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Qui parlera done mieux des effects heroïques,
Ton vers eft naturel, affés coulant & doux, &c.

D'Ortigues confent d'exécuter le confeil de la Renommée. Henri IV, Louis XIII fon Succeffeur & la Reine mère font l'objet des fix pièces fuivantes: Sonnet à la mémoire d'Henri IV; Epitre à Louis XIII; le Dauphin ; la Louange des femmes; parallèle entre le Soleil & les Rois; Epitaphe d'Henri le Grand. L'Auteur pleure dans une autre pièce, la mort du Duc d'Or leans. La dixieme eft un Difcours militaire au Roi: il eft fort fenfé, rempli d'inftructions utiles, & dont la pratique, peu connue, feroit avantageuse

à un Royaume. Le Poëte étoit inf truit des abus qui corrompent la profeffion militaire. Il les détaille & montre ce qu'il faudroit réformer & ce qu'il feroit neceffaire d'établir. I parle en homme qui connoit fon état, qui l'aime & qui n'en cherche que la perfection. Ses autres poëfies font fur la vertu, la vaillance l'éducation des Princes; des Contes; des Hymnes; 99 Sonnets fur divers fujets, addreffés au Roi. D'Ortigues parle ainfi de lui-même dans le 7me.

Je ne fuis que Cadet, vraiment, je le confeffe;
Mais j'ai mille vertus en ce monde hérité.
Je préfère l'honneur à la vaine richeffe,
Et tu n'adores rien qu'un démon argenté.
Si jadis mes ayeux m'ont acquis la nobleffe,
Je ne perds point ce grade ou cette qualité:
Tu cherches un Baron, je veux une Princesse
Remplie de vertu, de grace & de beauté.

Je ne fuis que Cadet; mais mon courage afpire
De regir quelque jour le fceptre de l'Empire..
Les Cadets font toujours pourvus d'une belle ame.

D'Ortigues étoit fort ami de François d'Escalis (a) qu'il a auffi chanté ailleurs.

....

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Par fon 33me. Sonnet, on voit qu'il avoit épousé une Demoiselle née à

(a) FRANÇOIS D'ESCALIS étoit né à Aix d'une famille qui a donné des perfonnes diftinguées dans l'Epée & dans la robe. It fit imprimer en 1602 fes poëfies dédiées à Guillaume du Vair, premier Préfident en Provence, & le protecteur de tous les gens de lettres. L'Abbé Goujet.dans fa Bibliothèque Françoife, dit beaucoup de mal des poëfies de d'Efcalis.

D'Ortigue qui le connoiffoit fans doute mieux, avoit dit de luj

La fuperbe Mantoue adore fon Virgile,

Le païs Vandofmois adore fon Ronfard.

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Goult, de l'ancienne famille de Barras. Dans les autres Sonnets, il fait le portrait des Cours de France, d'Efpagne, d'Angleterre, de Flandre, de Savoie, de Tofcane, de Rome & d'Allemagne, D'Ortigues avoit vifité ces Cours; il les peint toutes en laid; fes portraits font des fatyres. Il pa-. roit fur-tout fort mécontent du féjour qu'il avoit fait en Efpagne; & après avoir dit beaucoup de mal de Rome, il nous apprend qu'il y avoit vifité avec foin les antiquités, & tout ce qui pouvoit mériter la curiofité d'un honme qui cherche à s'inftruire. Quand il quitta Rome, la guerre étoit dans le Milanez, & il paroit qu'il y prit part.

Après ces Sonnets, on trouve la fuite des Poëmes d'Ortigues, qui contient Thymne du faint Sacrement, au Cardinal du Perron; la Cnence, à M. de Sillery, Chancelier de France & de

Navarre: l'Hymne des Elémens, Poëme philofophique à M. de Bercy, Préfident au grand Confeil. L'Hymne de la Pauvreté, au P. Anfelme, Capucin, que fon père avoit tenu fur les fonts de Baptême; deux Difcours, le premier, contre un ministre qui l'avoit appellé Athée, le fecond fur la Providence contre les Athées; & enfin un Recueil d'épitaphes. Le Poëme contre un Miniftre, eft fort long. D'Ortigues y fait fa profeffion de foi; il répouffe avec force l'accufation d'Athéisme intentée contre lui; & ufant de repréfailles il attaque vivement le Ministre & fa Secte fur la Doctrine & fur les mœurs. C'eft prefque un écrit théologique, où le Poëte venge les principaux articles de la Religion Catholique, combattus par les Hérétiques. Il y parle fort mal des Pfeaumes de Marot, & dit de l'Auteur.

