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pape, fuivant la coûtume établie par fes prédeceffeurs, de conferer les benefices de ceux AN. 1509. qui meurent à la fuite de leur cour, avoit conferé de fa pleine autorité un évêché de Provence, dont le titulaire étoit mort en cour de Rome. Le roi prétendit que c'étoit une infraction à leur dernier concordat. Mais comme il eft trifte de poursuivre une fatisfaction en cour de Rome où l'on ne fe preffe jamais de la donner, Louis XII. pour fe faire faire plus promptement raifon, fit faifir le revenu de tous les benefices que les prélats de la cour de Rome poffedoient dans le Milanez. Jules irrité du procedé du roi, refufa le chapeau de Cardinal à l'évêque d'Alby, qui s'étoit exprès rendu à Rome fur fa parole: mais c'étoit une foible vengeance. Le roi lui en laiffa tout le Contentement, perfuadé que tenant ferme de fon côté, il fçauroit bien le faire changer finon de difpofition, au moins d'action. En effet le pape voiant qu'il n'étoit pas le plus fort, ceda au roi. Il confera l'évêché de Provence fur la nomination de ce prince, & promit d'agir de même à l'avenir: il donna auffi le chapeau de cardinal à l'évêque d'Alby; le roi de fon côté accorda la main-levée aux beneficiers Milanois.

LVII.

Il ne fe pouvoit rien de plus heureux pour les Venitiens que ces diffenfions, qui com- Differend mettoient le pape & le roi, & ils tâcherent entre l'emd'en profiter pour le réconcilier avec Rome. pereur & le Pendant ce temps-là il arriva un differend gon tou

roi d'Arra

Confiderable entre Maximilien & Ferdinand chant la

29. n. 90.

roi d'Arragon, dont la république fçur auffi Caftille. Marianal tirer avantage. C'étoit à l'occasion du gouvernement de la Caftille. Depuis long-temps Guicciard on cherchoit tous les moiens d'accorder ces deux princes; ce qui n'étoit pas aifé, parce

que chacun vouloit avoir feul la régence de AN. 1509. Ce roiaume. Ferdinand confentoit bien, au cas que la reine Jeanne vînt à mourir, de remettre l'administration à l'archiduc Charles fon petit fils, dès qu'il auroit atteint l'âge de vingt ans, comme la reine Ifabelle. l'avoit reglé par fon teftament, & felon la détermina tion des loix du roiaume: mais il prétendoit être maître de cette régence tant que la reine Jeanne fa fille vivroit, puifqu'en qualité de pere la tutelle lui appartenoit felon toutes les loix, fans que le teftament de la reine Isabelle y pût donner la moindre atteinte. Ainfi ce prince ne vouloit s'en tenir au teftament qu'autant qu'il lui étoit avantageux, & prétendoit changer les claufes qui étoient contraires à fes interêts.

LVIII.

bitre du differend

entre ces

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La décifion de cette affaire fut renvoïée au Le roi de jugement de Louis XII. qui fut nommé du France ar- confentement de l'empereur & du roi catholique, conjointement avec la cardinal d'Amboife. Les articles du jugement décidé à Blois dans le mois de Decembre, furent I. Que lo roi d'Arragon conferveroit la régence de CaMariana ftille pendant qu'il vivroit, de la manie1.29. n. 90. re qu'on vient d'expofer. II. Que s'il avoit Guice. 8. des enfans mâles de la reine Germaine fon bift. d'Efp.1. époufe, il ne laifferoit pas d'affurer à l'archi

deux prin

ces.

Gariba!.

20. c. 12.

an. n. 29.

duc Charles fon petit-fils, la fucceffion à la Ray. bot. couronne de Caftille, & les enfans du fecond lit ne le troubleroient point dans la poffeffion de fes roiaumes. III. Que le roi catholique donneroit des fêretez pour l'accompliffement des conditions. Il y eut quelques conteftations fur les füretez que l'on donneroit. Enfin pour contenter les parties, on convint qu'on feroit reconnoître par les états generaux l'archiduc Charles pour légitime fucceffeur &

héritier des couronnes de Caftille, de Leon & des autres roïaumes qui en dépendent, & AN. 1509. qu'en cette qualité on lui prêteroit un nouveau ferment de fidelité; que de fon côté le roi catholique dans la premiere affemblée des, états de Caftille s'engageroit avec ferment à bien gouverner ces roiaumes pendant la minorité de l'archiduc Charles fon petit - fils, comme il y étoit obligé. Mariana prétend que ces conditions étoient déja accordées entre les parties, avant qu'elles euffent été propofées au roi & au cardinal.

LIX: Le cardinal › Ximenes

d'Oran à

fes frais.

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Gomez in

4.

Mariana I ̧ ́ 29. n. 76.

Ciacon. in Jul 11. t. 3.

