Imágenes de páginas
PDF
EPUB
[ocr errors]

,, attachées au fervice de l'Etat & du » Public, faire le plus bel ornement » de l'Académie dans la Capitale du Royaume? Na-t'on pas vû de nos jours l'illuftre Chef du premier de » tous les Parlemens (6), affembler ›› dans fa maison les plus habiles, pour » y traiter de tout ce que les fciences » & les Lettres ont de plus curieux &

"

[ocr errors]

de plus agréable; & ménager, malgré ,, le nombre & le poids des affaires qu'il , foutenoit, le tems d'affifter à ces conférences? Pour ceux qui fréquentent » le Barreau, ils font d'une profession » d'autant plus glorieufe que l'étenduë » n'en eft point limitée, & qu'il femble » être de leur devoir de ne rien igno» rer. « C'est à peu près ainfi que s'exprime M, de Voltaire dans le Difcours de fa réception à l'Académie Françoife, en parlant de fon prédéceffeur, qui

16) M. de Lamoignon. On fçait que feu M. le Chancelier, auffi profond Jurifconfulte, que fçavant Littérateur, fe faifoir un plaifir de préfider, & de fe trouver exactement, autant que fes importantes occupations le lui permettoient, aux affemblées du Journal des Sçavans, qui fe tenoient tous les quinze jours en fon Hôtel,

faifoit reffouvenir la France, dit-il, de ces tems où les plus auftères Magiftrats, confommés comme lui dans l'étude des Loix, fe délaffoient des fatigues de leur état dans les travaux de la littérature. Que ceux qui méprifent ces travaux aimables; que ceux qui mettent je ne fçais quelle miférable grandeur à fe renfermer dans le cercle étroit de leurs emplois, font à plaindre ! Ignorent-ils que Cicéron, après avoir rempli la première place du monde, plaidoit encore les caufes des Citoyens, écrivoit fur la nature des Dieux, conféroit avec des Philofophes ; qu'il alloit au Théâtre ; qu'il daignoit cultiver l'amitié d'Éfopus & de Rofcius, & laiffoit aux petits efprits leur conftante gravité, qui n'eft que le mafque de la médiocrité ?

On nous apprend l'origine & les progrès des Académies, on nous donne les éloges de chaque Membre qui les compofent, on nous fait connoître leurs Ouvrages: pourquoi a-t'on négligé jusqu'à préfent l'Hiftoire de ces petits cantons de la République des Lettres, de ces Sociétés particulières, qui ont fouvent cultivé avec tant d'ardeur & de fuc

cès les Sciences, les Arts & la Littérature?

M. l'Abbé Joly nous a confervé dans l'éloge qu'il a publié de M. l'Abbé Papillon (7), la mémoire d'une affemblée Académique, qui s'établit à Dijon vers 1693. Les noms des Sçavans affociés qui la compofoient, feront à jamais marqués avec honneur dans les faftes de la République des Lettres. MM. du May, Lantin, le Gouz, de la Monnoye, Baudot, Taisand, Quarré d'Aligny, Moreau, &c. ont illuftré leur patrie par des monumens éternels d'efprit & d'érudition. Quelque jeune que fût alors M. l'Abbé Papillon, il y tint fon rang avec honneur. Je me fouviens d'une anecdote qu'il avoit apprife de M. Taifand, qui s'étoit trouvé quelque. fois aux conférences de M. de Lamoignon, où il avoit vû Varillas. Un jour qu'on y admiroit le portrait de Louis XIV. peint par Mignard, M. de Lamoignon ayant demandé à Varillas qu'estce qu'il en penfoit, & s'il le trouvoit reffemblant au Roi, Varillas qui écrivoit pour lors l'Hiftoire de France, ré

(7) En 1738. Dijon, in-8°. & réimprimé à la tête de la Biblioth. des Aut. de Bourgogne.

pondit froidement: Certes, Meffieurs, je ne l'ai jamais vû.

Le P. Oudin fe rappelloit toujours avec plaifir les doctes conférences du cabinet de M. Huet, où il eut plus d'une fois l'avantage d'être admis. Ce fçavant Prélat s'étoit fait une fi douce habitude du travail, qu'on l'a vû quelquefois y paffer dix-huit heures par jour: il prétendoit que les plaifirs du cabinet entretenoient fa fanté; mais la fobriété & le régime y ont encore plus. contribué. Lorfqu'il fe retira à la maifon Profeffe des Jéfuites de Paris pour, fe livrer tout entier à l'étude, il fe fit un nouveau genre de vie : tous les jours, levé à trois heures du matin, la prière, quelques lectures pieufes, la Meffe, le dîner; depuis le midi, un fecond fommeil d'environ trois heures, tout le refte du tems jufqu'à dix heures du foir employé à lire ou à écrire, excepté le Dimanche, le Mardi, & le Jeudi, qui étoient fes jours d'affemblées. Elles fe tenoient depuis les cinq heures du foir jufqu'à huit : le Père Daniel y venoit fréquemment; le Père Jobert que M. Huet aimoit beaucoup, y étoit encore plus exact. Après la lecture des

Gazettes & des nouvelles Littéraires, le Prélat prenoit la parole, & traitoit quelque fujet de fcience ou d'érudition, qu'il coupoit volontiers par des écarts & des digreffions agréables; mais auquel il revenoit toujours par cette tournure ordinaire : Je difois donc, &c. Quelque liberté qu'il donnât aux Sçavans de parler ou de lire à leur tour, il fouffroit avec impatience qu'on l'interrompît, & furtout que l'on contredît & qu'on objectât. La féance finissoit par le bouillon rouge de M. de Lorme, qu'on lui apportoit à huit heures.

En 1728, M. le Président Bouhier, qui depuis long-tems étoit tourmenté de fréquentes attaques de goutte, voyant que fes incommodités redoubloient, & ne lui permettoient plus d'exercer les fonctions de fa Charge avec la même affiduité, fe détermina à la réfigner. Depuis quelques années il recevoit dans fon cabinet un certain nombre d'amis choifis, avec lefquels il tenoit un jour de chaque femaine des conférences littéraires. Ce fçavant Magiftrat, moins occupé des affaires du Palais, ranima par propre exemple le zèle des Membres de fa petite Académie: M. le Ba

fon

« AnteriorContinuar »