Il entendoit bien mieux d'écrire en vers lubriques,
L'épitaphe d'Alix, que les facrés Cantiques,
Ce fot n'entendoit pas le fens de l'Ecriture......

Le Difcours contre les Athées contient de bonnes preuves en faveur de l'immortalité de l'ame.

Les épitaphes font de deux fortes: il y en a de férieuses, & c'éft le plus. grand nombre. Il y en a auffi quelques unes de badines, telles que celles de Florentin, petit chien pelé; de Matou le plus illuftre des chats; du Car

naval avec fon oraifon funèbre. Les épitaphes férieufes font d'affez longs éloges funèbres de plufieurs perfonnes diftinguées par leur mérite ou par leur naiffance.

Las de la guerre & des voyages, d'Ortues fe fixa dans fa patrie, après laquelle on l'entend foupirer fouvent dans fes Sonnets. Comme il étoit en

La Tufcane chérit Petrarque fon mignard,
D'Efcalis eft l'honneur d'Aix fa ville natale.

Claude Cheinél & Claude de Réauville ont auffi fait l'éloge de d'Efcalis. Le premier le place dans le lieu le plus honorable du Parnaffe; & le fecond prétend qu'il l'emportoit fur Homere.

core en état de fervir, fa retraite fut voici ce qu'il en écrivit à un de fes blâmée. Il crut devoir fe juftifier: amis.

Tu dis, en foupirant, qu'un homme de ma forte
Ne doit borner fes jours en ce mien lieu natal:
Je réponds là deffus que mon aftre fatal,
Ou mon cruel deflin ne veut plus que j'en forte.
Mars a pris ma jeunesse.

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J'ai roulé quatorze ans d'un & d'autre cofté:
Maintenant il me plait chez moi d'être arresté,
Pour affifter ma mère en fa décrépitude:
Elle a porté déjà quatre-vingt & dix ans :
La Cicogne m'apprend telle follicitude:
Voilà pourquoi je fuis proche de mes parens.

Ce fut dans fa retraite que d'Ortigues
compofa fon Défert fur le mépris de
la Cour, imprimé à Paris in 8. en
1637. C'est un Poëme divifé en 12
livres, tous fort courts, chacun com-
pofé d'un nombre de Stances où on
ne voit guère de but marqué. Dans
le premier livre, il parle très-mal de
la Cour, & très-avantagenfement de
la folitude. Dans le fecond, il loue les
Bergers. La fiction eft l'ame des autres.
Dans le douzième, notre Solitaire quitte
fon defert, prend la réfolution de re-
tourner à la Cour, & fait l'éloge du
Roi & de Gaston de France, à qui ce
Poëme paroit être adreffé; c'eft tou-
jours une fiction. D'Ortigues ne quitta
point fa patrie, il y paffa tranquille-
ment le refte de fes jours, occupé des
affaires de fa maison, & entretenant
un commerce littéraire avec fes amis
Jufques à fa mort, arrivée vers l'an
1630.

(C. B.)

ORTIGUES, SIEUR DE VAUMORIÈRE, (PIERRE D') fils du précédent, s'eft acquis une réputation brillante dans

le dernier fiècle. Il nâquit à Apt, où il paroît qu'il ne fit pas un long séjour. Etant allé s'établir à Paris, il y compofa plufieurs ouvrages, qui demandent de l'efprit & de la politeffe, c'est-à-dire, qu'il s'accommoda au goût qui regnoit alors, & qu'il donna au Public plufieurs Romans dignes de fon eftime. Ce ne furent cependant pas là toutes fes productions. Il mit au jour plufieurs autres ouvrages qui lui firent honneur, & qui lui acquirent de la réputation. Il eut par ce moyen entrée dans l'Académie d'Hedelin, Abbé d'Aubignac, compofée de perfonnes de mérite & d'érudition. Il en devint même Sous- Directeur, ou Vice-Recteur, comme s'expriment quelques Auteurs. On ignore les détails de fa vie. Richelet nons apprend seulement qu'il étoit brouillé avec la fortune, & qu'il avoit été prifonnier au Châtelet pendant trois femaines; mais il n'en dit pas le fujet.

