Anti-Cuickius. la baffeffe de fon extraction fous le nom d'une Noblefle empruntée, foit pour fe déguifer à fes Compatric tes & à fes anciens confréres de Religion. Sa chute ne fut pas indifférente à Cuyckius qui avoit un amour très-fincére & très ardent pour la vérité Orthodoxe & pour la gloire de l'Eglife Catholique. Il en eut une véritable compaffion; & il ne pût s'empêcher de lui en écrire pour l'exhorter à rentrer dans le fein de l'Eglife qu'il avoit abandonnée. Son exhortation fut imprimée à Louvain l'an 1596. in-8°. avec d'autres piéces fous le Titre d'Epiftola Parenetica, &c. Mais elle trouva Boxhornius dans de fi mauvaises difpofitions, que loin de produire l'effet qu'elle devoit avoir fuivant l'intention de fon Auteur, elle l'irrita & l'aigrit jufqu'à le mettre en fureur, & à lui faire vomir mille injures contre un bienfaiteur qui n'avoit eu que de la charité pour lui. Cuyckius ne fe rebuta point & lui récrivit avec plus de force que la premiére fois, mais avec auffi peu de fruit. Ce fut ce fecond effort qui lui attira un Anti-Cuyckius de la part de Boxhornius qui de Renegat voulut s'érigeren Auteur Polémique. Cette Satire fut imprimée à Leyde en Hollande in 8°. l'an 1598. Si elle n'a point eu d'autre fuite, je crois qu'on peut s'en prendre au mépris qu'en fit Cuyckius. Henri Boxhornius étoit de cette partie du Brabant qui obéït maintenant aux Hollandois, d'une naiflance que perfonne ne lui reprochoit & d'une parenté à l'obscurité de laquelle on ne trouvoit point à redire. Mais lorsqu'il fut question de prendre une femme à la place de fon Bréviaire & de fe rendre homme de qualité, il fe dit de la Maison des Boxhorns, Nobleffe connue dans le Brabant. Cuyckius crut qu'il devoit revoquer la chofe en doute pour rabatre quelque chofe de fa vanité, quoique cela ne fût point effentiellement néceffaire à leur controverfe. Boxhornius avoit fait fes études à Louvain avec affés de fuccès, & ayant embraffé l'état Eccléfiaftique, il fe mitfur les bancs de Théologie & fut licencié dans la Faculté. Il devint enfuite Doyen du Chapitre de Tienen ou Tillemont en Brabant, & fon zèle pour l'Eglife Romaine le fit choisir pour être Inquifiteur. Mais le dégoût du célibat & l'amour des nouveautés le pervertirent, & lui firent prendre parti dans les Héréfies du tems. Il fut Miniftre premiérement à Berg ou Monts près de Cléves dans les terres de l'Electeur de Brandebourg, puis à Woerden petite ville de Hollande à cinq milles de Leyden, & enfin à Bréda dans le Brabant Hollandois dans le tems que le Prince Juftin de Naffaw étoit Gouverneur de cette Ville. Sa fille mariée à un Miniftre de Berg-op ་ Zoom nommé Jacques Zuers, fut mere de Marcus Zuerius Boxhornius qui s'eft fait connoître par fes écrits. Henri Cuyckius étoit aufli du Brabant Hollandois, ou pour parler plus jufte de la Gueldre unie, puisqu'il étoit natif de Culembourg Ville fituée fur le Leck entre la Seigneurie d'Utrecht & la Bétuve. Il fit fes Humanités à Utrecht fous George Macropede ou Langwelt qui paffoit pour le premier Maître du Pays. Après on l'envoya à Louvain faire fa Philofophie avec fon frere Corneille. Il paffa enfuite dans l'Ecole de Théologie où il fut Bachelier. Il y avoit neuf ans qu'il étoit à Louvain lorfqu'il fut engagé d'enfeigner la Théologie chés les Chanoines Réguliers de Saint Martin, puis à Sainte Gertrude. Enfuite il fut Profeffeur de la Philofophie Morale dans l'Univerfité pendant quatorze ans. Après il prit le bonnet de Docteur en Théologie; il fut Vicaire Général de l'Archevêque de Malines, & fon Official; puis Doyen de Saint Pierre de Louvain, & enfin Evêque de Ruremonde dans la Gueldre Espagnole. Il mourut le septième jour d'Octobre de l'an 1609. dans fa Maison Epifcopale. ANTI-FONTANUS. 