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tout enfemble, dans le deffein d'en faire « par des moyens & par des conduites qui « ne vous auront pas réuffi.

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Je vous parle, mon Reverendiffime « Pere, continue-t-il) avec un definte- « reffement entier, éloigné de tout efprit e de conteftation, & dans la feule vûe de « Dieu, dont j'attens ici les jugemens en « paix, en filence, & en crainte tous les « inftans de ma vie. Je vous fais mes « plaintes , je vous ouvre mon cœur « comme à mon Superieur & à mon e Pere, & au moment que j'ay l'hon- « neur de vous écrire, toutes mes pen- ce fées naturelles me portent à entrer dans « tous vos interêts, mais celui de la verité m'en retire, & tant que je ferai per- « fuadé, comme je le fuis, que la caufe de l'étroite obfervance eft celle de Dieu, je ne fçaurois men feparer, ni faire ce « que vous m'ordonnez dans la rencon- cc' tre prefente, en me fervant de l'Inftitution de Vifiteur & de Vicaire général que vous m'avez envoyée. Je ne puis vous exprimer la douleur que je reffens de ce que Dieu n'a pas permis que vous ayez pris d'autres penfées & d'autres vûes fur le fujet de notre obfervance. “ Je fuis affuré que fi vous l'euffiez jugée digne d'eftre traitée d'une maniere plus «<

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» favorable, Dieu y auroit été plus glo»rifié, & vous euffiez trouvé plus de » fidelité, de fecours, & de confola» tion dans nos Peres, que dans tout le » refte de l'Ordre. Cependant, quelques "" fuites que les chofes puiffent avoir, je vous fupplie tres - humblement de » croire que je ne m'y trouverai que » dans tous les égards & tous les ména» gemens poffibles, & que j'effayerai de » vous faire connoître que je n'agis que » par la feule neceffité qui m'y engage, par la crainte que j'ai de déplaire à » Dieu, & de me tirer de fon ordre, & » que rien ne peut détruire dans mon » cœur le defir que j'ai de vous témoi»gner par mes fervices & par ma fou» miffion dans toutes les occafions où » ma conscience me le pourra permet» tre, que l'on ne peut être plus que » je fuis en noftre Seigneur JESUS"CHRIST, &c.

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CHAPITRE

II.

L'Abbé de la Trappe retranche dans fon Monaftere tout ce qui n'étoit pas conforme à la plus éxacte pauvreté. Il en augmente les Bâti mens, il eft obligé d'aller à Paris pour les affaires de la reforme, il dreffe une Requête pour être prefentée au Roy.

A lettre qu'on vient de rapporter Le produifit point d'autre effet que

ne

de faire connoître à l'Abbé de Cifteaux

ni de le

qu'il ne feroit pas aifé de tirer l'Abbé de la Trappe de fa folitude charger d'un autre gouvernement que de celui de fon Monaftere ; en effet, plus on s'efforçoit de détruire l'étroite obfervance, plus il s'appliquoit à établir folidement la réforme qu'il avoit mife dans fon Abbaye. Son zele devenoit tous les jours plus ardent, & comme il ne pouvoit fouffrir la moindre chofe qui pût ou rappeller ou conserver le fouvenir du relâchement où l'on avoit vécu à la Trappe avant qu'il y eût établi

les Religieux de l'étroite observance, il fit détruire environ ce même tems un colombier qu'on avoit autrefois bâti dans la cour du Monaftere. Le deffein d'ôter de devant les yeux de fes freres un monument defagreable de l'ancien déreglement, ne fut pas le feul motif qui le à le faire démolir, il craignit que dans la fuite des tems il ne fût une occafion d'ufer dans les maladies de viandes: qui ne pouvoient convenir felon lui, ni à l'aufterité ni à la pauvreté de la pro-feffion religieufe.

porta

Ce fut ce même amour de la pauvreté qui le porta encore dans ce même tems à fe défaire d'une Chapelle d'argent qui fervoit à parer le grand Autel; elle confiftoit en fix chandeliers, une Croix, un Calice, des burettes, un baffin & une lampe; tout cela fut vendu, & on en referva le prix pour les befoins & les neceffitez des pauvres ; il en ufa de la forte en execution des anciens ftatuts de Cifteaux. Ils défendent tres-expreffément de fe fervir d'aucun ornement d'Eglife, ni d'aucun vafe où il y ait de l'or. ou de l'argent, à l'exception des Calices. & des Fiftules dont on fe fervoit alors pour prendre le precieux Sang..

Depuis ce tems-là une pauvreté propre

fut toute la parure de l'Eglife & du Monaftere de la Trappe; on n'y voit rien qui ne prêche le dénuëment & la pénitence, rien qui ne rappelle à Dieu, & à cette premiere fimplicité qui faifoit autrefois tout l'ornement des Monasteres.

Cependant plus la penitence primitive fe rétabliffoit à la Trappe, plus il fe prefentoit de fujets pour y être reçûs: comme la pieté de l'Abbé de la Trappe ne lui permettoit pas de refufer aucun de ceux en qui il croyoit voir les marques de la vocation de Dieu, il en vint à la fin un fi grand nombre, que les lieux reguliers ne pouvant fuffire à les loger, il fe vit obligé d'agrandir le Refectoire, & de bâtir deffus un nouveau Dortoir où l'on pratiqua vingt-quatro cellules. Il parut dans cette occafion que la providence de Dieu n'abandonne jamais ceux qui mettent en elle toute leur confiance. La Communauté de la Trappe étoit devenuë fi nombreuse, & les neceffitez des pauvres augmentoient fi fort tous les jours, qu'à peine le revenu de la Trappe, qui n'eft pas confiderable, y pouvoit fuffire; ce qu'on dépenfoit pour l'entretien des Religieux étoit fi peu de chofe, qu'il n'étoit pas poffible d'en rien retrancher, & l'Abbé de la

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