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dompter ces rebelles avant que le mal passât plus avant: il leur fit connoître que Zifca vouloit former une ef- AN. 1421. pece d'anarchie dans la Bohême, & que la maxime, que tout feigneur étoit déchu de fes droits par le peché mortel, qui faifoit le fondement de la doctrine de ces féditieux, étoit capable de foulever les plus fideles & de groffir le parti des revoltez, fi l'on ne s'animoit à les exterminer promptement. Le difcours de Sigifmond eut tout l'effet qu'on en pouvoit attendre. Les feigneurs promirent de lever des troupes, & d'entrer dans la Bohême du côté de l'occident, pendant que l'empereur affembleroit toutes les forces de la Hongrie & de l'Autriche pour y arriver par l'orient. Tous les princes & les électeurs, excepté celui de Tréves qui étoit malade, fe mirent en campagne, & arriverent dans le mois d'Août fur les frontieres occidentales de la Bohême, mais l'empereur ne put être auffi diligent qu'eux. Zifca s'enferma dans Thabor, prévoïant que s'il CXCVII s'oppofoit d'abord à cette multitude d'Allemands qui accompagnoient leurs princes, il ne pourroit éviter fa défaite: auffi furent-ils fort furpris de ne le point trouver en campagne ; mais fon deffein étoit que l'armée catholique s'arrêtât à quelque fiege : & comme toutes les places des Huffites étoient bien munies & fortifiées, il se flatoit que la longueur des fieges lafferoit les troupes, & que n'étant pas païées elles déferteroient. L'évenement juftifia fa penfée. Les imperiaux affiegerent la ville de Soas,place très-forte & des mieux pourvûës, & la battirent avec vigueur; mais les affiegez aïant foutenu jufqu'à vingt-fix assauts durant sept femaines, les Allemands furent contraints d'en lever le fiege faute de vivres le feizième d'Octobre. L'empereur qui avoit promis de fe rendre en Bohême dans le

Yyy iij

L'armée imperiale

attaque Soas, & en leve le fiege. Huffit. 1. §

Cochlée hift

mois d'Août, n'y put arriver qu'à la fin de Decembre, AN. 1421. parce que ne pouvant obliger les troupes de Hongrie & d'Autriche à marcher contre leur gré, il fallut emploïer beaucoup de temps à gagner la nobleffe de ces deux états, qui les devoit conduire.

CXCVIII.

vinciale des Huffi

leur conduite.

Dubrav. l. 24.

in fin.

2. 5.

Pendant le même temps, ce prince touché des malAffemblée pro- heurs que la guerre la plus jufte entraîne nécessaireees pour juftifier ment après foi, follicitoit auffi les Huffites de faire au moins une tréve longue & bien cimentée pour épargner le fang du peuple. Mais ces rebelles ne voulurent Cochl.hift.Hufit. point écouter cette propofition,à moins qu'on ne leur accordât ces quatre articles ; fçavoir, que les prêtres annonceroient la parole de Dicu par toute la Bohême librement & fans aucune oppofition; que l'on donneroit la communion fous les deux efpeces à tous les fideles qui ne feroient pas coupables de peché mortel, (ils entendoient un peché public); que l'on ôteroit au clergé toute poffeffion de biens exterieurs, toute jurifdiction fur le temporel, & qu'on le reduiroit à la vie évangelique & apoftolique;enfin que l'on corrigeroit & empêcheroit même les pechez mortels,fur. tout les pechez publics, & tous les vices oppofez à la loi de Dieu, & que cette correction & réformation fe feroient dans quelque état qu'ils fuffent commis, par ceux à qui le droit de les corriger & de les réformer appartenoit. On porta ces articles à Sigifmond, qui après les avoir lû, dit à ceux qui étoient prefens, voilà un venin fubtil qu'on nous prefente à boire pour nous donner la mort ; & il ne voulut pas les accepter.

Quelques jours après les Huffites écrivirent plufieurs lettres à quelques princes au nom de Conrad archevêque de Prague qui étoit dans leur parti, & en celui des barons, des villes & communautez de la Bohême, pour

fe juftifier des crimes d'herefie & de rebellion dont on les accufoit. On a deux de ces lettres dattées du fixié- AN. 1421.. me de Juillet où ils invectivent fortement contre Sigifmond, lui reprochent la mort de Jean Hus, la croi fade que l'on avoit prêchée contre euxi, & plufieurs autres faits femblables; ils difent qu'il eft le feul auteur des maux que fouffre la Bohême, que pour eux ils ne combattoient que pour la défense de leurs biens, de leur religion & de leur vie; ils exhortent chacun à fe joindre à eux, & menacent de proceder contre ceux qui ne fe foumettroient pas aux quatre articles que l'on vient de rapporter.

Peu contens de ces lettres ils tinrent à Prague le feptiéme du même mois de Juillet une celebre affemblée, qu'ils appellerent un faint concile.Ils yarrêterent vingtdeux articles qui contiennent leur créance fur le facrement de l'euchariftie, fur les ceremonies de la meffe. & fur la réformation des mœurs du clergé : ils difent qu'il ne doit avoir aucun commandement civil ou séculier. Ils ne rejettent point dans ces articles la confef-. fion auriculaire ; & il y en avoit quelques-uns qui paroiffoient conformes à la doctrine & à la pratique de l'églife, d'autres conçûs en termes ambigus & obfcurs :: ce qui caufa de grandes divifions parmi eux.

cxcix. Articles de cette

СХСІХ.

affemblée.