16 E vous citerai seulement l'ANTI-FONTANUS de Jean Botfaccus imprimé à Dantzick in-12. l'an 1646. puis je pafferai à un autre Anti. Pourquoi tant de précipitation, dit Mr de Brillat à Mr de Rintail? Avés-vous remarqué que nous ayons bâillé durant l'hiftoire de l'Anti-Coton, & de l'Anti-Cuyckius? fi c'est vous-même qui vous laffés, donnés-moi votre cahier, je vous foulagerai du moins en ce qu'il n'y aura qu'à lire. Je ne m'eftime pas moins courageux que vous, lui répondit Mr de Rintail. Ce n'est pas la fatigue que m'a pû donner la lecture de ces deux Anti qui me fait paffer fi légérement fur l'Anti-Fontanus. C'est le défaut de connoiffance pour cet Anti dont je n'ai jamais vû d'éxemplaire. Je ne fai pas même fi ce Fontanus qu'on attaque dans cet Ouvrage étoit Catholique, ou Proteftant; parce que Botfaccus écrivoit affés indifféremment contre les Catholiques, les Protestans, & les Sociniens même, comme vous le verrés lorfque je vous parlerai de fon Anti-Crellius & de fon Anti-Stegmannus. De quinze ou feize Fontanus de ma connoiffance, je n'en vois pas un que l'on puiffe prendre pour l'Adverfaire de Botfack. Je n'ai donc rien Kij à vous dire jufqu'à ce que quelqu'un de vous, ou de vos amis m'ait procuré la lecture de l'Anti Fontanus. Sachons au moins, dit Mr Terlaine, qui étoit ce Botfaccus, cet Auteur de tant d'Anti. Il faut, répondit Mr de Rintail, vous réferver cela pour l'Anti-Crellius. Voyons maintenant l'AntiForer. 17 "P ANTI-FORE R. Our vous dédommager de l'Anti-Fontanus, je vous donne deux ANTI-FORERS. Vous y mettrés le prix qu'il vous plaira ils viennent tous deux d'Allemagne. L'un eft de Pregitfer, & l'autre de Haberkorn tous deux Théologiens Proteftans. L'ANTI-FORER de Pregitzer vid le jour à Tubingue en Suabe l'an 1624. dans la forme que nous appellons in-4°. L'Auteur en vouloit au Pere Laurent Forer, l'un des plus ardens des Controverfiftes de l'Eglife Catholique qui fuffent en Allemagne après Gretzer. Ce Tere avoit fait imprimer à Dilling l'an 1623.in-4°. un Traité Latin pour la défenfe des voeux Monaftiques qui fe pratiquent parmi rous. Voilà tout le fujet de l'Anti-Forer, dans lequel Pregitzer a ramaffé tout ce qu'il a eu de force pour attaquer les voeux & le célibat. Cette difpute, dit Mr Terlaine, n'a-t-elle pas eu de fuite? Je n'ai remarqué que cela dans mon cahier, repartit Mr de Rintail. Il me paroît que le Pere Forer ne faifoit point grand cas de fon Adverfaire, & qu'il aima mieux combattre contre un autre Proteftant de l'Univerfité de Tubingue nommé Melchior Nicolai qui lui difputa toutes fes victoires avec plus d'opiniâtreté. Il faut avouer pourtant que Pregitzer n'étoit pas en petite confidération parmi les fiens. Il s'appelloit Jean Ulric, il étoit né l'an 1577. dans un village de Souabe nommé Cufterding à trois quarts de lieuë de Tubingue; & je m'étonnerois qu'il eût lâché fi-tôt le pied devant le Pere Laurent Forer lui qui avoit une barbe capable de faire peur à une armée de François. Ce petit mot étoit fans doute pour le jeune Mr de Saint Yon qui fe mit à rire, & qui repliqua fur le champ qu'il ne faudroit pas oublier cet article dans la continuation que l'on feroit de l'Apologie de Pierius pour les grandes barbes des gens d'Eglife. Mr de Rintail pour divertir la compagnie, nous dit que cette petite plaifanterie étoit 3 fondée fur ce qu'un jour les Officiers de l'armée Françoise qui étoit Anti-Forer. en quartier d'hiver à Tubingue, ayant apperçû Mr le Docteur Pregitzer dont la mine leur avoit frappé l'imagination, allérent trouver Mr de Turenne leur Général pour l'en divertir, en lui difant, qu'ils venoient de voir un homme qui avoit plus de barbe lui feul que tous les hommes de France enfemble. C'étoit fans y penfer faire l'éloge de Prégitzer, dit gravement un Auteur Allemand dans fon Panégyrique (1), parce qu'ils faifoient voir combien les Allemands font plus graves que les François lorfqu'ils ne vivent pas à la Françoise; ..