I mourut vieux, en 1693; apparemment dans le mois de Septembre, puifque fa mort fut annoncée dans le Mercure du mois d'Octobre

de la même année. Mademoiselle de Scuderi, qui a donné fon éloge, n'y á rien dit de fa naiffance, de fa mort, ni de fa fortune; elle s'eft bornée aux excellentes qualités de fon efprit & de fon cœur. En voici les principaux

traits.

» foupie. Il avoit des idées & des
» termes que perfonne ne pouvoit pré-
>> voir, & c'étoit toujours chofes nou-
>> velles. Les graces ornoient tous fes
>> difcours, & la douceur de fon na-
» turel se répandoit fur fa perfonne. Il
>> parloit bien; il écoutoit encore mieux,
>> & fa complaifance déterroit dans les
>> gens certain mérite & certain tour
» d'efprit qu'ils ne connoiffoient pas
» eux-mêmes. Le don de converfation
» n'a jamais été prodigué avec plus
» d'avantages par la nature. Sa facilité
» étoit foutenue d'un fonds qu'on ne
>> trouve guère. Il avoit une connoif-
>> fance parfaite de l'antiquité. Il n'y a
>> pas un nom connu dans l'Hiftoire,
>> fur lequel il ne fût un détail curieux
» & peu connu. Il favoit mettre, entre
» l'Hiftoire & la Fable
un rapport

» vraisemblable, qui persuadoit agréa-
» blement. Il étoit vif & précis dans

« M. de Vaumorière étoit un Gentil>> homme, illuftre par fa naiffance, & » diftingué par un grand nombre d'ou» vrages eftimés. Sa moindre qualité » étoit fon bel efprit; il brilloit par» tout; mais il étoit encore plus hon» nête homme, qu'il n'étoit homme de » Lettres. Il avoit l'efprit vif, les fen>> timens naturels & nobles, les idées » juftes & délicates, les expreffions les expreffions >> gaies & hardies, les manières dou>>ces & engageantes, le cœur au-deffus » de fon pouvoir & de fon état gené» reux; empressé, noble, prévenant, » ne connoiffant d'autres intérêts que >> ceux de fes amis, & d'autre plaifir» fes narrations, furprenant dans fes » que celui d'en faire; il n'avoit rien » peintures, favant dans fes remarques, » à lui; tous ceux qui le connoiffɔient » ennemi des parenthèfes enjoué » étoient plus maîtres de ce qu'il avoit >> naturel, éloquent, & fuivi par-tout,>> » que lui-même. Il difoit toujours que Vaumorière a compofé divers ouvra» l'argent & le cœur ne font bons que ges. Le premier qu'il donna au Public » lorsqu'on les donne; à quoi il ajou- fut » toit, que c'étoit un mal d'être duppe; >> mais que c'en étoit encore un plus » grand de craindre toujours d'être. toujours d'être » duppé. Dans un âge fort avancé, il > connoiffoit tout le feu d'une belle jeu >>neffe; il étoit enjoué & galant, >> modefte avec les gens d'efprit, ré» jouiffant & folide avec les jeunes » gens, toujours doux, toujours poli, » toujours agréable en toutes fortes de »Sociétés ; il portoit la joie & le plai» fir avec lui; fa feule préfence avoit » l'art de reveiller une converfation af

