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des neiges ou des glaces d'où ils ont paffé. Ils ne la confervent en partie, que parce qu'ils foufflent fous le voile d'un brouillard épais qui couvre alors la terre. A la vérité, ces vapeurs ne s'élèvent régulièrement que vers le midi; mais il eft rare qu'elles fe diffipent. Le ciel demeure communément affez couvert, pour que ces rayons, qui quelquefois fe montrent, ne puiffent adoucir le froid que très-légèrement.

Quelle que foit la raison d'un hiver fi conftant fous la Zone Torride, il eft certain qu'il ne pleur jamais ou qu'il ne pleut que tous les deux ou trois ans dans le Pérou. La Phyfique a fait les plus grands efforts pour trouver la caufe d'un phénomène fi extraordinaire. Ne pourroit-on pas l'attribuer au vent du Sud-Ouest qui y règne la plus grande partie de l'année, & à la hauteur prodigieufe des montagnes, dont la cime eft couverte de glaces perpétuelles? Le pays fitué entre deux, continuellement refroidi d'un côté, continuellement échauffé de l'autre, conferve une température fi égale, que les nuages qui s'élèvent ne peuvent jamais fe condenfer au point de fe réfoudre en eaux formelles.

Il faudroit pourtant des pluies, & des pluies journalières, pour communiquer quelque fertilité aux côtes qui s'étendent depuis Tombès jufqu'à Lima, c'est-à-dire, dans un espace de deux cent

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foixante-quatre lieues. Les fables en font fi géné ralement arides, qu'on n'y voit pas même une herbe, excepté dans les parties qu'il eft poffible d'arrofer, & cette facilité n'eft pas ordinaire. Il n'y a pas une feule fource dans le Bas-Pérou ; les rivières ne font pas communes; & celles qu'on y voit n'ont la plupart de l'eau que fix ou fept mois de l'année. Ce font des torrens qui fortent des lacs, plus ou moins grands, formés dans les Cordilières, qui ne parcourent qu'un court espace, & qui tariffent durant l'Été. Du tems des Incas, ces précieufes eaux étoient recueillies avec foin, & par le fecours de divers canaux, répandus fur une affez grande fuperficie qu'elles fertilifoient. Leurs bourgades & leurs villes ont remplacé les cabanes des Indiens, qui, par cette raifon, font en moindre nombre dans le bas Pérou que fur les montagnes. Les vallées qui, de la Capitale de l'Empire, conduifent au Chili, ont une grande reffemblance avec celles dont on vient de parler; cependant en quelques endroits elles fe refufent moins obftinément à la culture.

Defcription des mines du Pérou.

On trouve dans le pays des Incas des mines. de cuivre, d'étain, de foufre, de bitume qui font généralement négligées. L'extrême befoin a procuré quelqu'attention à celles de fel. On y

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taille ce foffile en pierres proportionnées à la force des lamas & des pacos deftinés à les distribuer dans toutes les Provinces de l'Empire, éloignées de l'Océan. Ce fel eft de couleur violette, & a des veines comme le jaspe. Il n'est vendu, ni au poids, ni à la mefure, mais en pierres, dont le volume eft à-peu-près égal.

Une nouvelle matière a été découverte depuis peu dans ces régions: c'eft la platine, ainsi appelée du mot Espagnol plata, argent, dont on a fait le diminutif platina ou petit argent.

C'est une fubftance métallique qui jufqu'ici n'a été apportée du Nouveau-Monde dans l'Ancien, que fous la forme de petits graviers anguleux, triangulaires & fort irréguliers, comme de la groffe limaille de fer. Sa couleur eft d'un blanc moyen, entre la blancheur de l'argent & celle du fer, ayant un peu le gras du plomb.

M. Ulloa eft le premier qui ait parlé de la platine, dans la relation qu'il publia en 1747, d'un long voyage qu'il venoit de faire au Pérou. Il apprit à l'Europe que cette fubftance extraordinaire, & qu'on doit regarder comme un huitième métal, venoit des mines d'or de l'Améri& fe trouvoit en particulier dans celles du nouveau Royaume.

que,

L'année fuivante, Wood, Métallurgifte Anglois, en apporta quelques échantillons de la

Jamaïque dans la Grande-Bretagne. Il les avoit reçus huit ou neuf ans auparavant de Carthagène, & les avoit foumis, avant perfonne, à des expériences.

De très-habiles Chymiftes fe font occupés depuis d'expériences & de recherches fur la platine; en Angleterre, M. Lewis; en Suède M. Scheffer; en Pruffe, M. Margraff; enfin, en France, MM. Macquer, Beaumé, de Buffon, de Morveau, de Sickengen, de Milly. Les travaux réunis de ces différens Chymiftes ont tellement avancé nos connoiffances fur cet objet, qu'on ne craint pas de dire, qu'il est de dire, qu'il est peu de fubstances métalliques qui nous foient aujourd'hui mieux connues que la platine. Celle qui nous arrive de France n'eft jamais abfolument pure.

Hors une feule, la nature n'a point formé des mines d'or & d'argent dans ce qu'on appelle les vallées du Pérou. Les groffes maffes de ces précieux métaux qui s'y rencontrent quelquefois, y ont été transportés par des embrâfemens fouterrains, des volcans, des tremblemens de terre; par les révolutions que l'Amérique a effuyées & effuie encore tous les jours. Ces maffes détachées s'offrent auffi de tems en tems ailleurs. Vers l'an 1730, on trouva, non loin de la ville de Paz, un morceau d'or qui pesoit quatre-vingtdix marcs. C'étoit un compofé de fix différentes

efpèces

efpèces de ce précieux métal, depuis dix-huit jufqu'à vingt-trois karats & demi. On ne voit que peu de mines de bas-aloi dans les monticules voifins de la mer. C'est seulement dans les lieux très-froids & très-élevés qu'elles font riches & multipliées.

Sans avoir des monnoies, les Péruviens connoiffoient l'emploi de l'or & de l'argent qu'ils réduifoient en bijoux, ou même en vafes. Les torrens & les rivières leur fourniffoient le premier de ces métaux ; mais pour fe procurer le fecond, il falloit plus de travail & d'industrie. Le plus fouvent on ouvroit la terre, mais jamais fi profondément que les travailleurs ne puffent jetter eux-mêmes le minéral fur les bords de la foffe qu'ils avoient creusée, ou du moins l'y faire arriver, en le tranfmettant de main en main. Quelquefois auffi on perçoit le flanc des montagnes, & l'on fuivoit, dans un efpace toujours très-peu étendu, les différentes veines que la fortune pouvoit offrir. C'étoit par le moyen du feu qu'étoient fondus les deux mé taux, qu'ils étoient dégagés des matières étrangères qui s'y trouvoient mêlées. Des fourneaux, où un courant d'air rempliffoit la fonction du foufflet, entièrement inconnu dans ces régions, fervoient à cette opération difficile.

Porco, peu éloigné du lieu où un des lieuteTome VI,

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