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(2), pour le projet d'un grand Ouvrage, qui n'a jamais eu lieu. On y offrit au P. Oudin une chaire de Rhétorique; mais étant tombé malade dans cette ville, dont l'air étoit contraire à fa fanté, il retourna à Pont-à-Mouffon, où il foutint avec diftinction en 1703, fon grand Acte de Théologie. Le cours de fes études fini, il alla recevoir les Ordres à Trèves, & revint au Collège de Dijon : il y rentra dans les exercices de la Rhétorique, & fit pendant quinze années confécutives la claffe du foir, c'eft-à-dire, les leçons de poëfie. Ceux qui ont eu le bonheur d'être fes difciples, affûrent qu'il avoit un talent particulier pour bien élever la jeuneffe. Ce qui dégoûte fouvent de l'étude, & ce qui la rend infructueufe, ce font les fauffes & pénibles méthodes: un plan bien formé & exécuté avec foin, rend le travail utile & agréable; double avantage que trouverent les Ecoliers du P. Oudin dans les différentes manières d'étudier qu'il leur

(2) Supérieur du Séminaire Episcopal, & en quelque forte Directeur de l'Univerfité de Strasbourg, mort le 12 Septembre 1712. Voy. les Mém. du P. Niceron, Tom. 2. pag. 333.

donnoit. Son zèle pour leur éducation devint fi ardent, qu'en 1714 il deftinoit une bonne partie de fa penfion à foulager la mifère de quelques-uns d'eux, aimant mieux fe priver luimême d'acheter des Livres : car c'eft le louable usage qu'il faifoit de ce re

yenu.

La Théologie pofitive que le Père. Oudin profeffa pendant quinze autres années, fit quelque diftraction à l'étude des Belles-Lettres. C'eft dans la Somme de S. Thomas, qui fut toujours fon Auteur favori, qu'il prit l'ordre, la méthode, & cette chaîne de divifions, dont il s'eft fervi dans fes ouvrages Théologiques. Il auroit fans doute achevé fes Commentaires. fur P'Ecriture Sainte, fi fes Supérieurs ne l'avoient employé au grand Ouvrage qui l'a occupé tout le refte de fa vie; cette fçavante Bibliothèque des Ecrivains Jéfuites, que fes infirmités l'ont empêché d'achever, & de publier dans le tems qu'il s'étoit prefcrit..

L'amour de la retraite & de l'étude ne lui permirent pas d'entreprendre de grands voyages: il paffa quelques mois à Autun, & un plus long tems à Ver

dun, où la Bibliothèque de M. d'Hallencour lui fut ouverte, pendant qu'il travailloit fous les yeux de ce Prélat au Bréviaire de fon Diocèse. Un voyage à Lyon & deux autres à Paris (3), firent connoître le mérite du P. Oudin. A Paris, il fe trouva aux conférences du Journal de Trévoux ; dans l'une & l'autre ville, il vit les Sçavans, & ne. put fe refufer aux engagemens de plufieurs relations littéraires, où il donna toujours des preuves de l'étenduë de fes lumières & du caractère le plus obligeant.

Sans entrer ici dans un détail exact des différens genres d'étude du Père Oudin, je dois au moins parler de ceux où il s'eft particuliérement diftingué. La propriété des mots Latins fut le premier objet de ses recherches. Il n'ignoroit pas que l'unique moyen pour bien écrire en cette Langue, est d'en connoître parfaitement le caractère & les fineffes. C'eft dans les mêmes vûes que le P. Maffée, dont le style est fi pur & fi beau, avoit entrepris un prodigieux ouvrage fur la matière (3) Son féjour à Paris en 1713, ne fut que de huit mois, & de fix en 1739.

Grammaticale, où il vouloit fixer le tems de l'origine des mots Latins, & celui où ils avoient été en ufage, en indiquant les Orateurs, les Poëtes, les Hiftoriens & les Philofophes qui les avoient employés. Le P. Oudin, qui dans la première ardeur de fes travaux littéraires fe levoit quelquefois à deux heures du matin pour étudier, avoit acquis une fi grande facilité d'écrire en Latin, que cette Langue lui étoit devenue plus familière que la Françoile même. A l'exemple de M. de la Monnoye, il s'adonna un peu tard au Grec ; mais ce fut avec tant d'ardeur, qu'il fe trouva bientôt capable de faire des vers en cette Langue : c'eft ce qu'il a lui-même avoué dans des Hendécaffyllabes à M. de Berbifey, fon illuftre Mécène (4):

Dixi non femel omnibus Camœnis
Argivis, Latiifque, Celticifque, &c.

Le Père Oudin fçavoit encore très

(4) Ancien premier Président du Parlement de Dijon. Ce vertueux Magiftrat, qui a toujours favorifé les Lettres, protégé l'homme de bien, partagé fa fortune avec l'indigent, s'eft

bien l'Espagnol, le Portugais, l'Italien & l'Anglois.

Ses vers ne comportent pas feulement les beautés du ftyle poëtique, & toutes les fineffes de l'art: on y fent auffi l'élévation de génie, la force des pensées, foutenues par des idées nobles, des images brillantes & des tournures heureufes.

L'étude de l'Hiftoire & de la Critique, ou, fi l'on veut, ce genre d'érudition qui embraffe toutes le parties de la littérature, ouvrit une nouvelle carrière au P. Oudin, qui réuniffoit les qualités propres à former un excellent Critique; une belle mémoire, beaucoup de pénétration & de jufteffe dans l'efprit, l'ufage des Langues, une gran de connoiffance des Auteurs anciens & modernes, & l'amour du travail, cette ardente paffion qui met en œuvre les

talens.

L'Écriture Sainte; les Commenta

acquis l'amour & le refpect de fes concitoyens, qui lui donnent aujourd'hui fi juftement, & lui conferveront à jamais le titre de Père de la Patrie. M. de Berbifey a fondé les prix du Collège des Jéfuites de Dijon : il a donné de grands biens à l'Hôpital de cette Ville, &c.

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