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velles idées? Je ne fuis point ennemi de la liberté de penfer: mais je fouhaiterai toujours que nous aions quelque regle pour nous conduire. Une regle ne gêne point la liberté: au contraire elle la rend plus parfaite. Sans cela nous ne nous accorderons jamais; & je crains que nous ne tombions à la fin dans la confufior. On nous a propofé pour premiere regle une perception claire & diftincte, & pour feconde la conformité de nos idées avec la réalité des chofes mais ce n'eft pas une bonne marque pour l'une ni pour l'autre qu'il y ait une grande différence de fentimens fur des objets qu'on avoit crû être apperçus le plus clairement, & par des idées tresconformes à la nature de ces mêmes objets. La difficulté confifte à découvrir cette conformité, & à rendre nos pensées claires & diftinctes car tout homme a des. idées,

idées, qui ne font claires que pour lui-même.

On pourroit me faire quelques reproches, fi j'oubliois ici l'art de penfer, qu'on attribue à Mr Arnauld. Il en a tiré d'Ariftote la plus grande partie. Il a feulement appliqué des idées nouvelles aux termes anciens. On reconnoît par-là qu'il n'eft pas fi aifé d'inventer une nouvelle Logique, qu'une nouvelle Philofophie; & on a lieu de croire que celle-ci n'eft pas entierement d'accord avec la raison: autrement il feroit plus facile de concilier la Logique & la nouvelle Philofophie. Cet Auteur fe prévaut de ce qu'il fe fert d'exemples utiles; & il reprend les autres Logiciens d'en avoir apporté de communs. Eftce un defaut de fe conformer à la fin qu'on fe propofe. Les exemples font d'ufage pour éclaircir, & pour expliquer une difficulté. H

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C'eft à quoi des exemples communs & ordinaires font tres-propres. Mr Arnauld tire des Sciences ceux qu'il donne. Il faut, pour les entendre, qu'un homme foit déja fçavant: ce que la Logique, qui n'eft qu'une introduction aux Sciences, ne fuppofe pas. Elle doit être à la portée des commençans, & traitée comme une méthode pour les aider à s'avancer.

La Médecine de l'esprit eft le dernier fiftême que j'aïe vû. On l'a plus eftimé que tous les autres. Pour moi, je m'imagine que la bonne opinion qu'on en a, durera jufqu'à ce qu'il en paroiffe un nouveau. Il eft dangereux de cenfurer un Auteur, dont la réputation eft fi bien établie. Qu'il me foit pourtant permis de dire, que fa médecine paroît trop forte pour les conftitutions de la plupart des hommes. Il avance linfaillibilité de fes remedes, avec

une oftentation qui ne convient qu'à un Charlatan. a Sa vanité ne m'a pas donné des sentimens bien favorables de lui. Il fait peu de cas des Logiciens qui l'ont précédé. Il montre que la perception qui a paflé auprés d'eux pour un figne fi évident de vérité, n'eft fouvent qu'un effet de l'imagination. C'eft pourquoi il prend fon Criterium plus haut, & il le place dans la conception, ou dans un degré de la pensée encore plus élevé. Mais que nous importe, que la certitude de nos connoiffances réfide dans la perception, ou dans la conception? ce n'eft pas là l'effentiel. Nous demandons qu'on nous mette dans une voie fûre ; & je ne vois pas qu'on nous avance beaucoup, de nous dire

que nous ne devons convenir de rien,avant

que de l'avoir conçu. Le feul effet

a Medi cin, ment. Præf.

b Ibid. par. 2. P. 43.

avantageux que cette opinion puiffe produire, eft de nous faire entendre combien nous fommes bornés. Car fi nous ne fommes affùrés de rien, que nous ne l'aïons conçu, nos connoiffances font bien étroites, puifqu'il y a peu de chofes que nous concevions parfaitement. Cet Auteur, après tout, femble bien penfer; il eft feulement trop rêveur pour être un grand Logicien. Tous ceux qui liront la Médecine du corps, conviendront que j'ai fujet de parler ainfi. Il n'y a pas d'apparence qu'il foit long-temps en vogue, fi fes regles de raifonnement ne font pas plus convenables à l'efprit, que fes regles de fanté e font au corps.

宗菜

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