Imágenes de páginas
PDF
EPUB

» pelle, M. le Chevalier Paul, qui, par » fa charge, par fon mérite & par fa

» dépenfe, eft le premier & le plus » confidérable du Pays.

[merged small][ocr errors][merged small][ocr errors][merged small]

>> Ces vers, continuent nos Voya» geurs, font auffi magnifiques que fa » mine; mais, en vérité, quoiqu'elle en vérité, quoiqu'elle >> ait quelque chofe de fier, il ne laiffe » pas d'être commode, doux & tout » à fait honnête. Il nous regala dans » fa caffine, qui eft fi propre & fi » bien entendue, qu'elle femble un >> petit Palais enchanté. >>

Le Chevalier Paul étant entré dans le Port de Malte avec trois Galères de France, y reçut les plus grands honneurs de la part du Grand- Maître Raphaël Cotoner; il fut enfuite envoyé en Candie, où il tranfporta trèsheureufement 3600 hommes au fecours des Vénitiens, qui y étoient preffés par les Turcs.

En 1662, il commanda une Escadre de fept Vaiffeaux, & arbora, pour la première fois le pavillon de ViceAmiral.

En 1663, il fe battit, avec le feul Vaiffeau l'Hercule, de 28 canons & de 320 hommes d'équipage contre 25 Vaiffeaux Turcs; il leur fit face pendant un jour entier, & leur échapa enfuite durant la nuit, ne pouvant fe flatter de réfifter plus long-tems à tant d'ennemis: il joignit dans cette occafion la rufe à la valeur.

Après avoir contribué à la défaite de plufieurs bâtimens Barbarefques, qui infeftoient les côtes d'Italie & de Provence, il eut part à l'expédition de Gigery, livra un combat fous le fort de la Goulette auprès de Tunis prit trois vaiffeaux aux infideles, & en brûla deux.

La dernière campagne du Chevalier Paul, fut celle à laquelle il conduifit, en 1666, avec fon Efcadre, Françoife de Savoie-Nemours à Lisbonne, où cette Princeffe alloit époufer Alphonfe Roi de Portugal. Ce Monarque le combla d'honneurs & de préfens; il le vifita même fur fon bord. Le Chevalier Paul, averti de fa venue plufieurs heures auparavant, lui fit fervir, ainfi qu'à toute fa Cour une collation fplendide. Il revint enfuite à Toulon avec les vaiffeaux qu'il commandoit.

Depuis cette époque, la goutte & plufieurs autres infirmités le mirent hors d'état de fervir plus long-tems. Il commanda la Marine à Toulon jufqu'à fa mort. Son mal empirant tous les jours, il reçut les derniers Sacremens de l'Eglife avec beaucoup d'édification & mourut le 18me. Octobre 1667, à l'âge d'environ 70 ans. Il fit les pauvres fes héritiers, & voulut

[ocr errors]

être enterré parmi eux au Cimétière. Le P. de Villecrofe, prêtre de l'Oratoire, prononça quelques jours après dans la Cathédrale, fon oraifon funè

bre, qui n'a pas été imprimée. Les foldats qui l'aimoient autant qu'il l'ef timoient, lui firent cette Epitaphe.

Paffant qui vas fi vitement,
Regarde cette Sepulture,
Et confidère une aventure
Digne de ton étonnement:
Celui qui nâquit pour combattre,
Et qui vivoit dans le combat;
Eau, feu, fer, ne pûrent l'abatre,
Une fievre lente l'abbat.

Le Chevalier Paul étoit d'une taille affez haute, il avoit quelque chofe de fombre dans la phisionomie: fa mouf tache & fon toupet formoient une efpèce de croix de Malte. Il étoit cependant plus poli que ne le font communément les marins, & fi doux qu'il ne fe mettoit jamais en colère. Il avoit une très-petite voix, & parloit peu. Il traitoit le foldat avec une extrême bonté. Jamais homme ne fut plus intrépide dans le danger, & jamais Capitaine de vaiffeau ne pofféda mieux fon métier.

