JOCASTE. Oui je le veux fans doute; C'eft ma feule esperance, & pour peu qu'il m'é coute, Pour peu que ma priere ait fur lui de pouvoir, SCENE I I. JOCASTE, PHILOCTETE, EGINE. JOCASTE A H! Prince, vous voicì, Dans le mortel effroi dont mon ame est émuë, Je ne m'excufe point de chercher votre vûë; Mon devoir dont la voix m'ordonne de vous fuir, Ne me commande pas de vous laiffer perir. Je crois que vous fçavés le fort qu'on vous aprête. PHILOCTETE. Un vain peuple en tumulte a demandé ma tête i JOCASTE. Ah de ce coup affreux fongeons à nous parer! Partés, de votre fort vous êtes encor maître: Mais ce moment, Seigneur, eft le dernier peut-être Où je puis vous fauver d'un indigne trépas. Fuyés, & loin de moy precipitant vos pas, Pour prix de votre vie heureusement fauvée, Oubliés que c'est moi qui vous l'ai confervée. PHILOCTETE. Daignés montrer, Madame, à mon cœur agité Des biens que m'a ravis la colere celeste, Ma gloire, mon honneur est le feul qui me refte; Ne m'ôtés pas ce bien, dont je fuis fi jaloux, Et ne m'ordonnés pas d'être indigne de vous, J'ai vêcu, j'ai rempli ma triste destinée, Madame, à votre époux ma parole est donnée; Quelque indigne foupçon qu'il ait conçû de moi, Je ne fçai point encor comme on manque de foi, JOCASTE. Seigneur, au nom des Dieux, au nom de cette flâme · . Dont la trifte Jocafte avoit touché votre ame PHILOCTETE. Non, la mort à mes maux eft l'unique remede. Et le mien vaut du moins qu'il daigne l'accepter, ជិត SCENE III. OEDIPE, JOCASTE, PHILOCTETE, EGINE, HIDASPE, Suite. P OE DIP E. Rince, ne craignés point l'impetueux caprice D'un peuple dont la voix preffe votre fuplice, J'ai calmé fon tumulte, & même contre lui Je vous viens, s'il le faut, prefenter mon apui On vous a foupçonné, le peuple a dû le faire. Moi qui ne juge point ainfi que le vulgaire, Je voudrois que perçant un nüage odieux, Déja votre vertu brillât à tous les yeux : Mon efprit incertain, que rien n'a pû resoudre, N'ofe vous condamner,mais ne peut vous abfoudre. C'est au Ciel que j'implore à me determiner. Ce Ciel enfin s'apaife, & veut nous pardonner; Et bientôt retirant la main qui nous oprime, Par la voix du grand Prêtre il nomme la victime, Et je laiffe à nos Dieux plus éclairés que nous, Le foin de decider entre mon peuple & vous. PHILOCTETE. Tout autre auroit, Seigneur, des graces à vous ren→ dre: Heet Mais je fuis Philoctete, & veux bien vous aprendre Que l'exacte équité dont vous fuivés la loi, Si c'est beaucoup pour vous, moi. n'eft point affés pour Je me fuis vu reduit à l'affront de répondre témoin ; Hercule apui des Dieux, & vainqueur de l'Afie, Les monftres, les tirans qu'il m'aprit à domter, Ce font là les témoins qu'il me faut confronter. De vos Dieux cependant interrogés l'organe ; Nous aprendrons de lui fi leur voix me condamne, Je n'ai pas befoin d'eux, & j'attends leur arrêt, Par pitié pour ce peuple, & non par interêt. SCENE |