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Nouveau-Monde. Egarés dans un cahos de dogmes inconcevables, ils perdirent la raifon & l'humanité. Le peuple le plus doux & le plus fociable devint le plus barbare, le plus fanguinaire des peuples. Ce n'étoit pas affez des bûchers & des échaffauds, criminels les uns aux yeux des autres, ceux qui ne furent pas bourreaux, furent victimes. Enfin, le généreux Henri toucha l'ame de fes fujets. En pleurant fur leurs maux, il leur apprit à les fentir. Il leur rendit le doux penchant de la vie fociale, leur ôta les armes des mains, & les fit confentir à vivre heureux fous fes loix paternelles,

Alors la Nation, tranquille & libre fous un Roi en qui elle avoit confiance, conçut des projets utiles. On s'occupa de la formation des Colonies. Les premières idées devoient fe tourner naturellement vers la Floride. A l'exception du Fort Saint-Auguftin, autrefois conftruit par les Espagnols, à dix ou douze lieues de la Colonie Françoife, les Européens n'avoient pas un feul établiffernent dans ce vafte & beau On pays. n'en craignoit pas les habitans. Tout annonçoit fa fertilité. Il paffoit même pour riche en mines d'or & d'argent, parce qu'on y avoit trouvé de ces métaux, fans foupçonner qu'ils venoient de quelques vaisseaux jettés fur les côtes par le naufrage. Le fouvenir des grandes actions , que

quelques François y avoient faites, ne pouvoit pas encore être effacé. Il eft vraisemblable qu'on craignit d'aigrir l'Espagne, qui n'étoit pas dif pofée à fouffrir le moindre établissement dans le golfe du Mexique, ou même dans le voisinage. Le danger qu'il y avoit à provoquer un peuple fi puiffant dans le Nouveau-Monde, infpira la réfolution de s'éloigner de lui le plus qu'il feroit poffible. Les contrées plus feptentrionales de l'Amérique, obtinrent par cette raison le préférence. La route en étoit tracée; on paffa au Canada.

S. V.

Des Poffeffions de l'Angleterre dans l'Amérique Septentrionale.

CES Poffeffions font fufceptibles d'être partagées en trois grandes divifions; 1o. le Canada; 2o. la Nouvelle-Ecoffe; 3°. les Etablissemens de la Baye d'Hudson.

1o. DU CANADA.

Le Canada eft une des plus grandes Provinces de l'Amérique Septentrionale. Elle s'étend du Nord-Eft au Sud-Oueft, depuis le 50e degré de latitude, jusqu'au 45e au Nord - Quest des

Etats-Unis & de la Nouvelle-Ecoffe. Les Sauvages les plus communs dans ce pays, avant l'établiffement des Européens, font les Algonquins, les Hurons, les Iroquois (1), les Nadeffis, & plufieurs autres font plus à l'Ouest, autour des lacs.

Le plus grand fleuve du Canada eft le fleuve Saint-Laurent, dont les eaux fortent des lacs que je vais nommer.

1o. Le lac Ontario eft celui qui communique de plus près avec le fleuve Saint-Laurent. Il est auffi remarquable par ce côté que par celui qui communique avec le lac Erié. Sa fituation eft entre le 43e & le 45e degré de la latitude; fa forme eft prefqu'ovale; fon plus grand diamètre eft du Sud-Ouest au Nord-Eft. Il peut avoir deux cents lieues de tour. On pêche dans le lac Ontario beaucoup d'efpèces de poiffons, entre lefquels eft la perche Ofwego, qui eft d'un goût délicieux, & du poids de trois à livres, quatre Il y a auffi un poiffon du genre des lamproyes, appelé tête de chat, dont quelques-uns pèsent huit à dix livres. Le pays qui environne ce lac, & fur-tout vers le Nord-Eft, eft de fort bonnes terres.

(1) J'observe que les Sauvages, appelés encore chez nous Iroquois, font actuellement connus en Amérique fous le nom des cinq Nations Mohâques.

2o. Le lac Erié, eft au Sud-Ouest du lac Ontario, & communique avec lui par la rivière de Niagara... Cette rivière, dans laquelle paffent toutes les eaux qui viennent des lacs Supérieurs, Michigan, Huron & Erié, a dans le milieu de fon cours une chûte, connue fous le nom de Saut de Niagara. Depuis le lieu d'où l'eau fe précipite jufqu'au lieu où elle tombe, on compte cent quarante pieds de hauteur perpendiculaire. Mais de ce point jufqu'à ce qu'elle coule horizontalement, le lit de la rivière forme un pan incliné d'à-peu-près même hauteur, & s'étend jufqu'à trois lieues. Le bruit de cette chûte fe fait entendre à une diftance prodigieufe. Le Capitaine Carver, qui l'avoit entendu à près de fept lieues, rapporte que l'on affuroit que, dans un grand calme, on peut l'entendre de quinze.

Ce lac a près de cent lieues de l'Eft à l'Ouest, & environ quarante dans fa plus grande largeur. Dans fa partie de l'Oueft, on trouve plufieurs îles remarquables par la quantité prodigieufe de ferpens-fonnette qui s'y rencontre. Il n'eft pas poffible qu'aucun lieu de l'univers en produife un plus grand nombre. Affez près de ces îles, il y a beaucoup de nénuphar. Les ferpens fe repofent ordinairement au foleil fur les feuilles de cette plante. On y trouve auffi le ferpent-fiffleur,

dont le fouffle paffe pour être très-dangereux. Sur les bords du lac Erié, on trouve beaucoup de pyrites.

3°. Le lac Huron eft plus au Nord: c'est le plus grand après le lac Supérieur. Il est vers le 45° & le 46 degrés de latitude; fa forme eft presque triangulaire, & fon circuit d'environ trentequatre lieues. Au Nord eft une île fort respectée des Sauvages, qui l'appellent Ile des Efprits. Deux autres îles, qui fe trouvent au milieu du lac, prêtent un abri aux bâtimens qui veulent traverser le lac, dont la navigation eft dange reuse.

Les poiffons du lac Huron font en général les mêmes que ceux du lac Supérieur. Une partie des terres, qui bordent fon rivage, eft très-fertile; mais dans quelques parties, il est fablonneux & ftérile.

L'ifthme qui fépare à l'Ouest ce lac du lac Michigan, forme une vafte plaine de plus de trente-fix à trente-fept lieues de long, fur une largeur inégale, qui varie de trois à cinq lieues.

4°. Le lac Supérieur eft au Nord-Ouest, & fous le 48° degré de latitude. Il eft d'une étendue très-confidérable, & reçoit près de quatante rivières. Il est abondamment pourvu de

poiffons

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