Ce feroit lui enlever le plus beau titre de fa gloire, que de paffer fous filence le trait fuivant. On verra avec admiration, que loin d'oublier la baf feffe de fon origine, il fe plaifoit à la rappeller aux autres. Un jour qu'il paf foit fur le port de Marfeille avec un brillant & nombreux cortège d'Officiers qui lui faifoient leur cour, il apperçut à quelque distance un Matelot qu'il crut reconnoître: s'en étant approché, il lui dit mon ami, pourquoi me fuyez-vous? pensez-vous que la fortune m'ait fait oublier mes premières con

noiffances? puis se tournant vers ceux qui le fuivoient: Meffieurs, leur dit-il, voilà un de mes anciens camarades; nous avons été mouffes fur le même vaiffeau; la fortune m'a été favorable, elle lui a été contraire; je ne l'en ef time pas moins; fouffrez que j'aie avec lui une lui une demi-heure d'entretien. Il le fit affeoir à fes côtés, lui parla des aventures de fa jeuneffe, s'informa s'il avoit des enfans, lui recommanda d'aller l'attendre à fon hôtel; & dès le même jour il lui procura dans la Marine un emploi qui le fit fubfifter honorablement avec fa famille.

PAUL, (PIERRE), Religieux de l'Ordre de St. Dominique, & Préfet Apoftolique dans les Miffions de l'Amérique, raquit à Aix le 11 Avril 1642, de Claude Paul, originaire de Saint Chamas, Avocat au Parlemen de Provence, vence, & de Françoife Decourt. Ses parens lui donnèrent l'éducation la plus chrétienne; quoique d'un caractère vif & un peu ardent, il profita de leurs. leçons avec docilité, & allia de bonne heure à l'amour des études, celui de la prière & des autres exercices de piété.

[ocr errors]

Après avoir fini fes humanités, Paul, âgé de 15 ans, entra en 1657, dans l'Ordre de St. Dominique à Saint-Maximin, où il fut conftamment fidèle à la grace de fa vocation. L'emiffion de fes vœux redoubla fa ferveur, & il commença dès lors à marcher à grands pas dans la voie de la fainteté. Pour renouveller fa piété, qu'il craignoit de laiffer refroidir par les exercices de l'école, il faifoit tous les ans une retraite de dix jours. Ce fut dans une de ces retraites annuelles que le P. Paul commença d'entrer dans cette carrière de vertus & de bonnes œuvres qu'il parcourut jufqu'à fa mort, avec une conftance héroïque.

Il fe prépara aux Ordres facrés par la prière, la pénitence, l'étude & la méditation des livres faints. Du moment qu'il eut été élevé au Sacerdoce, avant la fin de 1666, il fut en état de remplir les premiers devoirs de fa vocation, dans le ministère de la parole; emploi qu'il a le moins interrompu pendant plus de 60 ans.

Il avoit prêché durant plufieurs années avec le zèle ardent & la noble fimplicité d'un Apôtre, dans les Diocèfes d'Aix, de Marfeille & d'Avignon, lorfqu'en 1684, il fut envoyé par fon Général à la Martinique avec la double qualité de Miffionnaire Apoftolique & de Supérieur de la Miffion dans cette Ifle. Ses travaux, fes difcours & fes exemples changèrent bientôt la face de la Colonie, & l'Ile entière ne l'appella que le faint Miffionnaire, le Saint homme.

Cependant fa haute vertu ne le garantit pas de la calomnie. Un homme puiffant, dont il avoit inutilement tenté

[ocr errors]

de réformer la conduite fcandaleufe le fit accufer par une femme d'avoir voulu la féduire. Le P. Paul, cité par cet homme devant une nombreuse affemblée, écouta en filence la plainte de cette malheureufe; & le coupable lui ayant fait enfuite une févère correction, il fe contenta de lui dire, en fe retirant de fon tribunal: Je vous affure, Monfieur, que fi Dieu m'abandonnoit, je ferois capable de plus grands crimes; mais par fa mifericorde, je fuis innocent de celui qu'on m'impute. La modeftie du faint Miffionnaire le rendit plus refpectable & plus cher à toute la Colonie, & fit retomber fur le feul coupable toute la confufion dont il avoit voulu le couvrir.