Pendant que le roi d'Arragon penfoit à établir fon autorité dans le roïaume de Castille le cardinal Ximenès qu'on nommoit le cardien reprend nal d'Espagne, étendit la domination de fa la conquête majefté catholique chez les Maures, par la célebre conquête qu'il fit de la ville d'Oran fur la côte de Tremecen dans le roiaume d'Al- vita Ximene ger, en cette année 1509. Jerôme Vianelli de l'état de Venife, avoit fait des plans de toutes les places maritimes d'Afrique, qu'il prefenta au cardinal. Entre ces plans étoit celui d'Oran, qui frappa Ximenès plus que p. 380. tous les autres, & le détermina à ne rien épar- Rayn. hes gner pour porter Ferdinand à conquerir cette an. n. 23. place. Mais ce prince étoit trop occupé de la guerre des Venitiens pour fonger à un autre deffein: il loua le projet du cardinal; mais il en remit l'execution un autre temps, ce refus ne le rebuta point. Comme l'archevêché de Tolede, & les emplois qu'il avoit à la cour, lui produifoient de grands revenus, il réfolut de faire lui-même cette conquête à fes dépens, s'il pouvoit obtenir le confentement du roi. Il lui en écrivit, & après beaucoup de délais & de difficultez Ferdinand lui accorda ce qu'il fouhaitoit, à condition que

s'il ne réuffiffoit pas dans fon entreprise, tous AN. 1509. les frais qu'il auroit faits feroient perdus pour lui, & qu'il ne lui en pourroit rien demander, ni à fes fucceffeurs.

LX.

de l'expedition d'O

ran.

29. n. 76.

1.

Ximenès accepta cette condition, & en Pierre de propofa en même temps une autre qu'on fut Navarre eft obligé de lui accorder: ce fut que s'il réuffiffait general foit dans fon deffein, Oran releveroit de l'archevêché de Tolede, jufqu'à ce qu'on lui eût reftitué, ou à fon églife, tout ce qu'il auroit Mariana . dépensé pour en faire la conquête. Le deffein du cardinal étoit de paffer lui-même en Afrique à la tête de l'armée qu'il préparoit, & il demanda Gonfalve pour fon lieutenant general, mais le roi le lui refufa. Au défaut de Gonfalve Ximenès donna le commandement general au comte Pierre de Navarre, se réfervant néanmoins pour lui-même la premiere autorité.

Rayn. ut. Sup. n.24.

t

IXI.

l'armée &

1. 4. Rayn. hoc an. n. 23.

Tout l'hyver fe paffa à faire les préparatifs Départ de de la campagne; & fur la fin de Février de du cardinal cette année 1509. le rendez-vous de la flotte Ximenès. qui devoit porter l'armée en Afrique, aïant Gomez in été donné à Malaga, le cardinal fe rendit à vita Ximen. Carthagene, où l'on avoit affigné toute l'armée. C'étoit un fpectacle affez fingulier de voir un cordelier, tel qu'étoit le cardinal Ximenès, endoffer la cuiraffe, & s'ingerer à commander des armées, pendant qu'on laiffoit le grand Gonfalve fans emploi & dans l'obfcurité, fréquenter les églifes & les convens. Pierre de Navarre, Vianelli, & tous les officiers generaux vinrent joindre le cardinal. Ils furent fuivis de toutes les troupes qui arriverent en peu de jours par differens endroits. Le revûë generale en aiant été faite, l'armée campa, & l'on n'attendoit plus que la flotte pour s'embarquer. Elle étoit compofée

de

quatre-vingt vaiffeaux de charge, de dix gros gallions armez en guerre, & fi bien pour- AN. 1509, vûs de vivres & de munitions, que la moitié ne fe trouva pas confumée après la prife d'Oran. A la vûë de la flotte l'armée fe mutina, & voulut être paiée avant l'embarquement; la fédition devint prefque en un moment generale. On foupçonna Pierre de Navarre d'en être l'auteur. Comme c'étoit un foldat de fortune, fans naiffance & fans éducation; il étoit dur, groffier, vif, impetueux, & incapable de plier, & de rien fouffrir: mais l'adreffe & la modération de Ximenès calmerent bien-tôt ce defordre. Quelques officiers s'étant mêlez de l'accommodement, Navarre renouvella le ferment de fidelité qu'il avoit déja fait au cardinal, & lui promit de vivre dans la fubordination qu'il devoit, & d'executer fidelement tous les ordres.

,

LXII.

Dans ces heureufes difpofitions Ximenès monta dans le grand gallion d'Espagne, qui fervoit d'amiral à cette flotte: on leva l'ancre, toute l'armée fortit du port de Carthagene, & mit à la voile le mercredi feiziéme de Mai. Le lendemain qui étoit la fête de l'afcenfion, on découvrit les côtes d'Afrique & l'on entra le plus heureusement du monde dans le port de Mafalquivir; le débarquement fe fit pendant la nuit avec beaucoup d'ordre Débarque& de diligence: & le jour étant venu, l'armée prit tout le terrain qui lui étoit neceffaire de l'armée pour fe mettre en ordre de bataille. Tout au port de étant prêt, Ximenès fortit de fon gallion, & Mafalquimonta à cheval revêtu de fes ornemens pon- Marianal. tificaux, & accompagné des ecclefiaftiques & 29 n. 77. religieux qui l'avoient fuivi. Il étoit précedé Gom. in vit. d'un religieux de faint François qui portoit de- Xim. l. 4·1 yant lui la croix archiepifcopale, & qui avoit

ment du

cardinal &

vir.

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