comme un homme néceffaire à l'Etat & des confeils duquel il avoit befoin dans cette guerre difficile. Le Roi foit haine pour le Connétable, foit jaloufie de Gouvernement, trouva trèsmauvais que fon fils voulût lui choifir fes Miniftres & fes Généraux, il refusa durement s'emporta contre fon fils & contre ceux qu'il foupçonna de lui avoir fuggéré cette démarche.

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Les intrigues de Cour eurent une influence marquée & funefte fur toute cette expédition de Cham

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pagne. Les deux partis du Dau-
phin & du Duc d'Orléans, c'eft-
à-dire de la Ducheffe d'Eftampes
& de Diane de Poitiers étoient plus
déclarés, plus divifés, plus ardens
à fe nuire que jamais. La prédilec-
tion du Roi pour le Duc d'Or-
leans éclatoit, déterminée peut-être
par la Ducheffe d'Eftampes, qui
avoit attaché ce jeune Prince à fes
intérêts en paroiffant s'occuper
des fiens; dans ces fortes de di-
vifions c'eft toujours l'Etat qui eft *
le premier facrifié. La Ducheffe
d'Eftampes voyoit avec
voyoit avec douleur
l'empire dont elle s'étoit fait une
fi douce habitude, prêt à lui échap-
per avec fon amant; la fanté du
Roi déclinoit alors d'une maniere
affez fenfible pour allarmer en elle
ou la tendreffe ou l'ambition. Les
courtifans toujours partagés entre
le préfent & l'avenir, & donnant
plus ou moins au dernier à propor-
tion du plus ou du moins de foli-
dité du premier, avertiffoient la
Ducheffe de fa chûte prochaine
par la froideur des hommages qu'ils

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lui rendoient encore & par l'ardeur
de ceux qu'ils s'empreffoient de
prodiguer à la maîtreffe du Dau-
phin. Celle-ci s'élevoit, étaloit fon
crédit, accabloit de fon orgueil
triomphant l'orgueil humilié de fa
rivale, lui rendoit avec ufure le
mépris & l'outrage qu'elle en re-
cevoit, & ne daignoit plus ref-
pecter publiquement les reftes de
cette autorité expirante qui alloit
revivre en elle. La Ducheffe forcée
de prévoir & de craindre fa dif-
grace, vouloit procurer au Duc
d'Orléans un établiffement hors du
Royaume, où ellepût trouver un
afyle contre la perfécution qui l'at-
tendoit. L'Empereur qui au milieu
de fes vaftes projets de conquête
& de fes grands préparatifs de
guerre, ne perdoit jamais de vue les
négociations pour la paix, propofoit
de donner au Duc d'Orléans l'invefti-
ture ou du Milanès ou des Pays-Bas,
mais il mettoit à cette offre deux con-
ditions; l'une étoit que fa fille (1)

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