étant certain que fi fa barbe ne marquoit pas en lui un grand Philofophe, elle faifoit voir au moins que c'étoit un homme, felon le même Panégyrifte. Il fut d'abord Diacre, puis Pasteur, Doyen, & Infpecteur de divers Eglifes de fon voifinage. Après il fut Profeffeur en Théologie à Tubingue, & Recteur de l'Univerfité à diverfes fois, puis Doyen de la Faculté de Théologie; jufqu'à ce qu'en 1652. le Duc Eberhard de Wirtemberg le fit Prévôt de l'Eglife de Tubingue, & Chancelier de l'Univerfité. Il mourut l'an 1656. L'ANTI-FORER de Haberkorn eft un peu plus récent. Son Auteur le publia à Gieffen dans la Heffe l'an 1654. -inquarto Ce Proteftant prétendoit répondre fous ce Titre à quatre queftions qui avoient été propofées aux Luthériens par le Pere Forer, & par d'autres Auteurs Catholiques fur la nature de la nouvelle Réformation, fur l'érat de l'Eglife avant Luther, fur fon invifibilité, & fur la propagation des Enfans de Dieu par le miniftére d'un Sacerdoce corrompu. Le Pere Forer étoit encore au monde pour lors. Et fi fon grand âge, ou fes autres occupations l'empêchérent d'entrer encore en lice avec les Adverfaires de l'Eglife Catholique, il y a grande apparence qu'il fe déchargea du foin de réfuter Haberkorn fur quelqu'un de fes Confréres plus jeune & moins occupé. Mais ce Pere étoit mort depuis quelques années, lorfque Haberkorn entreprit la défense de fon Anti-Forer. Il donna d'abord les Réponses qu'il avoit préparées fur la matiére de l'Eglife (2), & fur quelques autres fujets, & il les fit imprimer à Giessen in-quarto l'an 1662. sous le Titre de Vindicia Anti-Foreri, &c. Deux ans après il mit en lumiére le refte de fes défenfes dans la même Ville fous le Titre d'Apologia pro Anti-Forero in xxxv. difputationib. &c. 2 Lip en. Bibl. Theol. Real. Anti-Forer. Voilà, Meffieurs, ce que j'avois à vous dire de notre fecond Anti-Forer, & de fa fuite; & il y a lieu de s'étonner que Mr Henning Witte avec toute fa curiofité, & fon éxactitude n'ait fait aucune mention de ces trois Ouvrages dans le Catalogue qu'il nous a donné des Livres de Pierre Haberkorn. Il étoit né à Butifbach dans la Wétéravie l'an 1604. le neuviéme de Mai (1). Il fit fa Théologie à Marpurg, où il paffa Docteur de la Faculté, & à l'âge de trente- deux ans il fut retenu pour profeffer la Physique. Mais au bout d'un an le Lantgrave de Heffe le fit Prédicateur de fa Cour, & vers le même tems il prit une femme qui lui donna quatorze enfans, & quarante-fix petits-fils qu'il eut le plaifir de voir naître. Il mourut l'an 1676. âgé de près de 72. ans. Pour le Pere Forer qui s'eft trouvé en butte aux traits fatiriques de ces deux Adverfaires, il étoit né à Lucerne parmi les Suiffes l'an 1580. Il fut reçu dans la Compagnie de Jefus âgé de vingt ans & fit les quatre vœux (2). Il enfeigna d'abord la Philofophie, puis la Théologie Morale, & la Controverfe. Après il fut Chancelier de l'Univerfité de Dilling, puis Recteur du Collège de Lucerne, & enfin Confeffeur de l'Evêque d'Ausbourg. Il mourut d'apopléxie à Ratifbonne le feptiéme Janvier de l'an 1659. (3). I Mich. Heiland apud Witt. Theol. 3 Scioppius fous le nom d'Alphon fus de Vargas a plus maltraité le P. Forer que n'ont fait Haberkorn ensemble & Prégitzer. S |