idée eft impie, & le raisonnement de l'Auteur fe détruit de lui-même. Je n'entreprendrai pas de réfuter fes principes de mouvement. On a démontré qu'ils étoient la plupart évidemment faux; ainfi les conféquences qu'il en tire, ne doivent pas être fort juftes. Je dirai feulement que la notion qu'il a de la matiere, eft incompatible avec le mouvement. L'efpace & la matiere font la même chose pour lui. Suivant cette fupofition il n'y a point de vuide. Or peut-il y avoir du mouvement dans un lieu rempli. Le mouvement n'eft qu'un déplacement des corps qui fe fuccedent les uns aux autres. Comment ces corps changeront-ils de place, s'il n'y en a point pour les recevoir dans le lieu voifin? Et y en a-t-il, fi tout eft rempli ?

Voici encore une autre obje&tion. Avant que la matiere sub

tile, propre à s'accommoder aux petits espaces qui se formoient entre les corps folides d'un plus grand volume, eût été produite; par quel moïen ces corps ne s'embaraffoient-ils pas l'un l'autre, fi l'on n'admet d'abord quelque matiere fluide & fléxible, qui ait facilité leur mouvement? M' Defcartes s'imagine répondre à cette difficulté, en attribuant aux corps un mouvement circulaire. Pour moi je crois que cette raison tombe d'elle-même. Il y a, ce me femble, de l'absurdité à dire que de petits atomes puiffent faire mouvoir la machine de l'Univers. Le mouvement est un des principes favoris de Mr Defcartes, Accordez-lui le mouvement & la matiere; il prétend réfoudre les plus grandes difficultés de la nature. C'eft une chose bien remarquable, que fa Philofophie foit plus défectueufe par les fonde

I

mens que par le refte. Car fi on les fupofe bien établis, les autres parties fe foutiennent affez. Mr Defcartes a tiré cette hypothese de fon imagination, & ne s'eft pas mis en peine de confulter la nature. Il lui étoit indifférent de foutenir le plem ou le vuide. Si le Pere Merfenne* lui eut dit que le vaide étoit autant à la mode, & auffi conforme au goût du fiècle, que le plein fembloit l'être alors, nous euffions eu une hypothese fondée fur le vuide. Elle auroit été fans doute auffi fpécieufe & auffi apparente, peutêtre même plus plaufible, que celle que nous avons préfentement, puifqu'elle auroit répondu au deffein qu'il avoit formé d'abord. Ses premieres idées avoient été pour le vuid? ; & il n'a pris la voye contraire, que par , que par les avis, & fous la conduite du Pere Mer * v. R.pin. Réflex, p. 423.

fenne fon ami. N'est-il pas étonnant de voir aujourd'hui des hommes entêtés d'une hypothefe, qui n'a aucun fondement dans la nature, & que l'Auteur lui-même n'a jamais cruë telle? Elle a eu bien des Cenfeurs; on l'a réfutée folidement dans toutes fes parties: mais perfonne n'y a mieux réüffi, que l'Auteur du Voiage du Monde de Descartes. S'il n'eft pas toûjours décifif, il est par-tout ingénieux; il attaque cette hypothefe de la maniere dont elle doit être attaquée : car on ne peut mieux répondre à une fiction que par une autre.

On nous a appris à faire distinction entre hypothefes & Theories; que celles-ci font des réflexions fubtiles, où nous conduit l'examen de la nature; & que les hypotheses font de pures vifions. ferois bien-aife de voir une théorie fi raisonnable. La plus

plaufible que j'aie encore vûë, eft fondée fur une hypothese, fçavoir la croute de la terre, & la fente de fon écorce. Ne font-ce pas là de véritables fupofitions? Du moins je n'ai pas l'efprit affez fin, pour comprendre ce que cette théorie a de plus folide, que l'hypothefe fur laquelle elle est établie. Il ne me paroît pas que les autres théo ries aïent plus de folidité. Elles femblent d'abord rendre raison de tous les effets naturels; & enfuite on trouve toujours quelque phénomene qui y eft contraire. Par exemple la théorie du Docteur B... eft fort bien inventée. Mais il n'a pas fait une affez grande provifion d'eaux pour déluge. Et comment veut-il les ruiffeaux & les rivieres coulent, s'ils ne defcendent de lieux élevés? Il y a dans la théorie de Mr W... un grand fond d'imagination. La création & le déluge y font

le

que