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deux mille cinq cent chevaux. Mal1542. gré cette inégalité de forces, Langei fut rendre la fortune à peu près égale. Il entreprit de furprendre à la fois Coni, Albe & Quiéras. Ceux qu'il avoit destinés à l'expédition de Coni & d'Albe s'égarérent pendant la nuit, & ayant été furpris par le jour, ne purent éxécuter leur projet. D'Offun & Cental chargés de l'éxécution de Quiéras, n'arrivèrent de même qu'au jour, & par conféquent les amis qu'ils avoient dans la place n'oférent se déclarer; pour eux, ils ne voulurent pas être venus inutilement; ils drefférent leurs échelles, montérent les premiers fur les remparts, leurs folBelcar. 1. 23. dats les fuivirent, & la Ville fut em

n. 17.

portée d'emblée; mais la garnifon s'étant retirée dans le Château, il fallut faire venir de l'artillerie pour l'y forcer ; en même tems on apprit que le Marquis du Guaft marchoit au fecours des affiégés; on en donna promptement avis à Langei, & l'on croyoit devoir abandonner l'entreprife, mais Langei toujours inftruit

de tout, avertit les affiégeans qu'il n'y avoit pour tous vivres dans le Château que deux facs de farine & un feul cheval; que les affiégés feroient obligés de fe rendre dès le lendemain au plus tard, que le Marquis du Guast n'arriveroit que dans trois jours; il fe chargea de les faire inftruire de fon arrivée & de faciliter leur retraite.Ce qu'il avoit prédit arriva, les affiégés, qui depuis trente-fix heures n'avoient pris aucune nourriture, capitulérent le lendemain.

Du Guaft, pour se venger de cette perte, alla prendre d'affaut Villeneuve d'Aft & s'emparer de Poiring, de Campian, de quelques autres poftes peu importans; fa fupériorité ne lui permettant pas de refter enfermé entre le Tanaro & le Pô, il voulut paffer ce dernier fleuve & tenter d'aller par des excurfions dans le plat-pays affamer Turin & Pignerol, il vouloit auffi ôter aux François toute communication avec le Marquifat de Saluces. C'étoit à Carignan qu'il prétendoit paffer le Pô;:

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Langei ayant pénétré son dessein, fit 1542 travailler en diligence à un fort pour défendre le paffage ; les armées furent près de quinze jours en présence, mais Langei étoit un ennemi dont il falloit toujours fe défier. Il profita du voifinage pour attirer à fon parti fix mille Fantaffins Italiens du Marquis du Guaft & quelque Cavalerie; le Marquis fut donc obligé d'abandonner fon projet & de refter enfermé entre fes deux riviéres, il s'éloigna tant qu'il put de Langei dans la crainte que ce Général ne lui enlevât tout ce qui lui reftoit de troupes Italiennes. Langei eût tenu la campagne à fon tour, fans une mutinerie des Suiffes qui refuférent de pourfuivre les Impériaux, & qui voulurent abfolument fe retirer à Pignerol, cette conduite de leur part étoit affez ordinaire pour qu'on n'en fût pas furpris, mais ce qui dut beaucoup furprendre, ce fut de voir Boutiéres dont la fidélité n'avoit jamais été fufpecte, les accompagner à Pignerol. Langei, ainfi abandonné, diftribua

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fes troupes dans différentes places & prit le parti de fe faire porter à Tu- 1542. rin. L'activité de fon efprit formoit un contrafte fingulier avec fes infirmités corporelles. Ce paralytique demi mort & prefque éteint, qu'on portoit en chaife dans tous fes voyages & dans toutes fes expéditions étoit ce même Général fi vigilant, fi agiffant, dont les intrigues & les entreprises mettoient tout le Piémont en mouvement. Du Guaft enhardi par la retraite de Langei, envoya un détachement paffer le Pô à Carignan & s'emparer du Château, ce qui s'éxécuta fans obftacle. Auffi-tôt que le Roi eut reçu la nouvelle de la prife de ce Château, il envoya ordre à Langei de tenter l'impoffible pour le reprendre. Lorfque le Courier arriva, l'ordre étoit déjà éxécuté; Langei avoit envoyé Martin du Bellay fon frére, s'informerDu Bellay, de l'état de la place, des forces de la 9. garnifon, & obferver fi le Marquis du Guaft fe disposoit à paffer le Pô avec le refte de les troupes; il fe trou

Mém. de

va heureufement que le nouveau 1542. Gouverneur du Château de Carignan pour les Impériaux, etoit ami d'un des principaux Officiers qui accompagnoient Martin du Bellay ; cet Officier prit langue avec le Gouverneur, il lui fit entendre qu'il étoit envoyé pour inveftir la place, qu'il étoit fuivi de toute l'Armée Françoife, & qu'il feroit impoffible aux Impériaux de fe défendre ; il joignit à cet avis le ton de l'intérêt & les confeils de l'amitié; il fit fi bien qu'enfin, foit par inclination, foit par crainte, le Gouverneur confentit à remettre la place à Martin du Bellay. Peu de jours après, le Marquis du Guaft voyant qu'il ne pouvoit paffer le Pô à Carignan, le paffa près de Crefcentin, & alla mettre le fiége devant Chivas. Le Gouverneur, Jérôme de Birague, le lui fit lever après deux affauts inutiles, & du Guaft fe retira à Cafal. Le malheureux Céfar de Naples voulut furprendre Gazelle, pour affûrer aux Impériaux la route d'Ulpiano à Tu,

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