Imágenes de páginas
PDF
EPUB

dre; ce qui provenoit, dit nôtre Auteur, ou d'une inconftance naturelle, ou de la Complaifance aveugle qu'il avoit pour les favoris. 11 faifoit la Guerre & la Paix avec fes voifins, très-fouvent à contre-tems, & prefque toujours à fa confufion. Et pour tout dire en un mot, Charles en devenant l'héritier de la Couronne de fon Pere, il le devint auffi de tous fes défauts, & même il encherit fi fort par-deffus, qu'il mit tous fes Etats en combuftion. IL eut le même Favori que Jacques I. le même Confeil, les mêmes Miniftres & toutes les Charges de la Cour & du Royaume demeurerent entre les mains des Créatures du Duc de Buckingham. Livré aux Confeils d'un tel Miniftre, Charles forma divers projets pour établir un pouvoir arbitraire. Les moiens qu'il employa pour parvenir à fon but, approchoient fi fort de la Tyrannie, que les Anglois naturellement généreux, & jaloux de leurs Privilèges, prirent enfin les armes, fous le Commandement de Cromwel. Le Roi fut pris & gardé étroitement dans l'Ifle de Wight, d'où il vouloit tâcher de fe fauver pour paffer en France, mais la Reine fon Epoufe lui écrivit pour l'en diffuader, & par là Elle l'empêcha d'éviter la mort violente & honteuse qu'il fubit (a) quelque tems après, malgré les inftances de fes amis du dedans & du dehors. Après quoi Cromwel, fous le Titre de Protecteur, rem plit les fonctions du Sceptre.

IV..

(a) Il fut décapité par le Lieutenant Colonel Joyce, qui fe rétira depuis en Hollande où il mourut.

IV. Charles II. aiant été dépouillé de fes Etats par le même coup qui lui avoit enlevé fon Pere, il fut long tems errant en Ecoffe en France, en Allemagne, & dans les PaïsBas, il fut rétabli fur le Throne après la mort du Protecteur. Pendant fon féjour en France, il abjura la Religion Proteftante pour embraffer le Papifme, qu'il profeffa fi fecretement qu'après la mort fes Courtifans avoient accoûtumé de dire que fi le Roi étoit mort Papiste, ils étoient affurez qu'il n'avoit pas vêcu tel.

L'Auteur parcourt très-legèrement les mefures que l'on prit pour rétablir Charles fur le Thrône, ainfi nous nous contenterons de remarquer que Monk, Gouverneur d'Ecoffe & Général d'une Armée de douze mille hommes, contribua le plus à cet évenement. Charles II. fe voiant placé & affermi fur le Thrône, s'abandonna entiérement aux plaifirs, comme il avoit déja fait dans fon exil. Il avoit les inclinations baffes & rampantes, faifant très-peu de cas de ce qu'on nomme le point d'honneur, & qui doit être en recommandation à un fimple particulier honnête homme: En voici une preuve. Le Secretaire Coventry a déclaré qu'il y avoit une caufe portée devant le Confeil touchant une Plantation, & Coventry voiant quede Roi époufoit fortement les intérêts de celui qui avoit tort, s'approcha de S. M. & lui dit à l'oreille, qu'il fe trompoit, qu'il prenoit le mauvais parti, & qu'il protegeoit une mauvaife caufe le Roi lui fit cette lâche & indigne réponse: j'ai reçu une bonne fomme d'argent

F 3

pour

pour cela,

[ocr errors]

99

Ce Prince avoit fi mauvaise opinion du Genre humain, qu'il croyoit que le plus fûr moyen de bien gouverner, étoit.de le faire avec toute la fubtilité, & toute la diffimulation poffible; & comme il y avoit ,, peu d'hommes dans le monde qui fuffent ,, mieux affecter les apparences de fincérité que

[ocr errors]

"

[ocr errors]
[ocr errors]
[ocr errors]
[ocr errors]

lui, il arriva enfin que fon jeu aiant été dé" couvert, il ne put plus tromper perfonne, un chacun fe méfiant de lui. Il ne fe con,,tentoit pas de fe plonger aveuglément dans le vice, il faifoit encore tous fes efforts pour ,, entrainer les autres dans la corruption, tant ,, par rapport à la Religion que par rapport à la Morale. Il n'y a rien dans le caractère de ce Roi, où il ait fait paroître ,, plus de méchanceté & plus de baffeffe que d'avoir publiquement fait profeffion de la ,, Religion Proteftante, & d'avoir en tant d'occafions témoigné tant de zèle, & d'affection "" pour elle, dans le tems qu'il étoit fecrètement reconcilié avec l'Eglife Romaine. C'est ainsi qu'il fe mocquoit de Dieu, & qu'il abufoit le monde par une fi grande prévarication. Il n'eut jamais l'honnêteté, ni le courage d'avouer publiquement fa Religion, non pas même dans les derniers momens de fa vie ".