Cochl. ibid.

C C.
Le dauphin dé-

Henri V. roi d'Angleterre, qui étoit repassé dans fon isle sur la fin de l'année précedente pour en tirer fait l'armée des un nouveau fecours d'hommes & d'argent, avoit laiffé Anglois. en France le duc de Clarence fon frere, pour agir en hift. de Charles Juv.des Urfins fon abfence. Le dauphin avoit pour lui l'Anjou, la vi Touraine, le Poitou, l'Auvergne, le Berri, le Dauphiné & le Languedoc. Avec le fecours qu'il tira de ces provinces, il fe mit en état de défendre le droit qu'il avoit au roïaume de France. Le roi d'Ecoffe lui

CCI.

terre revient à

Paris.

envoïa auffi trois à quatre mille hommes de bonnes AN. 1421. troupes fous la conduite du comte de Bouchain ou Bukan. Les François & les Ecoffois fe mirent donc en campagne & marcherent contre le duc de Clarence, qui avec dix mille hommes étoit allé affieger Baugé en Anjou. On en vint à une bataille; l'armée Angloife: fut défaite, & le duc y fut tué avec plus de deux mille des fiens, le refte fe fauva par le païs du Maine en Normandie. Cette action fe paffa la veille de Pâques & le comte de Bukan, qui s'étoit fort fignalé en cette occafion, reçut du dauphin l'épée de connétable pour récompenfe de fa valeur. Par cette victoire le champ demeura libre aux François, & le dauphin reprit quelques places dans le Perche & dans le païs Chartrain. La défaite des Anglois obligea le roi Henri de réLe roi d'Angle- venir en France avec un renfort de très-confitroupes derable, dans le deffein de réparer la perte qu'il venoit Polyd. 1. 22. & de faire, & de vanger la mort de fon frere. Il fit tous fes efforts pour rencontrer le dauphin: il passa à côté de Chartres & de Châteaudun,se logea aux fauxbourgs d'Orleans fans l'avoir pû trouver : une violente diffenterie lui aïant enlevé plus de trois mille de fes foldats, il fe rabattit fur la ville de Dreux, qu'il prit à composition, & de-là il prit la route de Paris, d'où il renvoïa la reine fon époule qui étoit enceinte, faire fes couches en Angleterre. Pendant qu'il faifoit le fiege Remontrances de Dreux, un hermite qui lui étoit inconnu, vint lui xoi d'Angleterre. faire des remontrances fur les grands maux qu'il caufoit à la religion chrétienne, par fon injuste ambition qui le portoit à s'emparer du roïaume de France contre toutes fortes de droits & contre la volonté de Dieu, & le menaça d'une prompte & fevere punition s'il ne renonçoit à fon entreprife. Henri prit cet avis pour

feq.

CCII.

d'un hermite au

Vvalfing. in Henric. V.

unc

une rêverie,ou pour une fuggeftion des gens du parti du dauphin, & continua comme il avoit commencé : AN. 1421. cependant il mourut quelques mois après.

CCIII. Tréve entre le roi

Louis d'Anjou.

Les cardinaux que le pape Martin V. avoit envoïez légats en Arragon auprès du roi Alfonse, firent con- d'Aragon & fentir ce prince à une tréve, à condition que Louis d'Anjou remettroit toutes fes places, excepté Aquila, entre les mains du pape, jusqu'à ce qu'on cût vû s'il se pourroit faire entre eux une bonne paix ; & fur cela Louis alla trouver le pape à Rome, & Alfonse se retira dans Naples.Celui-ci n'y fut pas plûtôt arrivé que pour épouvanter le fouverain pontife, & pour en tirer enfuite ce qu'il fouhaitoit, il se servit, selon sa coûtume, de fon fantôme Pierre de Lune, menaçant hautement de réduire tous fes états fous fon obedience. Et en effet, il souffroit déja qu'on le reconnût en Arragon, & qu'on y parlât publiquement contre le concile de Conftance; de forte que le pape, fuivant le traité qu'on venoit de conclure, se vit obligé de re- Alfonfe les places mettre entre les mains d'Alfonfe, du confentement de Louis d'Anjou, les places qu'il avoit en dépôt. Après quoi Sforce voïant que tout fe déclaroit pour la reine Jeanne & pour Alfonfe, fe rendit aux preffantes follicitations qu'on lui faifoit continuellement de la part de la reine de Naples, & se remit dans son parti.

CCIV.
Le pape remet à

de Louis d'Anjou.

CCV. Alfonfe veut

qu'il le reconnoif

Alfonfe voïant qu'il tiroit tant d'avantage de la peur que le pape paroiffoit avoir du rétablissement de exiger du pape Pobedience de Pierre de Lune, voulut encore, en re- le roi de Naples. nouvellant ses menaces avec plus de hauteur qu'auparavant, l'obliger à le reconnoître roi de Naples. Alors Platina in MarMartin voïant que cet injufte prince abusoit de sa patience & de fa trop grande facilité, & qu'il ne gardoit plus de mefures avec lui, réfolut d'agir avec plus de Tome XXI.

Zzz

tin. V.

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