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bonheur inalterable. La caducité de ma vieilleffe me fait attendre de jour en jour la mort. O toi qui recueille aujourd'hui le fruit de mes travaux, fouviens-toi que le véritable bonheur eft la paix de l'ame, & qu'elle eft la fource de tous les biens éternels.

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CHAPITRE II.

Valzan emporte chez lui fon tréfor. Comment il marie fa Fille.

V

Alzan le fils fe trouva à la porte comAlzan le fils fe trouva à la porte com

me il achevoit cette lecture. Il re

trouva les chofes dans le-même état où il les avoit laiflées. Il réfolut d'emporter lui-même peu à peu fes richeffes, & de s'en défaire de façon que fon fecret ne fût point évanté. Il fe conduifit avec tant de circonspection & de prudence, & donna des biais fi naturels au rétablissement de fes affaires, que perfonne ne fut furpris du changement de fa fortune. Il reparut avec fplendeur; & pour fe mettre dans le cas naturel de fe défaire avantageufement de fes Pierreries, il fe fit Joüaillier. Son fond étoit fi confiderable, qu'il devint bientôt un des plus accrédités de Paris.

Cependant il avoit retiré du Couvent sa Fille, dès le moment que fes affaires chan

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gerent. Auffitôt qu'elle parut un grand nombre d'adorateurs fe déclarerent. Le bien attaché à fa beauté lui en attira des plus recommandables; fa douceur, fa modeftie & fon bon caractere, faifoient nonfeulement les delices de celui qui lui avoit donné le jour, mais encore de tous ceux qui avoient accès auprès d'elle. Un jour fon Pere la tira en particulier, & lui demanda avec une affection extrême, fi fon cœur n'étoit prévenu pour perfonne, Ma Fille, lui dit-il, je vous aime. Vous m'êtes chere; je ne veux point contraindre vos inclinations. Il n'eft pas poffible qu'à votre âge vous n'ayez pris du goût pour quelqu'un ; & cela fuppofé, je vous crois trop bien née, pour vous être éprife d'un fujet qui ne vous convienne pas. Ja mais je ne regarderai la fortune ni la condition,lorfqu'il s'agira defvotre établiffement; ce n'eft pas elles qui font la félicité dans ce monde,& plus ou moins de bien ne doit pas vous mettre dans le cas de paffer vos jours malheureufement. Dès le commencement de mon difcours vous vous êtes troublée. Vous

mecraignez,&j'entrevois que vous mesoupçonnez de vous arracher un aveu, pour être en droit de condamner vos inclinations. Non, ma Fille, ouvrez-moi votre cœur. Je vous le répete; je ne veux m'attacher qu'à vous rendre heureuse. Je fuis encore plus riche que le public ne penfe, & je puis hardiment vous répondre que vous ne vous repentirez pas de m'avoir choisi pour votre confident. Leonce, (c'étoit le nom de cette belle fille,) preffée par un Pere fi tendre, foûpira, en avoüant que pendant l'absence de Valzan le feu ayant pris dans l'efcalier, au milieu de la nuit, & ne s'en étant apperçuë que dans le tems qu'elle ne pouvoit fe fauver, un jeune homme, Garçon Horlogeur, dont la boutique dépend de la même maison, avoit ôfé feul s'expofer à périr pour la retirer des flammes; qu'il avoit paffé au milieu du feu dont l'escalier étoit embrafé, & que fes cris ayant fait connoître qu'elle alloit périr, il étoit accouru & l'avoit envelopé dans une couverture pour la préserver du feu par lequel il étoit

repaffé; que le fervice que cet homme généreux lui avoit rendu en cette occafion, l'avoit rendu quinze jours malade & mis en danger de la vie; que touchée d'en être la caufe

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elle avoit

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&

crû devoir l'en aller remercier lui tenir quelquefois compagnie avec une Servante qui l'accompagnoit; que cet homme lui ayant déclaré qu'il brûloit pour elle d'un amour légitime, la reconnoiffance avoit agit fi fortement dans fon cœur qu'elle n'avoit pû s'empêcher de lui avoüer fon penchant. Leonce rougit en prononçant cet aveu, & demeura interdite. Son Pere la raffura, & voulut fçavoir le nom d'un homme à qui, difoit-il, il avoit tant d'obligation. Il se nomme Donal, reprit-elle. A ce nom Valzan recula deux pas. Ah! ma Fille, s'écria-t-il, courez, qu'on le fasse appeller. Ce nom me frappe. Que je fçache qui étoit fon Pere? Il me fera facile, reprit Leonce, de vous conter fon hiftoire; il est fi franc & il a fi peu de vanité, qu'il ne la cache pas: Ileft le fils d'un petit Mercier

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