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tiellement le fond matériel des maladies. Je fonde cette idée fur ce que ce flux ne juge pas parfaitement les maladies vives un peu confidérables, & que prefque toujours il ne fe fupprime que parce qu'il exifte une caufe morbifique, qui dérange l'ordre des mouve→ mens de la nature.

Ce que je dis-là, Monfieur, n'eft pas dit à deffein de prévenir contre l'ufage de la faignée dans une attaque d'apoplexie: mon but eft feulement de faire voir qu'on s'abufe étrangement quand on fonde fur elle l'efpérance d'une parfaite guérifon, au point de la répéter plufieurs fois fur le même malade. Mais ce qui prévient le plus en faveur de ce genre de fecours, c'eft fon effet prompt & fubit dans cette maladie. Il eft certain qu'il y a des malades qui recouvrent leurs mouvemens très-peu de tems après avoir été faignés.

Quoi qu'il en foit de ces effets fi prompts, ne fera-ce pas encore un problême, Monfieur, de favoir fi les hommes frappés d'apoplexie ne gagneroient pas autant à être un peu plus long-tems malades. Hippocrate a dit qu'il eft impoffible de guérir une très-forte apo

plexie. Il y a grande apparence que dans ces cas-là tout l'effort s'eft porté fur le cerveau, & a fait fur l'origine des nerfs une impreffion ineffaçable, d'où naît l'inefficacité de toutes les efpeces de remedes. L'on peut croire, au contraire, que, dans les apoplexies légeres & guériffables, il n'y a de léfion que dans les branches des nerfs, dont l'action fe trouve fufpendue par l'effort du fpafme, & gênée par l'empâtement du tiffu cellulaire: mais il faut, pour que la liberté des mouvemens puiffe fe rétablir, que le fonds matériel fe cuife & s'évacue. La nature a befoin pour cette befogne de toutes fes forces; elle a même befoin d'être un peu excitée, fur-tout chez les vieillards, chez qui elle eft devenue débile. J'ai vu des perfonnes apoplectiques & paralitiques, qui, conduites d'après ces vues, ont été guéries. La révolution a commencé par des fueurs abondantes, qui font devenues pâteufes, & la maladie s'eft terminée par des urines épaiffes & de légeres diarrhées and on multiplie les 4. remedes, on fatigue la nature, on la tourmente, on l'affoiblit.

Est-il bien étonnant que la nature,

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déjà débile, épuifée encore par la multiplicité des remedes, & fouvent contrariée dans fes vues, ne puiffe faire la coction de la matiere qui remplit & empâte tout le tiffu muqueux? Je pour rois vous rapporter beaucoup d'obfervations qui vous prouveroient que la coction & la crife ne fe font pas quand on tourmente les malades, & qu'on les accable à force de faignées & de purgatifs. J'ai encore actuellement entre les mains un homme qui n'est resté malade, que parce que le Médecin n'ayant pas bien connu quelle étoit la nature de fa maladie, le fit faigner & lui confeilla des purgatifs dans le tems où il auroit dû le faire fuer. Ce malade avoit la fievre, un point de côté, & crachoit du fang: fa maladie étoit proprement catharrale: on le fit faigner deux fois & on le purgea. La maladie ne fut pas jugée; car il eft refté pâle, foible, reffentant un poids continuel fur la poitrine, & des points douloureux dans le côté. Cet homme m'ayant demandé mon confeil, je tâchai & je vins à bout de rétablir des fueurs qui l'ont parfaitement guéri.

J'ai vu des catharres accompagnés

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des excès par rapport à l'usage de l'émétique mais ces abus dérivent de la même fource, qui eft la trop grande facilité que l'on apporte à fe prévenir en faveur d'un remede auquel on a vu produire quelques bons- effets. On eft tenté malgré foi d'en étendre l'ufage à toutes les maladies: c'eft un défaut dont fe rendent moins ou prefque point cou pables les Médecins qui ont bien appris à connoître la marche & la nature des maladies. Adieu, Monfieur. Je fuis, &c.

LETTRE XXV I..

L'apoplexie n'exige pas plus que les au* tres maladies aigues, une médecine ac“ tive.

JE conviens avec vous, Monfieur, que le doute eft le partage du fage; mais auffi le fage ne refufe pas fa croyance, quand on lui donne d'affez bonnes raifons pour pouvoir le convaincre. Que me répondrez-vous, quand je vous rappor terai des faits? Ce font eux qui décident en Médecine, comme en Phyfique. Eh bien! Monfieur, il résultera

de ces faits la preuve des deux conféquences que vous avez tirées de ma derniere Lettre fur l'apoplexie, & qui vous ont fi fort révolté, parce qu'elles ne s'accordent pas avec vos préjugés fur la nature & fùr le traitement de cette maladie. La premiere conféquence eft que l'apoplexie rentre dans la claffe des maladies catharrales: la feconde, qu'elle a une marche comme les autres maladies ; qu'elle n'exige pas plus qu'elles une Médecine active, &

que moins on s'empreffe de la guérir, plus fa guérifon devient sûre & parfaite, en fuppofant toutefois qu'elle foit guériffable. Entr'autres faits, je vous en citerai deux, qui ne vous permettront plus de confidérer comme abfurde ce que je vous ai dit à ce fujet.

Un homme âgé de cinquante-fix ans fe plaignoit, depuis quelque tems, de douleurs qui occupoient toute la lon gueur de l'échine: il étoit enchifrené il touffoit; il avoit mal à la tête; il éprouvoit de tems à autres des friffons. On lui confeilla l'ufage des bains pour calmer fes douleurs, & combattre une humeur dartreuse qui s'étoit manifeftée aux bourfes, Les bains ne calmerent

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