Imágenes de páginas
PDF
EPUB

» paix entre Charles & François, " & nous ne pouvons avoir de con» fiance aux marques équivoques de · » leur fragile amitié. »

1539.

Du Guaft ne manqua pas d'alléguer pour preuve de cette amitié la présence du Maréchal d'Annebaut, le concert évident de cette démarche; mais la queftion fur l'invefti- Mém. de da ture l'embarroiffoit, il falloit répon- Bellay, 1. s. dre, il n'avoit rien de pofitif à dire, il renverfa l'ordre des chofes ; au lieu de prouver l'amitié des deux Princes par l'inveftiture du Milanès, il voulut prouver l'inveftiture du Milanès par l'amitié des deux Princes. On lui demandoit un fait, il faifoit un raisonnement. Puifque l'Empereur & le Roi de France font unis, difoit-il, il faut bien qu'ils foient d'accord fur le Milanès.

D'Annebaut plus fincere, avoua qu'il n'y avoit aucun traité formel fur le Milanès; les Vénitiens n'en demanderent pas davantage, ils devinerent quel feroit le dénouement de cette grande fcéne d'amitié, ils continuerent leurs négociations avec Tome IV.

B

les Turcs, & conclurent d'abord 1539 une treve, enfuite la paix au mois Commentar. de Mai 1540 (1).

Sleidan,

1. 12.

1540.

C'eft ainfi que par la fagacité des Vénitiens & par la franchise de d'Annebaut, le Roi eut le bonheur de ne point réuffir dans une affaire directement contraire à fes intérêts. Mais l'éclat de cette ambassade & d'une autre qu'il envoya auffi au

[ocr errors]

(1) Les Vénitiens acheterent cette paix en cé dant aux Turcs Napoli de Romanie & Raguze la vieille; ils voulurent d'abord marchander ils chargerent Badouer leur Ambafladeur, de propofer d'autres conditions, & de n'offrir celle-ci qu'à la derniere extrêmité; fur fes premieres offres, les Turcs lui dirent: Vous ne dites pas tout il n'y a point ce paix à espérer fans la remife des deux places que vous êtes chargé de nous offrir. Badouer voyant que fa République étoit trahie, s'en plaignit au Sénat; on fit des perquifitions, on décou vrit & on punit les coupables. Un d'eux s'étoit refugié dans l'hôtel de l'Evêque de Montpellier, Ambaffadeur de France, comme dans un afyle, On envoya des Gardes vifiter P'hôtel. Les François jugeant que c'étoit porter atteinte aux privileges de l'Ambaffadeur, fermerent les portes aux Gardes. Le Sénat toujours inexorable en matiere d'Etat, voulut qu'on lui remît le coupable, & fit venir du canon pour renverfer l'hôtel. Le coupable fut rendu, le Sénat expliqua au Roi les mo tifs de fa conduite, & protefta qu'il n'avoit prétendu faire aucune infulte à l'Ambaffadeur. Cette excufe fut agréée. (Sleidan, Commentar. 1. 12. ) .

Pape, fervit toujours fon rival, en achevant de détruire François dans 1539. l'efprit de Soliman.

Si François I. eût mérité que Charles-Quint le traitât en ennemi couvert, cet art de lui enlever fes alliés, en fe difant fon allié luimême, & en l'accablant du poids d'une amitié perfide, pourroit n'être regardé que comme un des jeux ordinaires de la politique; mais quelle politique déteftable pouvoit autorifer cet acharnement de l'Empereur à trahir fon bienfaiteur fon ami, fon frere, après un fi grand fervice, après un oubli fi fincere des injures paffées, après un fi généreux facrifice des intérêts préfens? C'est une chose bien étrange que la rage malfaifante des politiques, puifque les procédés de François I. ne purent défarmer Charles-Quint, puifqu'un fi grand Empereur put confentir à fe deshonorer publiquement par l'indigne défaveu de la parole la plus folemnelle, d'une parole dont l'exécution n'eût été que le jufte prix d'une conduite à

laquelle l'Empereur devoit la con 1539 fervation de la Flandre.

Cependant le reffentiment de François I. reftoit enchaîné par les Traités; cette baffe fourberie n'étoit pas une raison de recommencer la guerre, la treve fubfiftoit toujours, l'Empereur s'étoit deshonoré fans la rompre, il n'avoit porté aucune atteinte aux conditions de latreve; la promeffe qu'il avoit faite & vio lée, étoit étrangere à ces conditions mais bientôt un attentat atroce acheva de rompre le feuļ nœud qui retenoit la colere de Franı çois I.

[ocr errors]

CHAPITRE III.

Affaffinat des Ambaffadeurs Rincon & Fregofe.

CE Roi facile, mais clair-voyant,

n'avoit

pas

1540.

Mém. de du

tardé à fentir le tort qu'il s'étoit fait par ces ambaffades de Bellay, 1.9. Venife & de Rome; pour arrêter

Avril.

le fuccès de l'artifice, il crut devoir 1541. montrer fimplement la vérité ; il Paques, le 17 réfolut d'inftruire l'Europe, fur-tout les Vénitiens & les Turcs, de ce qui s'étoit paffé entre l'Empereur & lui. Il nomma pour cette nouvelle ambassade de Venise qui devoit réparer le tort de la précédente, Céfar Fregofe, Chevalier de fon Ordre (c'étoit ce beau - frere de Rangoné que nous avons vu partager fa querelle contre Gonzague dans le Piémont (1);) Antoine Rincon, Gentilhomme ordinaire de la Chambre du Roi, fut envoyé à

[blocks in formation]
« AnteriorContinuar »