Le P. Paul, qui avoit négligé fa propre juftification, prit hautement la défenfe de deux de fes Religieux que le même homme avoit attaqués, & les fit pleinement juftifier par un acte public, en 1685.

Rappellé en France par fes Supérieurs, il laiffa une telle opinion de fa fainteté dans l'Ile de la Martinique, qu'on y en conferve encore le fouvenir, & qu'on n'y parle de lui qu'avec vénération.

Son retour dans le Couvent de SaintMaximin, dont il étoit déja Prieur en 1692, parut y rallumer l'efprit de ferveur & de prière, le zèle du falut des ames, l'amour & la pratique des obfervances regulières. Le Supérieur qui l'avoit précédé, avoit amaffé par fes épargnes une fomme très-confidérable. Le P. Paul l'employa toute entière au foulagement des pauvres; & après l'avoir épuifée, il continua de les fecourir, en

leur

leur fournissant du blé, du pain, du vin, & jufqu'à des couvertures de lit pendant un hyver rigoureux; il donna même la fienne, dans cette faifon, à une pauvre mère de famille, & aima mieux lui-même endurer le froid que de fouffrir que les pauvres enfans de cette femme en fuffent les victi

mes.

Le trait fuivant de la charité du P. Paul ne doit pas être omis. La Communauté de Saint-Maximin étant chargée de la Cure, elle envoye tous les dimanches & toutes les fêtes un de fes Prêtres à une Chapelie rurale qui eft à une lieue de la Ville, pour faire entendre la meffe & procurer quelque inftruction aux gens de la campagne. Pendant les grands froids de l'hyver, le Religieux deftiné pour cette fonction, alla un jour représenter au P. Paul, que les vents, la pluye ou la neige avoient rendu les chemins impraticables, & qu'il ne croyoit pas qu'on pût entreprendre de faire une lieue, tandis qu'on n'ofoit pas même paroître dans les rues; il ajouta que quand même on s'expoferoit à toutes les injures du tems, ou n'en feroit pas plus avancé, , parce que les payfans qui fe trouvoient à quelque diftance de la Chapelle, ne fe croiroient pas obligés de fortir de leurs maifons. Vous avez raifon, mon R. P., répondit le Saint Prieur: Le vent eft fi froid & fi violent, que vous pourriez en être bien incommodé: je vous prie de dire la meffe ici; quelqu'autre plus robufte fera le refte. Un moment après, il prend fon bâcon, prie un Frère de vouloir l'accompagner, & fe met en chemin. Ce ne fut pas fans avoir beaucoup

Hommes Illuft. de Prov. Tom. II.

fouffert, qu'il arriva au terme. Le Fermier qui avoit fa demeure auprès de la Chapelle, fur le feul avec fa famille, qui pût affifter aux prières, au catéchifme & à la meffe, après laquelle le P. Paul fe remit en chemin, fans vouloir ni fe préfenter au feu, ni prendre quelque nourriture, quelque befoin qu'il eût de l'un & de l'autre. Ayant rencontré fur fon chemin un pauvre prefque nud & tranfi de froid, il lui donna fes bas & fes fouliers, & continua fa marche fur la glace & parmi les cailloux. Ses pieds furent bientôt enfanglantés, mais ce n'étoit pas ce qui l'embarraffoit. Son unique crainte étoit de rencontrer quelqu'un qui ne lui gardât pas le fecret; il s'affura de celui de fon compagnon; & lorfqu'ils furent près de la Ville, il l'envoya au Couvent pour lui chercher une paire de bas & de fouliers. Il fe tenoit caché en l'attendant, derrière un buiffon; car jamais Saint ne craignit plus les yeux des hommes, dans les actions qui pouvoient attirer leurs louanges.

