ne puis croire avec quelques Auteurs que la France ait été l'ame 1546 de cette fameufe conjuration de Fiefque, dont les refforts fi bien conduits par d'habiles politiques ont été fi bien développés par d'habiles écrivains. Il me femble que l'impénétrable de Fiefque cacha la profondeur de fes noirs projets à la France qui ne les eût pas approuvés. Le Cardinal de Trivulce à la vérité avoit à Gênes des Coopérateurs intelligens & attentifs il connut par eux les talens & les dif pofitions du jeune de Fiesque, cette diffimulation perfide qui eût trompé le Ciel, s'il pouvoit l'être, cette prudence fupérieure à fon âge qui contenoit toutes fes paffions fans les modérer, cette jaloufie fombre qui l'animoit contre la puiffance des Doria, cette ambition fecrette qui le dévoroit, cette fureur froide & opiniâtre qui fçauroit s'étouffer long-temps pour n'éclater qu'à propos, cette audace intrépide & réglée, cet efprit & de reffource & d'agrément, cette affabilité po 1546. litique cette douceur décente & ment ses vues fes mesures, fes il 1546 (1) Il n'avoit que 22 ans. . 546. blique, la conjuration est étouffée, les Chefs des conjurés, forcés dans leurs derniers afyles, fubiffent le fupplice, les moins coupables font bannis de Gênes. De la conjuration de Jean-Louis de Fiefque, nâquit celle de Jule Cibo; celui paroît n'avoir été qu'un inftrument aveugle de la vengeance des de Fiefque; trois freres du malheureux Jean-Louis, bannis de Gênes après la mort, s'étoient retirés à Rome, ils engagerent Cibo avec lequel demeuroit un des trois freres, à partir pour Gênes dans l'inten tion d'affaffiner André Doria & de remettre la République fous les loix des François ; ce complot fut découvert & prévenu, Cibo eut la tête tranchée. L'hiftoire de ce Jules Cibo n'eft qu'une fuite d'outrages faits à la nature. Il avoit commencé par dépouiller fa mere de fes biens; le Cardinal Cibo fon oncle, qui étoit attaché aux Impériaux, l'avoit fait arrêter à Pife, parce qu'il étoit attaché aux François. Jules Cibo alloit affaffiner André Doria dont 4 il avoit épousé la niéce (1); enfin ce fut fa propre mere avec laquelle il s'étoit réconcilié > qui alla le déférer & qui par fa délation le conduifit à l'échaffaut. Gênes revit avec transport Doria échappé aux périls qu'il n'avoit courus que pour l'avoir rendue libre, elle crut le deftin de la Ré publique attaché aux jours de ce grand homme, & elle crut fes jours fous la protection du Ciel; elle voulut pourtant les mettre auffi fous la garde des hommes, elle offrit à Doria de conftruire une citadelle (2) pour fa défense, Doria rejetta la propofition, » Mes jours » ne font rien, dit-il, j'ai tout fait >> pour votre liberté, Citoyens, fije >> vous fuis cher, ne détruisez point » mon ouvrage. On infifta, on al 1546 (1) Perette Doria, fœur de Jeannetin. (2) Octavien Frégofe par un amour pour fa patrie, digne de Doria, avoit démoli la citadelle que Louis XII. avoit fait conftruire à Gênes & dont il eût pû fe fervir au moins pour accroître fon autorité. On appelloit cette citadelle: La Tour de Godeffa. |