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le Grand Scipion. Paris,` 1658, in-8°. 4 vol. On étoit alors dans le goût des grands Romans; notre Auteur crut ne pouvoir mieux fe produire dans le monde, qu'en compofant quelque chofe en ce genre. Ce goût ayant changé quelque tems après, il changea auffi fes occupations. 2°. Il a continué Pharamond, Roman de la Calprenède, qui en avoit donné 7 volumes, Ortigues en ajouta 5 autres, dont le premier parut en 1665, in-8°. M. de Sallo parla fort avantageufement de cette continuation dans le Journal des Savans, dú 23 Fé

vrier 1665, « Il y a lieu d'efpérer, dit>> il, que l'on ne regrettera pas long>> tems la mort de celui dont il fuit les » traces. Il eft parfaitement bien entré » dans l'efprit de cet Auteur. Il con» ferve aux Héros & aux Héroïnes les » mêmes sentimens & les mêmes ca»ractères qu'il leur avoit donnés ; & » dans fon ftyle, il a pris cet air grand » & magnifique qui lui étoit propre. » On peut même dire que le difcours » de M. de Vaumorière eft plus uni & » plus châtié que le fien, & qu'il a » mieux fu retenir les emportemens » du grand style. »

Le Parnaffe réformé ne parle pas de cet Auteur avec le même éloge; quoiqu'il n'en parle pas tout-à-fait défavantageufement. 3°. L'Hiftoire de la Galanterie des Anciens ; Paris, in- 12. 1671, 2 vol. eft le troisième de fes ouvrages. 4°. Il donna enfuite Diane de France, nouvelle Hiftorique Paris, in-12. 1674. 5°. Madlle. de Tournon; Paris, in-12. 1679. Quelques éditions placent mal-à-propos cette nouvelle parmi les Œuvres de Madame de Villedieu. 6°. Mademoiselle d'Alençon. 7°. Adélaïde de Champagne. 8°. Agiatis, Reine de Sparte. 9°. L'Art de plaire dans la converfation. Paris, in-12. 1688. L'on trouve dans cet ouvrage, qui eft partagé en 20 Dialogues, des préceptes excellents, qui méritent. d'être lus. 10°: Harangues fur toutes fortes de fujets, avec l'Art de les compofer; Paris, in-4°. 1688. Il en à paru une feconde édition: augmentée en 1693, in-40. & une troifième, également augmentée, après la mort de l'Auteur, avec une Differtation de l'Abbé Dujarry, fur les Orai-, fons Funèbres; Paris, in-4°. 1713. Les

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Harangues qui font dans cette collec tion, n'appartiennent pas toutes à Vaumorière. M. Gibert a fait la critique du Traité préliminaire, dans fes Jugemens des Savans tom. 3, pag. 222 & fuiv. 11°. Lettres fur toutes fortes de fujets, avec des Avis fur la manière de les écrire; Paris, in-12. 1689, 2 vol. Réimprimées en 1695, in-12, en 2 vol. & plufieurs autres fois enfuite. 12o. Des Vers, compofés par Vaumorière, qui fe trouvent au commencement de la Macarife de l'Abbé d'Aubignac. Paris in-8°. 1664. ( C. B. )

OSCUS, ou OSCIUS, né à Marfeille, fe diftingua à Rome parmi les Orateurs qui brilloient vers la fin du règne d'Augufte, & fous celui de Tibère, Il s'étoit déja fait admirer dans ie Barreau de fa Patrie.

Quelques modernes ont dit qu'il fut élève de Latro Porcius ; d'autres ont feulement avancé qu'il fut fon imitateur. Mais c'est une erreur qui n'eft appuyée du témoignage d'aucun Auteur ancien : il eft à préfumer que l'on a confondu Ofcus avec Sparfus, dont Senèque a parlé. C'eft de lui que l'on fait qu'Ofcus avoit un excès d'amour-propre, qui lui donnoit la hardieffe d'infulter tous fes contemporains. Il avoit même l'habitude d'affaifonner tous fes difcours de fatyres mordantes & obfcènes. Delà Pacatus, dont nous parlerons bientôt, l'ayant rencontré un jour, lui tint ce difcours; bonjour Ofque; faifant allufion à la nation des Ofques, qui paffoit pour être peu délicate en matière de conversation, & qu'on accufoit d'employer le plus fouvent, des termes & des expreffions indécentes.

On donna un furnom à Ofcus

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