[ocr errors]
[ocr errors]
[ocr errors]
[ocr errors]
[ocr errors]
[ocr errors]

V. Parmi un grand nombre d'Evenemens finguliers, qui rendent l'Hiftoire Secrete de Jacques II. fort intéreffante, nous nous arreterons à ce qui concerne le Prétendant. Il y a trois fentimens fur la naiffance de cet impofteur

[ocr errors]

teur: les uns difent que la Reine feignit d'étre enceinte quoiqu'elle ne le fût pas, & qu'au tems de fon prétendu accouchement on fuppofa un fils comme étant, né d'Elle; les autres prétendent qu'Elle fut véritablement enceinte mais qu'aiant eu le malheur de faire une fauffe couche, elle continua toûjours à feindre qu'Elle étoit groffe, & qu'enfin, elle fuppofa ou fit fuppofer un fils comme étant né d'Elle, & que cet Enfant étant mort peu de tems après, on en fupofa un autre à fa place, & qu'à celui-ci qui mourut quelques femaines après, on en fit fuccèder un autre, fuppofé: D'autres enfin foutiennent que la Reine étoit réellement enceinte, & qu'elle accoucha le 10. de Juin 1688. d'un fils qui eft le même qu'on a depuis appellé le Prétendant, & qui paffe aujourd'hui fous le nom de Chevalier de S. George, digne fuppôt du fâmeux Don Quichotte de la Maache. Quelle eft de ces trois opinions la plus probable? Les deux premières peuvent être foutenues, mais la dernière eft abfolument fauffe: quelques remarques tirées de la rélation qu'en a donnée le Docteur Burnet, & qué notre Auteur copie fidellement, éclairciront ce fait.

1. On tira fouvent du fang à la Reine Marie pendant fa groffeffe, & on lui donna les plus forts aftringens.

2. On s'aperçut dès le commencement que tout étoit mystérieux dans cette groffeffe.

3. Le 16. d'Avril 1688. le Roi étant parti pour Rochester, on le fit revenir parce que la

F 4

Reine

Reine fe fentoit en danger de faire une fauffe couche. Le même jour la Comteffe de Clarendon, qui n'avoit ouï parler de rien, vint à Whitehall, pour prendre congé de la Reine avant que d'aller à la Campagne, où elle fe propofoit de paffer quelques jours. En vertu de fa charge de Dame d'atour de la Reine Douairière, elle avoit entrée dans la Chambre de la Reine regnante, fans demander permiffion à perfonne. Y étant, elle vit cette Princeffe au Lit, faifant de grandes plaintes, & répetant à diverfes reprises d'un ton dolent : Tout eft perdu! Tout eft perdu! Elle vît qu'une femme de Chambre emportoit hors du lit quelque chofe qu'elle prit pour du linge qui avoit fervi à la Reine. Pendant qu'elle confidéroit ce manége où elle ne comprenoit rien, la Comteffe de Powis, qui furvint, lui demanda d'un ton aigre ce qu'elle faifoit-là, & la mit dehors. Avant que Mylédy Clarendon, fut hors du Palais, une femme de Chambre qui courut après Elle, lui recommanda de ne rien dire de ce qu'elle avoit va. Le filence fut profond, & la groffeffe alla fon train.

4. La Princeffe Anne fut preffée par le Roi fon Pere d'aller à Bath, dont les eaux, difoitil, lui feroient autant de bien qu'elles en avoient fait à la Reine, & dès qu'elle fut partie (ce qui arriva fur la fin de Mai) la Reine changea fon compte, qu'elle commença du tems ou le Roi étoit venu à Bath, lui rendre vifite. Jufqu'ici elle avoit averti tout le monde qu'elle iroit à Windfor le 14. Juin, & qu'il falloit

que

« AnteriorContinuar »