Ayant été élu Prieur du Couvent de Montauban, avant d'avoir achevé fes trois années dans celui de SaintMaximin, le P. Paul fe. hâta de s'y rendre dans l'efpérance de travailler avec fruit à la converfion des prétendus-Réformés: fon efpérance ne fut point trompée; il en ramena plufieurs dans le bercail de l'Eglife.

Il repaffa les mers, & exerça le faint ministère, en 1696, dans l'Ile de Saint-Domingue, avec la qualité de Prèfet Apoftolique, & de Vicaire général de la Congrégation du St. Nom de Jefus. Ces titres avoient d'abord ef

G

frayé fon humilité, mais on lui fit comprendre qu'il devoit les accepter pour donner plus de poids & d'autorité à fes paroles. Sa vertu ne fut point éprouvée à Saint Domingue, comme elle l'avoit été à la Martinique. Dès fon arrivée il y fut lié d'amitié avec M. Ducaffe, Gouverneur de l'Ifle, homme auffi diftingué par fes vertus que par fa place. Son zèle s'exerça préférablement fur les Flibuftiers, que les autres Miffionnaires efpéroient moins "de toucher. Ces hommes livrés aux plus brutales paffions, refpectèrent l'éminente fainteté du P. Paul; ils l'écoutèrent, & la plupart d'entr'eux fe convertirent. Pénétrés de fa douceur, de fa charité, de fon amour pour eux, ils l'appelloient tous leur Prédicateur & leur Père.

Il avoit été très-difficile jufqu'alors de tirer quelque utilité publique des Flibuftiers. Le P. Paul, par l'afcendant qu'il avoit fur eux, les fit embarquer en 1697, fur une Escadre envoyée de France à M. Ducaffe pour l'expédition de Carthagène. Il s'embarqua lui-même avec le Gouverneur, foit pour éfcourir les mourans, foit pour empêcher, autant qu'il feroit en lui, les défordres, les violences & les injuftices prefque inféparables de la prife d'une place. On le vit s'expofer comme un foldat, paroître dans la tranchée & jufques fous le feu des affiègés, exhorter les bleffés & les mourans, les abfoudre & recevoir leurs derniers foupirs. On le crut, pendant un temas, au nombre des morts, & l'on fut fort furpris un jour de le voir revenir couvert de fang & de pouffière. Après la prife de la place, M. Du

caffe ne le voyant point dans fon vaif feau, le fit chercher avec foin, & ne donna le fignal du départ qu'après avoir appris que ce faint Miffionnaire étoit fur un autre bâtiment avec les malades & les bleffés qu'il n'avoit pas voulu abandonner. voulu abandonner. Ce bâtiment fut pris & conduit à la Jamaïque par les Anglois, qui, pénétrés des vertus de leur prifonnier, le traitèrent avec ref pect.

La paix de Rifwich ayant procuré la liberté au P. Paul en 1697, il ne s'en fervit que pour continuer dans l'Ile de Saint-Domingue les fonctions du ministère avec une nouvelle ardeur. Il ne fortit de ce theâtre de fes travaux & de fa gloire que pour se dérober à l'admiration & aux applaudiffemens des peuples, aux yeux desquels on affûre qu'il avoit opéré plufieurs miracles. Un Religieux digne de foi, arrivé à Saint-Domingue, 20 ou 24 ans après le départ du Serviteur de Dieu, attefta qu'il n'entendit parler dans toute la Colonie, que de la fainteté du P. Paul.

Revenu en France, il fut encore un fujet d'édification pour fes frères, foit dans le Couvent de Touloufe, qui l'avoit élu Prieur en 1703, foit à Montpellier, à Avignon & autres Villes de Provence fur-tout à Saint-Maximin, où il passa faintement les douze dernières années de fa vie.

[blocks in formation]
« AnteriorContinuar »