peuple, pendant que chez un autre elle eft entiérement négligée. Il y a cent ans que l'érudition étoit cultivée en France avec autant d'ardeur que de fuccès ; aujourd'hui c'eft la Physique, la Géométrie & l'Aftronomie. Seroit-ce qu'ayant reconnu les avantages de ces fciences fur l'érudition, nous aurions décidé notre goût conféquemment à l'utilité des fciences fpéculatives? Cepen

dant fi on en croit l'Aureur d'un des meilleurs Ouvrages Philofophiques qui ayent été compofés dans notre Langue (2), elles font plus vaines qu'utiles. Le paffage eft trop beau pour ne pas le copier ici en entier Bayle qui en a été frappé, afluroit qu'il aimeroit mieux avoir dit ces paroles, que d'avoir fait plufieurs volumes.

(2) La Logique, ou l'Art de penfer. Voy. le premier Difcours, qui eft à la tête de ce Livre,

"

» Non-feulement ces fciences » ont des recoins & des enfonce» mens fort peu utiles ; mais elles "font toutes inutiles, fi on les. » confidère en elles-mêmes & » pour elles-mêmes. Les hom"mes ne font pas nés pour employer leur tems à mesurer des lignes, à examiner les rapports » des Angles, à confidérer les » divers mouvemens de la matiè»re. Leur efprit eft trop grand, » leur vie trop courte, leur tems » trop précieux pour l'occuper à » de fi petits objets ; mais ils font obligés d'être juftes, équita»bles, judicieux dans tous leurs. » difcours, dans toutes leurs ac"tions & dans toutes les affaires. » qu'ils manient, & c'est à quoi » ils doivent particuliérement » s'exercer & fe former. «<

Je ne prétens donner au Public ni une vie, ni un éloge du P. Qu.

din; c'eft plutôt un recueil de quelques Mémoires littéraires où je fais entrer l'histoire des Ouvrages, les fentimens & les réflexions de ce Sçavant. Pendant dix-huit ans que je l'ai connu j'ai toujours admiré fa modeftie, fa douceur & fa profonde érudition. Ami des gens de Lettres, il partageoit avec eux fes riches connoiffances, & n'a jamais prêté fa plume à cette critique aufrère, qui découvre rarement les défauts d'un Ouvrage fans en bleffer l'Ecrivain. Les Sçavans, difoit-il, doivent éviter ces démêlés littéraires, qui les emportent au delà de leur objet principal, & qui leur dérobent un tems confidérable: d'ailleurs il ne réfulte guère de ces combats que de petits écrits pleins de chaleur & de fiel, qui fans tourner à l'avantage des Lettres, deshono

rent

rent prefque toujours leurs Au

teurs..

Ces fentimens & cette conduite lui avoient acquis d'illuftres amis, auxquels je n'ai pû refufer des éloges justement mérités: j'ai ofé louer, dans un fiècle où la fatyre fe déchaîne ouvertement contre le mérite, où l'on tourne la science en ridicule, où des efprits fuperficiels ne rougiffent pas de fe déclarer ennemis des gens à talens, & de s'opposer aux progrès des Lettres & des Arts. Ce font ces petits tyrans qui ont introduit fur notre Parnaffe, & jufques dans la Répu blique des Lettres, un je ne fçais quel jargon précieux & ridicule, que bientôt on ne pourra plus entendre qu'à l'aide d'un nouveau Dictionnaire néologique. Non-feulement nos Cuvrages de mode en font infectés : il s'eft

b

même gliffé dans la Chaire & au Barreau; mais ce qui doit paroî tre encore plus étonnant, c'est que les écrits mêmes des Erudits & des Philofophes de nos jours foient parfemés de ces fleurettes bizarres.

Parmi les Ouvrages du P. Oudin, j'ai choifi des fujets hiftoriques & littéraires qui ont donné lieu à quelques Differtations; j'y ai inféré des anecdotes & des dif cuffions critiques : j'ai fait plus je me fuis quelquefois engagé dans des digreffions affés longues; mais qui ne feront pas trouvées telles, fi elles peuvent inftruire ou amufer. On doit mettre furtout au nombre de ces écarts l'article qui contient la Vie & le Catalogue raifonné des Ouvra ges de M. l'Abbé Germain, avec une Lettre concernant M. l'Abbé de Longueruë..