Encor fi de cet Art on n'employoit l'adresse, Que pour encourager la timide jeuneffe; Si l'Orateur un jour par la foule excité, Meritoit, ce que jeune il n'a pas merité ; Mais on voit qu'à tout âge, en prêchant des Carêmes, Il faut briguer la Chaire & les Auditeurs mêmes. Cette neceffité fait aux Prédicateurs Une loy de répondre à tant de foins flateurs, En raille, en rit toujours. Mais qu'y faire ? il faut bien Ils n'y vinfient qu'armés de zele, pour combattre L'amour de fes enfans, & la trouvant rebelle, Jetter de leurs fouliers la pouffiere contre elle? Ils le feroient; mais quoy!* faint Roch & faint Mery, Saint Germain & faint Paul ont de feu fon mary Pour Marguilliers en chef, le coufin, le beau-frere, Les arriere-coufins du fils de fa grand' mere. Voudroit-on que leur zele en élevant fa voix Leur fit manquer faint Roch, faint Germain l'Auxerrois? Non, non, pour une Chaire, & de cette importance, On doit leur pardonner un peu de complaisance; Pour de moindres, combien d'autres font-ils de pas ? Il n'eft manége, adreffe, enfin, rien de fi bas, Qui ne leur foit permis pour occuper leur zele, D'un Marguillier élu, leur dit-on la nouvelle ? Les voilà fur la voye, & chacun le premier, S'efforce de faifir le nouveau Marguillier. Il n'a point de parens que l'on ne follicite, Il n'eft point d'importuns que l'on ne luy fufcite. Tel même, de qui peut à ce rang parvenir, Fait tirer l'horoscope, & quand dans l'avenir L'étoile qui préfide au fort de la Fabrique, Donne d'un Marguillier la preuve Aftronomique ; Dix ans auparavant on va briguer la voix De celuy dont l'étoile a fait lire le choix. * Grandes Paroiffes à Paris. Mais c'eft peu d'obtenir une Chaire importante, O! quels Prédicateurs font affez intrepides, Ou quand, de vuide en vuide, il voit trifte & glacé, Sans qu'aucun vienne, approche, & daigne en fe plaçant Peu, comme Bavius, s'aveuglent jusqu'à croire Qu'ils ont, quand on les fuit, un nombreux Auditoire, Et de les confoler épargnent l'embarras ; Difant, Nous avons fait quelque petit fracas. La plûpart ont la vûë & plus jufte & plus nette, Qui fert à l'amour propre à groffir les objets. En ont à cœur la honte & la vûë affez bonne Pour ne point voir de foule où l'on ne voit perfonne. C'est donc pour éviter ce fquelette hideux De chaifes & de banes arrangez autour d'eux, Et pendant le Sermon, va, vient, cherche une Meffe; Que des riches pecheurs amis doux & pliants, C'est ce que tu feras... Comment faire autrement Rebuter l'artifan qui tout tremblant hesite Et ne t'apprend enfin que c'eft* faint Pierre aux boeufs Qui dans le même lieu n'ont point, comme tant d'autres, Eu honte de loüer le Prince des Apôtres. Ne cherchant que les cœurs, tout cœur te fera bon, Et tu ne croiras pas avilir ton Sermon, N'ayant pour Auditeurs que des gens fans caroffe, Il n'eft aucune Eglife, aucun peuple, aucun lieu, Loin de t'enorgueillir d'avoir prêché les Rois, |